Des résultats prometteurs des truies en maternité alternative sur paille
Mises bas des truies en liberté, accès à l’extérieur, paille… Face à la diversité des attentes sociétales difficile de cocher toutes les cases ! Après plus d’une année de suivi, les premiers résultats obtenus dans la maternité Physior sont très prometteurs.
Mises bas des truies en liberté, accès à l’extérieur, paille… Face à la diversité des attentes sociétales difficile de cocher toutes les cases ! Après plus d’une année de suivi, les premiers résultats obtenus dans la maternité Physior sont très prometteurs.
Mises bas en liberté et distribution de paille sont réputées favorables au comportement de nidification, au bon déroulement de la mise bas, à la santé et au bien-être de la truie.
Les maternités en liberté seraient également bénéfiques aux relations mère-jeunes et à l’allaitement. Par contre, les risques de mortalité des porcelets sont en général augmentés, atteignant 25 à 30 % selon la taille de portée et le bâtiment. Une contention temporaire autour de la mise bas est donc souvent recommandée. Au vu de ces risques, le concept Physior choisi par l’EARL Maison Neuve à Plestan, dans les Côtes-d’Armor, qui se caractérise par une maternité paillée en liberté totale avec accès extérieur était très audacieux ! Pour préciser les points essentiels à la conduite de ce type de maternité innovante, la coopérative Le Gouessant et l’Ifip ont travaillé ensemble dans le cadre du projet EPP (élevage porc pilote). Un protocole de suivi détaillé a été mis en place et après plus d’une année de sevrages, les premiers résultats sont riches d’enseignements.
Une conduite bien spécifique
Le troupeau est conduit en sept bandes de 32 truies avec un sevrage à quatre semaines. L’entrée en maternité se fait au moins dix jours avant la mise bas, dans des cases lavées et paillées. Ce délai est essentiel pour que les truies apprennent à distinguer la zone extérieure de déjections et les zones intérieures de mise bas et d’alimentation. Le lundi de la semaine de mise bas, un apport de paille longue permet aux truies de nidifier. Les nids des porcelets sont garnis de paille hachée et leurs lampes allumées. Les truies mettent bas spontanément quand et où elles le souhaitent. Dérangements et traitements sont limités : très peu de fouilles, pas de castration, de meulage des dents ou de coupe des queues. Le jour de la naissance, les nouveau-nés reçoivent une injection de fer et sont régulièrement déplacés dans les nids. Les plus faibles reçoivent un supplément énergétique. Des adoptions sont réalisées si besoin pour ajuster les tailles de portées. Ces interventions se font dans le calme, car les truies sont très confiantes, mais parfois réactives.
La mortalité n’a pas explosé
En 2022, avec 15,9 porcelets nés totaux par portée et 15,3 nés vivants, le troupeau se situe dans la moyenne nationale. Les femelles encore jeunes (38 % de premières mises bas) sont prolifiques avec plus de 16,6 nés totaux en troisième portée. Sur l’ensemble de l’année, les truies ont sevré en moyenne 12,2 porcelets, et plus de 13 sur certaines bandes. La mortalité a donc été contenue avec peu de morts nés (3,8 %) et un taux de pertes totales de 23,2 % proche de celui des élevages conventionnels de même prolificité, voire inférieur à ceux publiés en liberté totale. Comme dans tous les élevages, la mortalité se produit majoritairement dans les 48 heures après naissance et par écrasement dans plus de 75 % des cas. Les premières analyses confirment des facteurs de risque bien connus non spécifiques à ce type d’élevage : grandes portées, faibles poids et/ou mauvaise prise colostrale.
Des actions pour réduire les écrasements
Par contre, avec un accès extérieur, une zone de naissance imprévisible et sans chauffage d’ambiance, le risque d’hypothermie à la naissance est réel. Les porcelets froids sont plus faibles. La prise colostrale est moins bonne et des risques d’écrasement sont accrus. Les mises bas à l’extérieur se produisent en moyenne dans 5 % des cas, toute l’année, avec des conséquences variables. Des thermogrammes réalisés à l’intérieur par l’Ifip à la caméra infrarouge ont montré que le confort de la zone de naissance et des nids pouvait être insuffisant pour les porcelets pendant les journées les plus froides. Une réflexion est donc engagée pour optimiser le paillage et le confort des cases et améliorer la fréquentation des nids chauffés.
Sylviane Boulot (Ifip) et Sophie Ambrois (Le Gouessant), Yvonnick Rousselière
Une case compartimentée en quatre parties
Le bloc maternité est composé de deux bâtiments de 32 cases Welcon (Schauer) de 14 m2 comprenant quatre parties chacune :
Un sens de circulation a été imaginé au sein de la case grâce à un jeu de portillons mobiles. Ainsi, la truie présente dans la zone intérieure de libre circulation doit sortir dans la courette extérieure pour pouvoir ensuite accéder à l’auge. Par la suite, elle aura le choix de retourner dans la courette en reculant, ou de retourner dans la zone intérieure en poussant un second portillon.
Un protocole de mesures pour comprendre et ajuster les pratiques
L’étude du fonctionnement global de l’élevage est soutenue par la Région Bretagne dans le cadre de l’appel à projet « croisement de filières ». Le suivi en maternité implique Le Gouessant et l’Ifip, mais aussi l’éleveur et ses salariés au quotidien. Le logiciel de GTTT est utilisé pour enregistrer des observations détaillées : âges, lieux et causes de mort des porcelets, lieux de mise bas, comportement, santé, traitements… Poids et épaisseurs de lard sont mesurés à la mise bas et au sevrage. Des cases sentinelles sont équipées de caméras pour observer le comportement des truies et la fréquentation des courettes extérieures. Des audits mortalité avec pesées et examen des porcelets morts sont réalisés. Différents outils sont utilisés pour mesurer le risque de stress thermique : capteurs de température, caméra infrarouge… Enfin des indicateurs de bien-être sont relevés dans chaque bande (propreté, comportement, santé…). Au début du projet, on manquait cruellement de résultats et de recommandations pour le pilotage de ce type de maternité. Même s’il faut approfondir les analyses, les premiers résultats sont cependant très encourageants.