Dans le Gard, les brebis fertilisent les vignes
La cave coopérative des Vignerons créateurs, dans le Gard, raisonne les plans de fertilisation des vignes. Le pâturage des brebis apparaît comme une solution intéressante.
Vignes, verger, maraîchage. Autant de productions agricoles demandeuses en eau et consommatrices de produits phytosanitaires. « Les nappes phréatiques du Gard sont polluées par les fertilisants de toutes ces cultures », présente Clémence Grevat, responsable qualité et RSE à la cave coopérative des Vignerons créateurs.
Avec quatre sites de production et une centaine de vignerons coopérateurs possédant près de 1 300 hectares de vignes dans les alentours de Nîmes, la cave coopérative prête une attention grandissante à l’environnement, à travers les labels HVE (haute valeur environnementale), Terra Vitis et le bio. La cave et ses coopérateurs ont entrepris en 2023 une réflexion autour de la réduction de l’utilisation des nitrates dans les vignes. « Trois axes ont été étudiés : les couverts végétaux des interrangs, un itinéraire technique de fertilisation raisonnée et le vitipastoralisme », énumère la jeune femme, passionnée par le sujet.
Dix vignerons découvrent les moutons
Ce projet de vitipastoralisme est réfléchi avec la chambre d’agriculture du Gard, afin d’effectuer un suivi de ces pratiques. Quels sont les effets fertilisants de l’apport de matières organiques dû au passage des brebis ? Le piétinement est-il significatif ? Comment s’articule le travail dans les vignes avec la présence du troupeau ? Autant de questions que les dix vignerons qui se sont lancés se posent.
Deux approches, selon la volonté du vigneron, sont recensées. Soit les brebis pâturent l’enherbement spontané des interrangs, la qualité fourragère est alors inégale mais cela ne demande pas de travail supplémentaire au vigneron et ce type de végétation peut suffire pour des brebis à l’entretien. L’autre pratique est d’effectuer un semis d’espèces intéressantes pour l’élevage et pour le sol. « On va essayer la vesce ou la féverole. Mais on compte au moins 70 % de légumineuses pour l’apport que celles-ci font en azote dans le sol », reprend Clémence Grevat. D’autres ont semé de l’orge, pour son étalement au sol, le protégeant ainsi.
Ne plus lutter contre la pousse de l’herbe
Bruno Manzone revient sur son expérience. « J’ai commencé il y a deux ans, en travaillant avec un éleveur qui se trouve à deux kilomètres de mes vignes. Je fais pâturer la quasi-totalité de mes trente hectares, qui sont en bio. » Le président des Vignerons Créateurs apprécie le passage des brebis, cela lui permet de retarder sa première intervention de l’année dans les vignes. « Avant, je luttais contre la pousse de l’herbe en automne, maintenant je laisse faire, sachant que les moutons mangeront tout. »Il affirme ne pas être gêné par leur présence. « L’éleveur pose des clôtures pour des îlots de trois à quatre hectares, les 300 brebis suitées restent en moyenne trois jours puis changent d’emplacement. C’est un pâturage dynamique. » Le vigneron souhaiterait que la pratique se généralise, elle est déjà en application sur près de 300 ha, soit un quart des surfaces de la coopérative. « Le problème, c’est la disponibilité des troupeaux, les éleveurs sont déjà dépassés par le nombre de demandes. »
Qui veut mon herbe ?
La chambre d’agriculture du Gard a développé un outil de mise en relations entre éleveurs ovins et vignerons, arboriculteurs ou céréaliers ayant des parcelles enherbées. « Qui veut mon herbe ? » permet de diffuser rapidement et largement des propositions d’écopâturage, avec pour objectifs de protéger les captages d’eau. Deux répertoires, l’un pastoral, l’autre fourrager, recensent les éleveurs ovins, leurs besoins en surface et en type de parcelles, la disponibilité de leur troupeau tout au long de l’année et les propriétaires de parcelles enherbées sur une carte, avec leurs coordonnées, leurs surfaces, la disponibilité en fourrages, etc.À partir des retours d’expériences des utilisateurs, la chambre d’agriculture du Gard a produit un petit guide technique sur les bonnes pratiques en écopâturage.