Tuberculose bovine : « Nous avons remonté un troupeau à haute valeur génétique après un abattage total »
Éric et Alexandre Hontang, dans les Landes, ont reconstitué un troupeau en race blonde d’Aquitaine à haute valeur génétique après l’abattage total de leur cheptel pour raisons sanitaires. Neuf mois plus tard, père et fils faisaient leur retour sur les concours.
Éric et Alexandre Hontang, dans les Landes, ont reconstitué un troupeau en race blonde d’Aquitaine à haute valeur génétique après l’abattage total de leur cheptel pour raisons sanitaires. Neuf mois plus tard, père et fils faisaient leur retour sur les concours.


Le couperet tombe le 1er octobre 2015 : un cas de tuberculose bovine détecté à l’abattoir contraint Alexandre et Éric Hontang, du Gaec Hontang (1), à Samadet dans les Landes, à l’abattage total de leur troupeau de 50 mères blondes d’Aquitaine inscrites. « C’était le jour de l’installation d’Alexandre sur l’exploitation », se souvient Éric Hontang. Un rayon de soleil dans les nuages, car les éleveurs ont pu mener, en parallèle de l’abattage, la construction d’un bâtiment accueillant 11 000 poules pondeuses reproductrices qui constituait le projet d’installation d’Alexandre. « C’était une échappatoire : cela nous a permis de penser à autre chose, et de nous tourner vers l’avenir », partage Éric Hontang.
Financièrement, les génisses jeunes représentent les plus grosses pertes. « À 1 an d’âge, elles n’étaient pas finies. Elles sont parties en dernières, pour pas très cher », se souvient l’éleveur. Heureusement pour les éleveurs, une nouvelle grille d’indemnisation leur permet d’être dédommagés à hauteur de la valeur génétique des animaux, et non seulement leur valeur bouchère (voir encadré).
Des IVMat toujours supérieurs à 100
« Aussitôt la fin de l’abattage, nous sommes repartis acheter des vaches. Pendant près de trois semaines, nous avons arpenté les fermes, allant jusqu’à la Bretagne », reprend l’éleveur. Pour cela, ils mobilisent l’ensemble de leur carnet d’adresses et leur expérience issue de plusieurs décennies de sélection en race blonde d’Aquitaine. Finalement, ils achètent surtout des animaux élevés dans leur secteur.
« Nous voulions remonter rapidement le troupeau. Nous avons donc choisi de jeunes vaches, suitées ou non, qui avaient eu un ou deux veaux, et des génisses pleines. » Le nouveau cheptel compte ainsi une cinquantaine de bêtes à l’aube de l’année 2016.
Malgré leur hâte, les éleveurs gardent une exigence forte quant à la qualité des index. « Nous sommes partis sur un éventail génétique assez large, mais toujours avec des IVMat supérieurs à 100 », souligne Éric Hontang. Puis, un coup de cœur pour le taureau Hilario marque un tournant. « Nous étions venus voir des vaches, mais quand nous avons vu un lot de veaux extraordinaires. Nous avons tout de suite décidé d’acheter le taureau, sans même le voir », relate l’éleveur. Sorti RRJ en station, doté d’un IVMat de 116, les éleveurs rebâtissent leur troupeau essentiellement sur cette souche. Dès 2016, un an après l’abattage de leur cheptel, le Gaec Hontang reprend les ventes de reproducteurs.

L’année 2016 marque également leur retour sur les concours, avec une vache en lice au national blond d’Aquitaine dès le mois de juillet. « Nous voulions que l’élevage soit représenté », affirme Éric Hontang. En 2018, ils foulent à nouveau le ring au concours général agricole de Paris, dans la section bouchère. Ils y amènent également une génisse bazadaise en présentation. « L’achat de deux génisses bazadaises, en 2016, était une manière de nous faire plaisir », sourit Éric Hontang. Aujourd’hui, l’exploitation possède un petit noyau avec quatre mères de cette race.
La production de viande devient l’activité principale
Les éleveurs transforment la reconstitution de leur troupeau en opportunité pour diversifier l’activité de l’exploitation. « Nous avons placé une partie du capital dans l’atelier volaille, plutôt que de tout réinvestir dans les bovins », souligne Éric Hontang. Outre les pondeuses, les éleveurs développent la production de viande bovine. « Le marché de la reproduction se transformait, il avait tendance à se nationaliser. Et puis l’ouverture d’un grossiste à proximité de l’abattoir local nous a décidés », justifie Éric Hontang.
Si l’exploitation continue de vendre des reproducteurs en station et en ferme tous les ans, ainsi que d’occasionnels embryons, cette activité devient secondaire à la production de viande. Les orientations génétiques reflètent ce choix. Les éleveurs privilégient des femelles au profil plus mixte, et davantage équilibrées entre développement squelettique et musculaire. « Nous avons une vision plus « bouchère ». Nos bêtes sont peut-être moins grandes, mais elles sont mieux faites en viande », décrit Éric Hontang. « Valoriser la viande nous permet d’être intransigeants sur les performances de reproduction : nous sommes plus durs, et passons plus facilement les vaches à l’engraissement quand elles reviennent en chaleur, par exemple. Cela nous permet d’avoir un troupeau jeune, doté de très bons résultats techniques. » En plus des vaches grasses, les éleveurs développent la production de veaux rosés.
Grâce à la proximité de l’abattage et de la découpe à façon ainsi qu’à la certification Label rouge, le Gaec Hontang trouve rapidement sa clientèle en circuits courts dans le giron de l’exploitation puis la métropole bordelaise. La demande est exponentielle. Aujourd’hui, les éleveurs valorisent une vache par semaine et un veau tous les dix jours dans le magasin de producteurs « Copains des champs » à Bordeaux. Leur viande y est bien valorisée : « Un bon veau de 6 mois, qui vaudrait environ 1 500 euros, est vendu un peu plus cher au magasin de producteurs », rapporte Éric Hontang. Les vaches, abattues autour de 600 kg de carcasse (U = 3) y sont également bien valorisées. Victimes de leur succès, la demande continuait de croître au-delà des capacités du Gaec. « Nous nous sommes regroupés avec trois autres éleveurs sélectionneurs pour fournir le magasin. Nous avons convenu d’un contrat moral pour travailler de la même manière, avec la même alimentation notamment, afin que la qualité de viande soit la plus homogène possible », raconte Éric Hontang.
Il y a deux ans, leur viande attire l’attention de Michel Guérard et de son restaurant aux trois étoiles Michelin, dont il devient le fournisseur exclusif, à hauteur de huit demi-carcasses de vache chaque année.
« L’adhésion à l’OS est mille fois remboursée quand il y a un pépin »
« Nous avons été les premiers à bénéficier de la nouvelle grille d’indemnisation, qui prend en compte la valeur génétique des animaux abattus », retrace Éric Hontang. L’indexation, les performances au concours, le statut Élite des bovins… tous ces éléments concourent à calculer la valeur des bovins et se traduisent par une plus-value qui s’ajoute, lors de l’expertise, à l’estimation de leur valeur « viande » (poids moyen d’abattage multiplié par la valeur de base de la grille d’indemnisation). Une fois la vente réalisée, l’État prend en charge le différentiel entre le prix payé à l’éleveur et la valeur globale établie par les experts. « La prise en compte de la génétique fait particulièrement la différence pour les génisses d’un an. Elles ont été estimées autour de 3 000 euros, là où leur valeur viande avoisinait seulement les 1 800 euros », illustre l’éleveur. Pour bénéficier de cette indemnisation sur la valeur génétique des animaux abattus, les éleveurs doivent être inscrits au contrôle de performance VA4 et être inscrits à l’organisme de sélection.
Les modalités d’indemnisation ont été revues depuis, mais prennent toujours en compte l’inscription des bovins au livre généalogique.