Aller au contenu principal

« Nous fabriquons notre aliment avec un camion-usine en Cuma »

Trois Cuma de la Loire viennent de s’équiper d’une unité mobile de fabrication de l’aliment qui facilitera l’utilisation des céréales produites sur l’exploitation ou achetées localement.

Le broyage mobile en Cuma est une vieille histoire dans le département de la Loire. Il s’est développé à partir des années 1970 et 1980 grâce à un importateur local de broyeurs et aplatisseurs GEHL. Aujourd’hui, une bonne trentaine d’équipements (autant de broyeurs que d’aplatisseurs), pour presque autant de Cuma, se déplacent de ferme en ferme. Ils ont indéniablement facilité l’utilisation des céréales. « Les éleveurs laitiers travaillent principalement avec des matières premières », affirme Michel Chavanat, président de la Cuma de la Fourragère du Roannais. Avec deux autres Cuma, elle est à l’origine d’un nouveau projet très novateur : l’achat d’un camion de fabrication d'aliment à la ferme. Un camion porteur est équipé d’un aplatisseur, d’un broyeur et d’une mélangeuse de huit mètres cubes. L’investissement est conséquent : 340 000 euros, dont 105 000 euros pour le camion et 235 000 euros pour l’usine. Il a bénéficié d’une subvention de 54 % par la région Auvergne-Rhône-Alpes sur une enveloppe spéciale non dédiée aux Cuma. « Nous sommes partis sur cette solution parce que le parc de broyeurs est vieillissant, expliquent Michel Chavanat et Alexandre Bardonnet, également impliqué dans le projet. Les broyeurs actuels sont hors de prix. Il faut compter entre 70 000 et 80 000 euros avec le châssis porteur. De plus, les engins sont moins costauds qu’autrefois, les tracteurs roulent de plus en plus vite, ça les fragilise. Si les trois Cuma changeaient leur broyeur, le prix des trois serait équivalent au prix de l’usine. Et il faut des tracteurs pour les déplacer. »

Fabriquer l’aliment avec beaucoup plus de précision

Outre l’intérêt d’un équipement autonome qui peut se déplacer sur un plus grand rayon d’action, les porteurs du projet voient dans cette solution la possibilité de valoriser encore mieux les céréales. Les broyeurs tractés, même s’ils sont équipés d’une cuve de mélange, n’ont pas la possibilité de peser les matières. Difficile donc de faire une composition d’aliment précise. Le camion est équipé d’un système de pesée et d’un programme de fabrication de formules d’aliments. Les minéraux peuvent être incorporés dans le mélange et le camion peut faire le traitement Maxammon des céréales (procédé de conservation humide). « Les éleveurs auront la possibilité de fabriquer leurs aliments avec beaucoup plus de précision, assurent les deux responsables. Même en achetant de la céréale dans le voisinage, ce qui est relativement facile dans notre département, et du tourteau, et en faisant venir la fabrique d’aliment, ça leur coûtera moins cher que d’acheter un mélange tout fait. » Par rapport aux broyeurs tractés, le camion fera gagner du temps aux utilisateurs en supprimant les interventions manuelles pour le chargement des céréales et en offrant un service complet aux Cuma qui ne l’avaient pas. « Le but est que le chauffeur travaille en autonomie », expliquent-ils. Aux adhérents de s’organiser pour cela.

Un coût de 20 à 25 euros par tonne

Bien sûr, le service sera plus coûteux qu’avec les anciens broyeurs. Facturé le plus souvent à l’heure, il reviendra à 15 euros par tonne. Les trois Cuma ont bâti leur projet d’achat de camion-usine sur une fabrication annuelle de 2 800 tonnes. Le service sera facturé selon trois critères : un forfait déplacement de 10 euros pour éviter les petits tonnages, un tarif à la tonne (13 €) et à l’heure (50 €). Mis en service début septembre, le camion travaillera par secteur. Le coût de fabrication devrait se situer entre 20 et 25 euros par tonne. « Dans ce prix, nous avons intégré des frais d’entretien, précisent les initiateurs du projet. Nous devrions gagner sur ces frais la première année en attendant de trouver des volumes supplémentaires. Beaucoup de gens sont en phase d’attente. Nous espérons que le coût du service sera inférieur à 25 euros. » Un salarié a été embauché à plein temps. Il complètera son planning en intervenant dans les fermes et sera mis à disposition de l’Intercuma. En tout état de cause, le gain par rapport à un aliment du commerce est réel. « Le camion est un outil pour aller vers l’autonomie alimentaire et faire des économies, mais ce n’est pas une finalité, insiste Michel Chanavat. L’autonomie va bien au-delà. Elle passe par la volonté de l’agriculteur de réorganiser son assolement ou d’acheter la céréale chez un voisin, de se grouper pour acheter ce qui lui manque, notamment la protéine... Bref, de calculer. Le camion peut être un déclic pour aller dans ce sens-là. »

Avis d'éleveur

Alexandre Bardonnet, Gaec de Boisy

« Nous sommes autonomes voire excédentaires en céréale et paille »

« Nous élevons 45 vaches et nous transformons le lait(1). Depuis cinq ans, nous fabriquons notre aliment avec des matières premières. L’augmentation de surface a permis d’accroître la sole en céréales (10 ha de maïs grain, 30 ha de blé, orge et méteil). Nous sommes désormais autonomes, voire excédentaires en céréale et paille. Nous préférons en avoir un peu plus et vendre le surplus les bonnes années plutôt que de devoir en acheter lorsqu’elles sont chères. Nous avons construit un bâtiment de stockage et installé deux cellules supplémentaires, ce qui nous permet d’acheter le tourteau par camion entier. Cet investissement de 20 000 euros est largement payé par l’économie sur la charge d’aliment. En travaillant ainsi, nous avons même gagné en lait et en taux. Dans la ration semi-complète, nous mettons du maïs grain humide (0,8 à 1,5 kg/VL/j), du tourteau de colza et parfois un peu d’orge et, avec le camion, nous fabriquons une VL avec de la céréale et du tourteau pour le DAC. »

Avis d'éleveur

Michel Chanavat, Gaec du petit domaine

« Nous broyons avec le camion et nous stockons à plat »

« Nous produisons 1,6 million de litres avec un cheptel de 160 vaches à la traite. Nous produisons les deux tiers de nos besoins en céréales et nous achetons le complément localement. Le tourteau, un mélange variable de colza et soja selon les cours, est sous contrat avec un marchand d’aliment. Les céréales sont broyées avec le camion de la Cuma. Les matières premières sont stockées à plat et incorporées dans les rations complètes (cinq formules au total) réalisées avec une automotrice. Il y a trois ans, nous avons construit un bâtiment de stockage pour le foin, la paille, les céréales et le tourteau. Les revenus de la toiture photovoltaïque et l’économie réalisée sur les livraisons de tourteau par 30 tonnes payent l’annuité du bâtiment. Nous avons également repris un peu de terrain. Cela nous a permis d’augmenter les surfaces en cultures et de récolter l’herbe un peu plus tôt parce qu'on recherche moins le rendement, et donc d’améliorer sa valeur en protéine et de gagner un peu en tourteau. »

Les plus lus

<em class="placeholder">Nathalie et Michel Daguer, éleveurs en Mayenne avec leurs vaches</em>
Pâturage hivernal : « Nous ne voyons que des bénéfices dans notre élevage en bio et en monotraite en Mayenne »

Le Gaec du Ballon en Mayenne, en bio et en monotraite, profite de conditions pédoclimatiques privilégiées pour pâturer en…

<em class="placeholder">Daniel Rondeau (à gauche) est beaucoup plus serein depuis qu’il s’est réassocié avec Amaury Bourgeois et Raymond Papin (absent sur la photo). </em>
« Je me suis réassocié avec deux voisins, après avoir délégué l'alimentation et les cultures en Vendée »

Le Gaec Les 3 B, en Vendée, s’est constitué le 1er avril 2024. Daniel Rondeau s’est de nouveau associé, après…

<em class="placeholder">guillaume rivet, éleveur dans les deux-sèvres</em>
Organisation du travail : « Nous avons robotisé la traite pour anticiper le départ à la retraite de mon père dans les Deux-Sèvres »

Le Gaec Privalait, dans les Deux-Sèvres, tourne entre mère et fils depuis bientôt deux ans. La robotisation de la traite, en…

<em class="placeholder">« L’herbe pâturée est la plus économique car, plus il y a de stock, plus les charges de mécanisation augmentent », soulignent Sébastien Le Goff et Julie Sylvestre.</em>
Diagnostic de système fourrager : « Nous avons prouvé la résilience de notre élevage face aux aléas climatiques dans le sud du Morbihan »

Au Gaec de Coët Cado, dans le Morbihan, pour s’assurer de la résilience de leur système fourrager aux aléas, les associés ont…

Carte de la zone régulée FCO3, en date du 19 décembre 2024.
FCO 3 : fin décembre, la maladie continue de progresser

À date de jeudi 19 décembre 2024, le ministère de l'Agriculture annonce 8 846 cas de fièvre catarrhale ovine sérotype 3.…

<em class="placeholder">Brice Minot, Vincent Colas et Cyrille Minot, trois des quatre associés du Gaec des forges, en Côte-d&#039;Or</em>
Élevage laitier : « Nous cherchons de la productivité et de l’autonomie pour rentabiliser nos installations en Côte-d’Or »

Au Gaec des forges, en Côte-d’Or, les associés ont robotisé pour mieux organiser le travail. La recherche d’un bon prix du…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière