Un Bisynchrospire pour fatiguer l’enherbement
Ce vigneron du Sancerrois est parti d’un double rouleau spire de grandes cultures pour concevoir un outil pour fatiguer l’enherbement : une alternative aux rolofacas.
Ce vigneron du Sancerrois est parti d’un double rouleau spire de grandes cultures pour concevoir un outil pour fatiguer l’enherbement : une alternative aux rolofacas.
"Je cherchais un outil pour fatiguer mon enherbement plutôt que de le faucher : le Synchrospire semble répondre à mes attentes ", explique Pascal Balland, à la tête d’une exploitation de 9 hectares en appellation Sancerre, à Bué, dans le Cher. Avec 25 % de son parcellaire en coteaux, Pascal Balland s’évertue depuis des années à maintenir un enherbement naturel sur une bande de 15-20 cm de large au milieu de l’interrang. Cet enherbement assure le maintien du sol et lutte contre l’érosion et le ravinement. " Pour freiner la végétation, je profitais du gel hivernal et/ou de la neige", explique le vigneron. Certaines essences sensibles sont freinées voire éliminées lorsque les conditions sont rudes. " Mais ces conditions se font de plus en plus rares", regrette Pascal Balland.
La tondeuse a ses limites
Le vigneron emploie notamment la tondeuse pour limiter le développement de l’enherbement naturel. Avec les limites propres à l’outil. D’une part, certaines espèces à développement horizontal, comme la ravenelle, sont peu ou pas touchées par la tondeuse et donc continuent à faire concurrence à la vigne. En outre, d’autres essences une fois tondues s’étalent. "D’autre part, tondre, c’est faire pousser, estime Pascal Balland. Plus on fauche, plus l’enherbement pousse et concurrence la vigne pour la ressource en eau." Plutôt que faucher, le vigneron préfère fatiguer l’enherbement sur place. Dans un premier temps, il se fabrique un rolofaca maison. Les versions du marché sont en effet de trop grand diamètre pour pouvoir être positionnées entre les roues, tout en laissant suffisamment de dégagement pour passer les reliefs très inégaux en bout de rang. Mais Pascal Balland n’est pas satisfait du résultat : "si le couvert n’est pas haut, cela ne sert à rien", regrette-t-il.
S’inspirer des outils de grandes cultures
Face à l’absence de solutions dans le monde du machinisme viticole, le vigneron écume les sites de vente de matériels de grandes cultures d’occasion. Sur ces derniers, il découvre le Bisynchrospire, un outil de préparation du sol combinant plusieurs rangées de dents vibrantes droites et un double rouleau spire. C’est ce dernier qui intrigue le vigneron. " Sur toute la largeur de l’outil, il n’y a qu’une partie minime des spires en contact avec le sol. Parfait pour provoquer un appui franc sur la végétation dans mes sols irréguliers, estime-t-il. Après avoir pris contact avec Franquet, le constructeur du rouleau, il prend réception d’un élément de 50 cm de large, " qui correspond à un des deux éléments repliables sur un outil de 4 mètres ". Fixé entre les roues droites du tracteur, l’outil est d’abord installé de manière rigide, ce qui ne se montre pas très efficient. Puis il est monté de manière semi-libre, relié à l’avant à deux bielles à longueur réglable et par une chaîne à l’arrière.
L’outil devient animé
Testant la solution lors d’un premier essai en juin 2017, le suivi du sol et donc la qualité d’appui s’en trouvent améliorés, mais ce n’est pas encore suffisant aux yeux de Pascal Balland. Sur la moitié de la largeur, les spires sont dessoudées puis ressoudées en position inversée, pour obtenir un outil symétrique et stable. Aidé d’un mécanicien du coin et recyclant un moteur hydraulique, des pignons et une chaîne, le vigneron anime les deux rouleaux spires. Le nouveau montage est testé dans une parcelle récoltée à la main, juste avant la vendange en lieu et place de la tondeuse. " Je suis proche du but, estime Pascal Balland. L’entraînement hydraulique permet de tourner les spires plus ou moins vite par rapport à la vitesse d’avancement du tracteur, selon le sol, l’état et l’orientation de la végétation. De loin, l’effet visuel n’est pas flagrant mais quand on regarde de près, la végétation est réellement impactée. Avoir une vitesse de rouleaux différente de celle de l’avancement me permet de générer un effet de cisaillement sur la végétation et améliore encore le suivi du sol. J’obtiens le même effet que trois ou quatre passages de roues de tracteur, tout en limitant les effets néfastes de tassement."
Un prototype sur le point d’entre abouti
Le vigneron entend confirmer le prototype cette saison, peut-être en le lestant davantage pour marquer un peu plus, avant de s’équiper d’un second pour installer entre les roues gauches pour gagner encore en débit de chantier. " Après les pluies, on va plus vite dans la parcelle qu’avec une tondeuse. Les vitesses d’avancement sont plus élevées et cela ne demande pas de puissance, continue d’argumenter Pascal Balland. Et j’ai encore suffisamment de place entre les roues pour combiner cet outil à des outils de travail sur le rang comme les roues Kress."
Ludovic Vimond
Plusieurs types de spires sur le marché
Les rouleaux spires sont assez communs sur les outils de travail du sol en grandes cultures. Lorsqu’ils sont doubles et entrechassés, ils se débourrent naturellement en conditions collantes. Selon les marques, on trouve différents profils de section de spire. Les spires conçues sur la base de tiges rondes ont un impact plus doux que celles à section en V (sur la base d’une cornière), en T ou en I (sur la base d’un fer plat), comme dans le cas du Bisynchrospire de Franquet.