Hydromulching : enherber le cavaillon de la vigne à l’eau
Plus couramment employé dans les espaces verts pour revégétaliser des surfaces plus ou moins faciles d’accès, l’hydromulching fait ses premiers pas en viticulture, notamment pour végétaliser le dessous du rang.
Plus couramment employé dans les espaces verts pour revégétaliser des surfaces plus ou moins faciles d’accès, l’hydromulching fait ses premiers pas en viticulture, notamment pour végétaliser le dessous du rang.
Hydroseeding ou hydromulching. Les deux termes sont aujourd’hui utilisés pour désigner le même procédé. « Inventé dans les années cinquante, l’hydroseeding consiste à projeter sur une surface généralement nue un mélange d’eau et de semences pour la végétaliser, précise Christophe Lignier, directeur général d’Euro-Tec, fournisseur de solutions de végétalisation par projection. Plus récemment est arrivé l’hydromulching, qui inclue en plus une matrice, qu’on appelle un mulch, composé d’un mélange de fibres de bois, de liant, d’activateur. » Cette matrice a pour effet d’améliorer les conditions de germination. Le liant limite les effets de lessivage que pourrait occasionner une grosse pluie. La cellulose contenue dans les fibres de bois favorise la capillarité et donc les chances de germination.
La mise en œuvre est réalisée à l’aide d’un appareil composé d’une cuve dans laquelle sont mélangés l’eau, la semence et le mulch. Un système d’agitation maintient les différents composants en suspension, afin d’avoir un produit homogène et d’éviter la ségrégation des différentes espèces de semence. Animée par un moteur thermique, une pompe sert aussi bien à l’agitation qu’à l’expulsion vers le tuyau et la lance d’application.
Si dans le milieu des espaces verts, l’application est encore très souvent réalisée à la main, un opérateur dirigeant la lance, certains viticulteurs et prestataires viticoles cherchent à pouvoir piloter l’ouverture et la fermeture à distance. « L’un de nos clients a installé deux sorties à l’avant de son tracteur, qu’il ouvre et ferme depuis la cabine de son tracteur », confie Fabrice Chiavaro, gérant d’Urbavert, une autre société spécialisée dans les solutions de végétalisation par projection. « Dans le Bordelais, un vigneron a monté le système sur un enjambeur et travaille un rang complet », explique Christophe Lignier.
Une préparation plus longue que l’application
L’application est réalisée à une vitesse de 4 à 5 km/h. « Avec une cuve de 1 200 litres, vous avez une autonomie d’environ 10 minutes, poursuit Christophe Lignier. Il faut compter 4 litres d’eau au mètre carré. Le plus long reste la préparation. Pour cette même cuve, il faut compter 20 minutes de préparation à condition d’avoir l’eau à proximité. » Le temps est sensiblement identique que le mulch soit conditionné en bottes ou en granulés.
Maîtriser les espèces que l’on fait pousser
Exemption faite de la semence, dont la densité est comparable à du semis conventionnel, le coût se décompose en trois principaux axes : le matériel, la main-d’œuvre, ainsi que la matrice. Pour ce qui est de la main-d’œuvre, le prix varie selon que l’application est réalisée à la main ou pilotée depuis la cabine, ainsi que de l’accès à l’eau à proximité, qui va déterminer le débit de chantier. Selon les sociétés et le volume appliqué, le prix du mulch varie entre 0,3 et 1 euro par mètre carré. Quant au prix du matériel, Urbavert commercialise sa solution à partir de 12 000 euros avec une cuve de 700 litres. Euro-Tec vend son plus petit modèle de la marque Finn, doté d’une réserve de 1 200 litres, au prix de 22 000 euros, avec le pilotage depuis la cabine.
Plutôt que d’acheter, il est également possible de louer le matériel, auprès de tout un réseau espace vert pour les deux marques. « Il faut compter autour de 500 euros la journée, selon la configuration », précise Christophe Lignier. « L’intérêt de la location est de se faire son propre avis sur la technique, d’en évaluer les coûts en fonction de sa situation personnelle, estime Fabrice Chiavaro. Quoi qu’il en soit, vu l’intérêt soudain du monde viticole, nous réfléchissons sérieusement à une gamme de matériels adaptés aux vignes. »
SARL Banton Lauret
Une implantation de l’herbement facile
Prestataire dans la région bordelaise, la SARL Banton Lauret teste, dans le cadre d’un projet régional, la solution d’hydromulching avec du matériel Finn installé sur un porteur multifonction Pellenc. Chapeautés par Pierre Dufaure, ces essais visent à remplacer le désherbage chimique par un enherbement permanent rasant. « Nous sommes partis sur des trèfles nains et souterrains, confie Frédéric Désessard, responsable des travaux mécaniques à la SARL Banton Lauret. Or, ces espèces doivent être implantées à 4-5 cm de profondeur, un passage de rouleau de rappui étant nécessaire à la suite du semis pour favoriser la germination. Sous le rang, c’est inenvisageable. Avec l’hydromulching, l’application est beaucoup plus simple et le mélange qui accompagne la semence dispense d’enfouir cette dernière et de la rouler. »
Les seules contraintes consistent en l’arrêt du désherbage chimique au moins un an avant et un éventuel passage de lames pour ne pas avoir de concurrence avec des herbes déjà en place. Les résultats d’essai sont variables, ce qui permet d’affiner la méthodologie : les meilleurs résutats ont été obtenus avec des semis entre mi-août et mi-septembre. Quant au coût, il s’évalue à environ 2 500 euros à l’hectare, dans des vignes à deux mètres d’interrang, à mettre en perspective avec la suppression des produits phytosanitaires et du travail mécanique sous le rang. Le prix varie bien sûr en fonction de l’interrang. « Comme le trèfle est implanté pour au moins trois ou quatre ans, même en comptant les passages de tondeuse, le retour sur investissement est certain », conclut Frédéric Désessard.