La production porcine française poursuit sa concentration
La production porcine se maintient en France, mais le nombre d’élevages a baissé de 12 % en huit ans. La baisse est particulièrement forte pour les sites de naissage. Cette évolution pose la question de l’approvisionnement en porcelets.
Un sur huit, c’est le nombre de sites porcins qui a disparu en France en six ans, selon les données BDporc. Entre 2014 et 2020, le nombre de sites sortant plus de 300 porcs (1) par an a diminué linéairement, passant de 10 794 à 9 492 (-12,1 %). Leur production annuelle moyenne a augmenté de 16,1 %, passant de 3 116 à 3 618 porcs sortis par site.
Cette concentration structurelle résulte de l’effet conjugué de la disparition des sites les plus petits et de l’augmentation de la production moyenne des sites restés en activité. Seuls les sites sortant plus de 5 000 porcs ont vu leur nombre augmenter (Fig.2). En 2020, ils représentent 20,1 % des sites contre 15,2 % en 2014 et produisent 44,2 % des porcs charcutiers du pays contre 35,3 % en 2014. Plus de 70 % de la baisse du nombre de sites est lié au recul du nombre de sites avec truies.
La concentration structurelle des sites avec truies est en effet trois fois plus rapide que celle des sites sans truies. En six ans, leur nombre a baissé de 18,2 % contre 6,4 % pour les sites sans truies. En 2020, 37 % des sites sont NE et produisent 58 % des porcs charcutiers ; 55 % sont engraisseurs, avec ou sans le post-sevrage, et produisent 42 % des porcs charcutiers.
Quatre types de trajectoires individuelles
La concentration structurelle résulte de quatre trajectoires d’élevage différentes.
Plus de 70 % des 11 485 sites français ayant chargé 300 porcs et plus au moins une année ont été actifs sur toute la période sans changer d’orientation. Leur production a augmenté de 1,14 million de porcelets (+11,7 %) et de 1,26 million de porcs charcutiers (+6,2 %) entre 2014 et 2020. Cette augmentation s’explique d’abord par les gains de prolificité des truies. D’après la GTE, la productivité des truies a augmenté de près de 10 % sur 2014-2020, passant de 22,5 à 24,7 porcs produits par truie présente et par an, avec une accélération ces dernières années, conséquence d’un changement d’objectifs de sélection à partir de 2014 et de la mise en place de la sélection génomique en 2016. Les autres facteurs d’augmentation de la production de ces sites sont divers : croissance du nombre de truies, rapatriement de truies ou de places d’engraissement sur un site en cas de multisites, arrêt de la multiplication (augmentation du chargement), regroupement de sites sous le même indicatif… Cette augmentation de la production par les sites restés actifs compense la perte de production résultant des arrêts d’activité sur la période.
14 % des sites ont cessé la production. Ils produisaient 1,6 million de porcs en 2014. La plupart des arrêts sont dus à un départ à la retraite ou 0 des problèmes financiers, mais aussi à la vétusté des bâtiments, au manque de temps ou de goût pour la production porcine, au choix de développer une autre production ou au transfert de la production sur un autre site.
3 % ont démarré une production. Ils ont produit 0,3 million de porcs en 2020. Ces démarrages sont souvent liés à des installations. Certains sont liés à l’activation d’un indicatif pour distinguer un site d’une exploitation multisite entré dans un cahier des charges ou vendu, ou à la suite d’un changement de structure juridique. Il s’agit parfois de la création d’un site en bio.
Les changements d’orientation sont peu fréquents. Ils concernent 8 % des sites, mais méritent attention. En effet, il s’agit à 70 % de naisseurs-engraisseurs qui ont arrêté le naissage pour devenir post-sevreurs-engraisseurs. Cette évolution soulève la question de l’approvisionnement en porcelets. La taille moyenne de ces naisseurs-engraisseurs qui arrêtent le naissage est à peu près stable sur la période, autour de 2 000-2 500 porcs produits, soit environ 80-100 truies présentes. Cette évolution correspond à un changement de détenteurs pour 45 % des sites en 2019 et 37 % en 2020. Elle fait souvent suite à leur rachat ou à la réorganisation des sites d’une exploitation multisite (truies sur un site principal et spécialisation des sites satellites en engraissement). De nombreuses autres raisons conduisent à l’arrêt du naissage : la volonté de lever le pied à l’approche de la retraite, en particulier en l’absence de repreneur, le manque de main-d’œuvre après le départ d’un salarié ou d’un associé, la volonté de simplifier le travail et de limiter l’astreinte, le manque de performances, le développement d’une activité de diversification ou d’une autre production animale… À l’inverse, le passage de naisseur à naisseur-engraisseur se justifie quant à lui par l’arrêt des contrats avec des engraisseurs ou des façonniers, une activité peu rentable conduisant l’éleveur à choisir d’engraisser lui-même ses porcs lorsque cela est possible.
(1) Dans cet article, porcs = porcelets + porcs charcutiers
Une étude complète sur l’évolution de la production porcine française
Financée par Inaporc, l’étude Teep (trajectoire d’évolution des élevages de porcs) a décrit comment s’opère, à une échelle individuelle, la concentration structurelle de la production porcine en France, et explicité les déterminants d’évolution et leurs effets.
La méthode comprend trois phases :
1- Analyse quantitative des dynamiques d’évolution à partir des données de BDporc.
2- Identification des déterminants d’évolution à partir d’entretiens avec les responsables techniques de huit groupements et 31 éleveurs dans trois zones contrastées de France (Ouest, Est, Sud-Ouest).
3- Identification des enjeux à venir à partir de focus groupes avec les acteurs de la filière porcine.
Pour l’analyse des trajectoires individuelles, l’étude porte sur les sites situés dans l’hexagone et sortant 300 porcs et plus au moins une année sur la période 2014 – 2020. Ils représentent 69,3 % de sites ayant sorti un porc en 2020 et 99,5 % des porcs charcutiers produits. Une suite envisagée à cette étude est de reconstituer les « unités fonctionnelles » de production (multisites, liens directs entre naisseurs et engraisseurs…) à partir de l’analyse des flux de porcs entre sites.