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Les pois jaunes : une culture exigeante mais rentable

Pour accompagner le succès des protéines végétales, la production de pois à grains jaune progresse rapidement. Avec d’excellents arguments : l’agronomie et le prix.

La couleur des grains, l'absence de grains cassés et la pureté des lots caractérisent la qualité des pois jaunes
© ©Roquette Frères - 2020

Des pois protéagineux pour sécuriser le résultat : c’est une blague ? Pas du tout. Dans les Hauts-de-France, une filière de pois protéagineux grandit rapidement depuis 2017, sous l’impulsion de Roquette, fer de lance de l’amidonnerie et désormais des protéines végétales.

Depuis 2017, l’industriel développe une unité de production unique en Europe, sur son site de Vic-Sur-Aisne dans l’Aisne. Pour alimenter les besoins croissants de cette usine, l’entreprise multiplie les contrats. Plus de 2000 producteurs composeraient déjà la filière.

Vincent Cornet est l’un d’entre eux. Agriculteur à Domeliers, dans l’Oise, il s’est lancé au printemps dernier dans la production de pois jaune sur une parcelle de dix hectares. « Je connais les atouts agronomiques du pois protéagineux. Ce qui me freinait, c’était son prix. C’est trop mal payé. J’ai continué à chercher des cultures pour allonger mes rotations alors, quand mon technicien Natup m’a proposé un contrat pois jaune, j’ai vite été séduit, explique l’agriculteur. Avec cette formule, on est payé autour de 250 euros la tonne et ça change tout. »

Une prime de 30 euros par tonne

Natup propose cette culture depuis 2019 via des contrats Cap Duo, qui encadrent la production. « Nous accompagnons cette filière tranquillement mais avec attention », confirme Thibault Lamiche, responsable des filières du groupe coopératif. Au sein de la filière, chacun veille à ne pas déséquilibrer le marché pour ne pas subir le sort de la lentille et des prix en dents de scie.

La coopérative a mobilisé ses différents services pour mettre sur pied un itinéraire technique, définir des zones de production, sélectionner des silos et élaborer une offre commerciale. Les producteurs ont répondu présents. En 2020, Natup a collecté 2 500 tonnes de pois jaunes sur 780 hectares, et vise 850 ha en 2021.

Les producteurs se voient proposer un prix moyen optimisé, majoré d’une prime de 30 euros par tonne, subordonné au respect d’un cahier des charges. Ce bonus se justifie : du fait de sa destination, le pois jaune requiert des exigences de production et de récolte beaucoup plus strictes qu’un pois classique. Des contraintes qui ne rebutent pas les producteurs. « C’est réalisable mais il ne faut pas louper le désherbage pour que les pois soient propres à la récolte », souligne Vincent Cornet.

Afin de sécuriser la production, de garantir la qualité des lots et d’éviter les mélanges de grains, la récolte est elle aussi encadrée. « Les pois jaunes doivent être récoltés en premier pour éviter des contaminations et livrés aussitôt. Mais cela ne me pose pas de souci : le dépôt Natup est à 4 kilomètres de la ferme », témoigne l’agriculteur. Son dépôt habituel est l’un des quatre seuls silos de livraison identifiés.

Seuls les producteurs présents dans ces secteurs peuvent souscrire les contrats, en s’engageant à livrer 100 % de leur production à la récolte. Le stockage en cellules à la coopérative assure la pureté des lots et permet de conserver la coloration du grain. À la lumière, celle-ci peut s’altérer.

Pour limiter les contaminations croisées, la sole des producteurs est examinée de près : pas question par exemple de « polluer » un lot de pois avec du soja, raison pour laquelle un producteur de soja ne pourra pas souscrire un contrat pois jaune. Mais les producteurs jouent le jeu : satisfaire à ces exigences ramène de la valeur ajoutée sur l’exploitation.

"Nous participons à une filière locale"

Vincent Cornet salue d’ailleurs une filière qui lui permet de diversifier les risques. « Avec ce type de petites filières, nous sommes moins dépendants des cours mondiaux. En plus, nous participons à une production locale et j’en suis fier. » Pour l’agriculteur, l’introduction de cette culture de printemps dans la rotation n’est pas qu’un raisonnement économique et agronomique : elle permet aussi d’échelonner les pics de travail, notamment la période des semis. « Cet automne, nous avons semé 160 hectares de blé, explique Vincent Cornet. Augmenter la part de culture de printemps allège le travail à l’automne. » *

Dernier avantage : les fanes de pois sont d’excellents fourrages pour les ruminants. Et si Vincent Cornet produit des céréales, il est aussi éleveur de bovins : toute la récolte est pressée et les fanes seront autoconsommées par ses vaches laitières. Autant de points positifs qui incitent à continuer l’expérience. « En 2020, j’ai récolté 48 quintaux par hectare ; alors oui, l’année prochaine, je recommence. » L’agriculteur doublera même sa sole en 2021 : il cultivera 20 hectares de pois jaune.

 

Un cahier des charges strict pour garantir la qualité

Les pois jaunes composent la gamme Nutralys de Roquette, qui compose des centaines de produits, comme des burgers végétaux ou des boissons énergisantes. Il faut dire que le pois jaune aligne les atouts : contrairement au gluten ou au soja, il ne provoque aucune allergie et ne contient pas d’OGM.

La génération des millenials exige des produits alimentaires qui améliorent à la fois leur santé et celle de notre planète : Les pois jaunes répondent à leurs attentes. Le segment fait face à une forte demande se traduisant par une croissance à deux chiffres.

Pour convaincre les agriculteurs de produire cette culture pleine d’atouts nutritifs, Roquette communique largement sur le bénéfice agronomique important de cette culture de printemps, qui ne reçoit pas d’apport d’azote et peu de phytos, permet de contenir les graminées résistantes et constitue une excellente tête de rotation.

L’entreprise organise également un partage de la valeur. « Nous souhaitons une filière pois solide permettant de garantir un approvisionnement adéquat en termes de qualité et de quantité », appuie Fabienne Pointier, ingénieure agronome chez Roquette. Des coopératives comme Noriap, Cérésia ou Natup ont répondu aux demandes de l’industriel.

Pour que la culture prenne dans la plaine, il faut y mettre le prix. « Si la culture n’est pas économiquement intéressante pour l’agriculteur, ça ne marche pas », confirme Thibault Lamiche, chez Natup.

La rémunération proposée n’est pas artificielle : le pois jaune n’est pas tout à fait un pois comme les autres, du fait de sa destination : il répond à des exigences de production beaucoup plus strictes, impose une traçabilité totale et les producteurs doivent composer avec un arsenal phytosanitaire restreint. « Nous nous engageons sur un cahier des charges qui exclut un certain nombre de produits phytosanitaires comme le Karaté K et l’itinéraire technique est vérifié avant la récolte », indique Thibault Lamiche.

Au premier rang des critères de qualité : la couleur des grains, le pourcentage de grains cassés et la pureté des lots. Autant de facteurs qui imposent une organisation spécifique à la coopérative pour éviter les mélanges de grains et sécuriser ces critères.

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