[Marchés] Le blé tendre résiste face au Covid-19, mais jusqu'à quand ?
Au début de la crise, les cours du blé étaient encore portés par les achats des pays importateurs et le temps sec en mer Noire. Mais le coronavirus pourrait affaiblir la demande européenne et mondiale.
Au début de la crise, les cours du blé étaient encore portés par les achats des pays importateurs et le temps sec en mer Noire. Mais le coronavirus pourrait affaiblir la demande européenne et mondiale.
Un trou d’air vite surmonté. Le prix du blé tendre a dévissé en février à la suite du pétrole, atteignant 170 euros/tonne à Rouen le 16 mars. Un rebond lui permettait alors de repasser au-dessus des 190 euros/tonne dès la semaine suivante. La crise du Covid-19 serait-elle positive pour la céréale ? Pas si simple. Les pays importateurs ont été très actifs aux achats ce printemps afin de sécuriser leurs stocks, à l’instar de l’Afrique du Nord (menacée de surcroît de piètres récoltes). Ces importations qui se poursuivent plus tard que d'habitude, notamment au Maroc et en Egypte, peuvent en partie être mises sur le compte de craintes liées au coronavirus. Cela devrait d’ailleurs conduire la France à un nouveau sommet pour les exportations vers pays tiers, prévues à plus de 13 millions de tonnes (Mt).
« Nous assistons à des appels d'offres supplémentaires par rapport à ce qui était attendu, notamment de la part de l'Egypte », soulignait le 15 avril Marc Zribi, chef de l'unité grains et sucre de FranceAgriMer. De quoi soutenir les prix, même si la fermeté est aussi alimentée par des stocks attendus bas chez les grands exportateurs et à la sécheresse qui menace les rendements de la mer Noire et d'une partie de l'Europe.
La demande humaine et animale en risque
Les effets du coronavirus sont toutefois incertains pour les mois à venir. En maintenant les cours du pétrole (et donc de l’éthanol) extrêmement bas, la crise exerce une forte pression sur le maïs. Or, celui-ci est un concurrent direct du blé dans l’alimentation animale. Le taux d’incorporation du blé dans les rations va donc fléchir si sa prime face au maïs demeure élevée. En outre, la consommation de viande pourrait pâtir du Covid-19, à l’unisson avec le pouvoir d’achat, ce qui se répercutera sur les besoins en céréales des animaux. En Europe, même la consommation humaine devrait accuser le coup.
En France, on constate certes une explosion des ventes de farine en sachets provoquée par le confinement. Ce créneau de niche est toutefois loin de compenser l’effondrement de la boulangerie, qui pèse près de deux tiers des débouchés de la farine tricolore. La baisse d’activité en mars est estimée entre 40 et 60 % pour la boulangerie artisanale, la boulangerie industrielle étant encore plus touchée. Dans son bilan publié en avril, FranceAgriMer a ainsi revu en baisse de 200 000 tonnes la prévision de consommation de blé par la meunerie française, à 3,7 Mt. Un phénomène qui pourrait s’appliquer à toute l’Europe, dans des proportions variables, et qui s’ajoute à la minoration de l’utilisation de blé pour l’éthanol.
Dans les prochains mois, le coronavirus risque donc d’exercer une influence baissière sur le blé, quoique moindre qu’en maïs. Et il ne faut pas oublier l’influence de la météo. Elle peut déjouer les pronostics concernant l’offre mondiale, encore annoncée à un niveau élevé. Les grains ne sont pas encore dans les bennes.
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