Pas de pas-de-porte dans les baux ruraux
Le « pas-de-porte » résulte d’une pratique issue des baux commerciaux, consistant en un versement de somme d’argent, lors de la conclusion du contrat de bail, par le locataire au bailleur. Qu’en est-il en matière de baux ruraux non-cessibles ?
Le « pas-de-porte » résulte d’une pratique issue des baux commerciaux, consistant en un versement de somme d’argent, lors de la conclusion du contrat de bail, par le locataire au bailleur. Qu’en est-il en matière de baux ruraux non-cessibles ?
Dans le cadre d’un changement de fermier, le bailleur peut-il demander au nouveau preneur le versement d’une indemnité lors de la conclusion du nouveau bail ? Ce versement est-il légal ?
Pas-de-porte et baux non-cessibles sont-ils compatibles ?
L’article L.411-74 du Code rural prévoit que « sera puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros ou de l’une de ces deux peines seulement, tout bailleur, tout preneur sortant ou tout intermédiaire qui aura, directement ou indirectement, à l’occasion d’un changement d’exploitant, soit obtenu ou tenté d’obtenir une remise d’argent ou de valeurs non justifiée, soit imposé ou tenté d’imposer la reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci ». Ainsi, le propriétaire foncier ne peut donc réclamer le paiement d’un pas-de-porte lors de la conclusion ou de la cession d’un bail, sans être sanctionné, que ce soit au titre d’un supplément de loyer ou d’une indemnité compensatrice. De même, le fermier qui cède son exploitation ne peut réclamer au nouveau locataire le paiement d’un prix de cession dans le cadre du transfert du bail.
Qui peut exercer l’action en paiement de ces sommes ?
Bien entendu, la personne qui a versé indûment ces sommes est en droit d’en demander le remboursement. Cette action en répétition exercée à l’encontre du bailleur est recevable pendant toute la durée du bail initial et des baux renouvelés ainsi que, en cas d’exercice du droit de reprise, pendant un délai de dix-huit mois à compter de la date d’effet du congé.
Toutefois, dans une récente décision, la Cour de cassation a précisé que cette action en répétition de l’indu n’est pas réservée au seul locataire et qu’elle est ouverte à celui qui, à l’occasion d’un changement d’exploitant, a réglé la somme indue au bailleur pour le compte du preneur (Cass. 3e civ., 26 janv. 2017, n° 15-12.737) : en l’espèce c’est la société bénéficiaire de la mise à disposition des biens loués qui avait payé des sommes déguisées par des factures pour la vente de biens inexistants. Ainsi le paiement de la somme demandée par un propriétaire bailleur est totalement illicite, et dans le cas d’un tel versement, le bailleur risque non seulement de devoir la rembourser, mais également de devoir payer une amende (voire une peine d’emprisonnement…)
Les baux cessibles font-ils exception à ce régime ?
Certains ont pu considérer que « le bail cessible, c’est un pas-de-porte. À vous de faire savoir que signer un bail ça se négocie, que le droit d’exploiter vos terres coûte telle somme », a rappelé M. Brayer, président de la Fédération nationale de la propriété privée rurale, lors de l'assemblée générale du Cantal à Aurillac le 17 août 2007. Dans les relations entre preneur sortant et preneur entrant, la prohibition du pas-de-porte a bien été levée, et un tel versement est donc légal. Toutefois, concernant les relations entre propriétaire bailleur et preneur entrant, ce versement devrait être a priori considéré comme illégal, notamment parce que l’encadrement des fermages s’applique également aux baux cessibles.
Pour un conseil adapté, n’hésitez pas à consulter votre notaire