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La conduite des brebis laitières en lots d’alimentation

Dans les Pyrénées-Atlantiques, la ferme du lycée d’Oloron a alimenté différemment les bonnes et les moins bonnes laitières. À la clé, des économies possibles sur les concentrés.

Durant la période de traite, les éleveurs ne différencient souvent l’alimentation des brebis qu’en suralimentant les jeunes femelles et les tardives. Mais pour le reste du troupeau, faut-il alloter les brebis en fonction de leur niveau de production obtenu lors des contrôles laitiers ? Pour quel gain ? Cette mise en lot permettra-t-elle de réduire les consommations de concentrés ? Surtout que les distributeurs automatiques de concentrés (DAC) permettent de créer des lots d’alimentation sans séparation physique des animaux.

Les essais menés à Oloron-Sainte-Marie dans les Pyrénées-Atlantiques, dans le cadre du programme Autelo, ont permis d’objectiver l’intérêt de ces mises en lot, mais aussi d’explorer les possibilités d’économie de concentrés et de fourrages achetés. Pour les éleveurs, trois stratégies sont possibles : redistributives lorsque la part des concentrés économisés sur les brebis les moins laitières est réaffectée aux plus laitières ; économe lorsqu’on réduit les apports aux moins bonnes laitières sans accroître les apports aux bonnes laitières ou sécurisée lorsqu’on augmente les apports aux plus laitières sans réduire les apports aux moins bonnes laitières. Enfin, on parle de gestion traditionnelle lorsque les animaux sont conduits en une seule troupe sans allotement.

Des économies en 2016, un surcoût en 2018

La ration de base des brebis basco-béarnaises de l’essai comprenait 3 kg de matière sèche d’aliments (3,5 kg en brut), soit 2,1 kg de foins (regain et luzerne espagnole), 100 à 200 g de pulpes déshydratées, et 600 à 700 g de concentrés. En 2016, les quantités de concentrés étaient en moyenne fixées à 600 g de MS, puis descendues à 300 g en février. On ne distribuait que 400 g à 500 g aux moins bonnes laitières (- 35 %), et 700 à 750 g aux plus laitières (+25 %).

L’ajout de 25 % de concentré aux bonnes laitières a permis d’accroître la production laitière de 16 % et la marge sur coût alimentaire de 16 %. Pour les moins bonnes laitières, la diminution du concentré de 35 % a entraîné une réduction de la production laitière et de la marge sur coût alimentaire de 6 %. Ces ajustements de concentrés provoquent une augmentation de consommation des fourrages (+ 15 %) pour les moins laitières, ou une diminution lorsqu’on augmente le concentré (- 2 %).

En 2018, la diminution de concentré de 15 % aux faibles productrices a entraîné une perte de lait de 7 % (et de marge équivalente), et l’apport supplémentaire de 15 % chez les bonnes laitières n’a pas eu d’impact sur la production laitière, ni sur la marge.

Si on raisonne sur l’ensemble du troupeau, en 2016, la redistribution a bien permis de réduire la quantité de concentré distribué (-5 %) en augmentant la production laitière (+ 5 %) et la marge sur coût alimentaire (+ 6 %). À l’inverse, en 2018, la redistribution entre lots, avec des quantités de concentré équivalentes, a entraîné une perte de production de 4 % et une baisse de la marge (4 %). Ces résultats variables incitent à rester prudent et à relativiser l’intérêt d’une mise en lot sur le troupeau adulte présent à la traite en début de campagne.

Plus cher, le foin de luzerne permet une meilleure production

En 2017, la part de foin de regain et foin de luzerne a été modifiée. Un lot « luzerne » consommait, en brut, 1,4 kg de luzerne et 1,2 kg de regain alors qu’un lot « regain » avait 1 kg de luzerne et 1,6 kg de regain, avec des compléments de concentré ajustés aux niveaux laitiers.

Dans les lots des bonnes laitières, les productions laitières ont été équivalentes dans les lots « luzerne » et « regain », ce qui entraîne une meilleure marge (+7 %) dans le lot regain. Mais dans les lots des faibles productrices, la production laitière a été nettement améliorée avec la luzerne (+10 %) d’où une marge améliorée (+10 %). Sur l’ensemble du troupeau, le résultat économique n’a pas été amélioré, le gain de production laitière (+4 %) étant absorbé par le surcoût alimentaire lié à la luzerne (+6 %).

Surveiller la note d’état corporel

Dans les conditions de l’essai, la constitution de deux lots à partir des brebis précoces n’a pas permis d’améliorer la production laitière et la marge sur coût alimentaire, mais on a observé dans tous les essais un effet négatif de la réduction du concentré sur les mauvaises laitières. Néanmoins, il reste indispensable d’alloter et de sur-alimenter les jeunes en première lactation et les tardives.

Les essais ont été réalisés dans des conditions de suivi strict des états corporels des brebis. Dès lors que certaines brebis engraissent trop vite, il faut pouvoir corriger les apports de concentrés (énergie) en les réduisant. Ce contrôle des états d’engraissement et l’homogénéisation des notes d’état corporel du troupeau trouvent aussi un intérêt pour la préparation à la lutte si l’on souhaite mener un flushing (stimulation énergétique) qui va favoriser les venues en lutte au printemps. Cette maîtrise de l’engraissement est très importante, que l’on raisonne monte naturelle ou IA pour ceux qui y ont recours.

Du mélange orge maïs plutôt que le maïs seul

Traditionnellement, le concentré énergétique était apporté sous forme exclusive de maïs. En 2018, un lot a reçu une ration complémentée avec 300 g de maïs et 200 g d’orge, en comparaison à un lot recevant 500 g de maïs. Avec le mélange orge + maïs, la production laitière a été améliorée de 5 % et la marge de 6 %, avec une consommation de fourrage légèrement inférieure, et une moins bonne composition du lait (-1,3 g/l pour le TB, -0,3 g/l pour le TP). Ce mélange, associant des formes d’énergie rapide (orge ou triticale) et plus lente (maïs) reste intéressant au plan nutritionnel, surtout si le différentiel de prix est faible.

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