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« J’épands des kilos d’azote et non plus des mètres cubes de lisier, grâce au capteur »

Éleveur dans le Finistère, Mathieu Guillerm a équipé sa tonne d’un conductimètre analysant la valeur fertilisante du lisier lors de chaque voyage. Les mesures montrant de fortes variations lui permettent d’affiner les apports sur ses cultures.

« J’ai mesuré la teneur en azote, phosphore et potassium de chaque tonne à lisier épandue depuis août dernier, se félicite Mathieu Guillerm, éleveur de porcs à Kergloff dans le Finistère. Le premier bilan est déjà très concluant, car la variabilité de valeur fertilisante du lisier m’a conduit à corriger les doses épandues. Je me suis aussi rendu compte que, sans analyse et en me basant que sur des références théoriques, je surestimais de près de 25 % la valeur, au risque de voir apparaître des carences sur les cultures. » Sa tonne de 15 000 litres datant de 2006 a été équipée d’un capteur de conductivité mesurant les teneurs en azote total, phosphore et potassium du lisier. Mathieu Guillerm épand environ 3 000 mètres cubes par an de lisier de porc issu de son élevage, mais également 3 000 à 4 000 mètres cubes de lisier de bovins en prestation pour deux fermes voisines. « Cet équipement baptisé Ana’Lisier, qui m’a été proposé par mon fournisseur en solutions d’agriculture de précision Vantage AM, a l’avantage de s’installer très facilement, sur n’importe quelle tonne. Et contrairement à un capteur NIR, il est abordable pour un usage individuel : cette version de présérie m’a coûté environ 3 000 euros », argumente l’éleveur.

Une sonde adaptable sur toutes les tonnes

Développé par le spécialiste espagnol Agro Intelligent, le capteur de conductivité se matérialise par une sonde de 25 centimètres de long, qui vient s’insérer dans un orifice de la tonne à lisier. Celle-ci est reliée à un boîtier fixé à l’avant de la citerne, qui communique en Bluetooth avec une tablette tactile installée en cabine. « Vantage AM a développé une application mobile spécifique qui vient d’ailleurs d’être mise à jour. » Une fois le remplissage réalisé, l’analyse s’effectue durant le trajet vers la parcelle. « Il suffit d’indiquer quel type d’effluent on va épandre avant de lancer les mesures. Arrivé au champ, le système nous indique la teneur en N, P et K du lisier. Après avoir renseigné la dose d’azote par hectare que l’on souhaite épandre, l’Ana’Lisier calcule la vitesse d’avancement à respecter pour l’atteindre. J’épands désormais des kilos d’azote et non plus des mètres cubes de lisier », apprécie Mathieu Guillerm. À la suite de la dernière mise à jour de l’application, il pourra désormais indiquer le nom du champ et un commentaire pour chaque tonne analysée, de façon à répertorier les unités fertilisantes épandues dans chaque parcelle, les informations étant exportables via un fichier Excel.

Des écarts de 1 à 4 suivant le type de lisier

Les résultats des analyses réalisées cet automne ont montré une grande variabilité de richesse en fonction des types de lisier épandus. « En porc, le lisier de truie peut afficher un NPK de 1-2-1,5, alors qu’il peut atteindre 3-1,5-3 pour les animaux à l’engraissement et même 4-2-4 pour le post-sevrage. » Quant au lisier de bovins, « j’ai pu observer des écarts de 1 à 4 en azote entre le début et la fin d’une fosse, en fonction du brassage effectué », garantit l’éleveur, qui peut désormais ajuster la fertilisation de ses cultures au plus juste. « À quoi ça sert de faire des analyses de sol et de la cartographie pour évaluer précisément la fertilisation minérale, si à la base, on ne connaît pas la valeur fertilisante du lisier », conclut-il.

Chiffres clés

120 truies (naisseur, engraisseur)

165 ha de cultures (blé, orge, maïs, colza)

6 000 à 7 000 m3 de lisier épandus par an dont 3 000 à 4 000 m3 de lisier de bovins en prestation

4 000 € HT : tarif actuel du capteur de lisier comprenant le montage et la tablette

Un enfouisseur pour mieux valoriser le lisier

Mathieu Guillerm utilise un enfouisseur à dents depuis 2011 pour épandre le lisier avant l’implantation des cultures de printemps et du colza. « Cet équipement impose un tracteur plus puissant et limite le débit de chantier, mais il est indispensable pour mettre à profit la valeur fertilisante du lisier. » Lors de ses épandages sur céréales et colza, il utilise une rampe à 10 buses travaillant sur 12 m de large, qu’il envisage de remplacer par une rampe à pendillards, afin de gagner en précision et de respecter la future interdiction des buses d’épandage. « Mais cela ne concerne que 1 200 m3 par an et compte tenu de la flambée des prix du matériel ces dernières années, l’investissement risque de ne pas être rentable. Il sera peut-être préférable de faire appel à une ETA pour ces interventions sur cultures en place. Dans l’absolu, je préférerais continuer à utiliser mon propre équipement, de façon à profiter au mieux des courtes fenêtres météo et d’éviter le passage de lourds ensembles néfastes pour le tassement des sols. »

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