« Nous avons monté un Speedway sans hydraulique »
Vignerons dans le Vendômois, Florent et Charles Jumert travaillent le sol sous le rang avec un intercep Belhomme, sur lequel ils ont adapté un système permettant de se dispenser de l’hydraulique du tracteur.
Vignerons dans le Vendômois, Florent et Charles Jumert travaillent le sol sous le rang avec un intercep Belhomme, sur lequel ils ont adapté un système permettant de se dispenser de l’hydraulique du tracteur.
En Gaec avec sa mère à Villiers-sur-Loir dans le Loir-et-Cher, Florent Jumert, toujours secondé par son père Charles, aujourd’hui à la retraite, est à la tête d’une exploitation de 13 hectares en AOC coteaux-du-vendômois. Cherchant à raisonner les intrants sur l’exploitation, les vignerons se sont remis à travailler mécaniquement l’interrang il y a trois ans, en s’équipant notamment d’étoiles Kress de diamètre 70 cm. « Ces dernières montrent cependant leur limite lorsqu’on se laisse dépasser par la végétation quand le printemps est pluvieux ou si on est en retard dans le pressage des fagots, confie Florent Jumert. Et ça chatouille juste quelques gros chardons à grosse racine pivot. » Les vignerons partent donc à la recherche d’une alternative un peu plus virulente et se rendent au Sival, à Angers, en janvier 2019. Ils y découvrent l’intercep Reflex Belhomme, pouvant être équipé de lames ou de disques Speedway. « Nous avons été séduits par la simplicité du montage, par les faibles besoins en hydraulique (10-15 l/min) et par la réactivité du palpeur électrique du Reflex, aussi bien en effacement qu’en repositionnement", confie Charles Jumert. Une démonstration sur l’exploitation quelques semaines plus tard finira de convaincre les vignerons. « Voir le Speedway au travail dans nos terres à silex sans palpeur nous a convaincus, expliquent-ils. Les disques travaillent profond, malgré une année sèche. Le désherbage mécanique s’est montré très efficace. Ce sera à confirmer lors d’une année plus humide. Et on atteint 7-8 km/h dans les vignes de 30 ans, sans faire de casse. »
Une boule d’azote comme sécurité d’effacement
Dès la démonstration, une idée germe dans la tête de Charles, mécanicien dans l’âme : faire fonctionner le Speedway sans palpeur et sans l’hydraulique du tracteur. En effet, du fait des faibles besoins en hydraulique de l’intercep, l’huile tend à chauffer par laminage, l’enjambeur débitant 45 l/min. Charles Jumert ressort de son atelier une boule d’azote récupérée d’une rampe de pulvérisateur. D’une capacité de 33 cl, elle offre une plage d’utilisation de 20 à 175 bars, largement suffisante pour les besoins de l’outil. Le vigneron intègre ainsi la boule d’azote combinée à une vanne trois voies. « Aujourd’hui, je règle la pression à 40-50 bars avec le distributeur du tracteur, puis je tourne la vanne vers la boule d’azote, explique Florent Jumert. L’intercep travaille désormais en circuit fermé avec la sécurité à gaz et je n’ai plus besoin de l’hydraulique du tracteur. » Le système se montre efficace, la pression n’ayant pas changé d’un iota après quinze jours de travail. Les étoiles Kress sont désormais montées sur les supports d’efface-traces à l’arrière, derrière les roues du tracteur. « Les disques Speedway déplacent la terre de l’interrang, une fois dans un sens, une fois dans l’autre, explique Florent Jumert. Même s’ils ont peu d’angle, avec la vitesse, il n’est pas rare que la terre soit projetée contre la roue arrière du tracteur. En plus d’affiner la terre et le désherbage mécanique, les Kress nivellent le sol et peaufinent le travail. »
Une consommation de carburant réduite
Conséquence de ce montage, outre l’absence de laminage, la consommation de carburant est réduite : 3 l/h sur le Bobard M55 de 55 chevaux, 2 l/h sur le Bobard M40. « Il n’est plus utile de monter en régime quand on attaque un rang afin de remettre de la pression dans le circuit, apprécient les vignerons. Et on peut travailler le rang à régime moteur réduit, en passant un rapport de plus. L’hydraulique du tracteur est alors disponible pour un autre outil. La saison prochaine, nous attellerons probablement la rogneuse en même temps que l’intercep. »
Le Speedway, un outil entre la lame et la charrue cavaillonneuse
L’intercep à disques Speedway est un outil complémentaire à la lame, capable d’intervenir lorsque la végétation est avancée.
« C’est un outil aratoire utilisé pour le désherbage de l’entreplant », présente Gérard Belhomme, le concepteur du Speedway. Composé d’un disque crénelé monté sur un bras intercep Reflex, cet outil travaille avec ou sans palpeur. « Sur des vieilles vignes ou des jeunes plants, il est préférable de garder les palpeurs", préconise Loïc Pasdois, conseiller machinisme à la chambre d’agriculture de Gironde. Le constructeur Belhomme présente cet outil comme une alternative à la lame, notamment lorsque l’on s’est laissé dépasser par l’enherbement, à la suite d’un printemps pluvieux par exemple, ou avec certaines essences que la lame ne parvient plus à éliminer. "Quant à la fois les systèmes foliaire et racinaire sont trop développés, la lame ne peut plus correctement faire son travail, explique Gérard Belhomme. Il est donc nécessaire d’effectuer un travail plus profond pour déloger la racine." L’orientation du disque de Speedway ne propose pas d’angles d’attaque et d’entrure importants.
Travailler sans palpeur pour aller au plus près des ceps
L’objectif est de déplacer et soulever légèrement la terre afin de déchausser le système racinaire. Le montage sur intercep permet de déplacer dans un sens puis dans l’autre cette bande de terre de 10 cm sur le rang, sans la retourner complètement, afin de limiter l’érosion. Cette érosion est maîtrisée également par l’absence de lissage. "Il s’agit plus d’un travail de cisaillement que d’un retournement, résume Gérard Belhomme. Le deuxième disque aura en plus l’effet d’extirper et de souffler la terre." Le constructeur préconise de travailler majoritairement sans palpeur. Le couple d’effacement de l’intercep est alors à régler en fonction de la nature du sol, de la vitesse d’avancement, de la profondeur de travail et de la fragilité de la vigne. Selon Belhomme, travailler sans palpeur avec une pression adaptée permet d’aller au plus près des vignes sans les blesser. "Si les ceps ne sont pas droits, on tendra à augmenter la marge de sécurité et donc la distance entre le cep et l’outil, détaille Gérard Belhomme. En ôtant les palpeurs, ce sont les vignes elles-mêmes, au travers d’une couche de terre, qui assurent l’effacement de l’outil. Cela demande en revanche d’être pointu sur les réglages." Cela n’affecte en rien la vitesse d’avancement, les utilisateurs travaillant à 6-8 km/h étant courants.
D’autres disques crénelés sur le marché
Plusieurs autres constructeurs de matériels viticoles proposent des disques crénelés pour travailler aux abords du rang. La plupart sont fixes et opèrent à proximité du rang et non sur le rang. Afin de toucher au maximum la bande de terre sur le rang, il peut être nécessaire de travailler plus profond. On peut également rapprocher les disques le plus possible du rang, mais cela impose une conduite précise et donc une vitesse d’avancement plus faible. Dans la majorité des situations, ces disques sont davantage utilisés pour le buttage. Seul Boisselet propose un disque crénelé sur intercep double effet, exploitant le servo-moteur sur lequel on peut placer différents outils. À la différence du Speedway, le disque est orientable et inclinable. Le constructeur reste cependant prudent quant à la conduite sans palpeurs.