Le coup de pouce hormonal au service de la repro
Traitements de synchronisation des chaleurs ou à visé thérapeutique, simplification du travail... à chaque situation son ou ses protocoles.
Traitements de synchronisation des chaleurs ou à visé thérapeutique, simplification du travail... à chaque situation son ou ses protocoles.
Prostaglandines, progestagènes, GnRH, PMSG et HCG, les hormones utilisées dans le cadre de la gestion de la reproduction se comptent sur les doigts d'une main. Utilisées à bon escient, ces hormones contribuent à améliorer les performances de repro des femelles de votre troupeau et vos conditions de travail. Attention toutefois à ne pas tomber dans l'excès à l'image de ce qui se fait notamment dans certains élevages aux États-Unis. Pays où les hormones coûtent d'ailleurs bien moins cher qu'en France. Les traitements hormonaux sont des outils, pas des solutions miracles. Ils sont d'autant plus efficaces quand ils sont réalisés dans le cadre d'un suivi repro, sur des animaux correctement alimentés, pas stressés... Le point sur les différents usages possibles à l'exception des traitements liés aux collectes d'embryons.
Depuis l’arrêt de la fabrication des implants, seuls deux dispositifs vaginaux sont commercialisés pour synchroniser les chaleurs : le CIDR et le Prid Delta. « Ces dispositifs libèrent des progestagènes (analogues de la progestérone). Ces hormones bloquent le cycle des femelles et empêchent l’ovulation », explique Christophe Rousseau, membre de la Commission vaches laitières de la SNGTV. Le dispositif peut être laissé 7 à 9 jours. Une injection de prostaglandines PGF2 Alpha est réalisée 24 heures avant son retrait. « Cette injection a pour objectif de provoquer la lyse (régression) d’un corps jaune éventuellement présent sur l’ovaire et de déclencher la venue en chaleurs. »
Une injection de l’hormone PMSG au moment du retrait du dispositif peut être nécessaire pour induire l'ovulation lorsque la femelle est mal ou pas cyclée. La dose de PMSG préconisée varie selon la race et le type d’animal (vache ou génisse). Attention au surdosage. Ce dernier peut conduire à des naissances gémellaires.
Côté avantages, ces traitements permettent de s’affranchir de l’observation des chaleurs pour inséminer. Il est possible d'inséminer à l’aveugle 56 heures après le retrait du dispositif (48 h pour les génisses avec pose d'un dispositif pendant 7 jours ). « Quand les femelles sont correctement cyclées, les taux de gestation après une insémination sont comparables à ceux obtenus sur chaleurs naturelles », souligne Christophe Rousseau.
Les deux dispositifs donnent des résultats comparables. Le choix entre le CIDR et le Prid Delta dépend des habitudes des prescripteurs. Christophe Rousseau met en garde contre le risque de rejet des dispositifs intra-vaginaux lorsqu’ils ne sont pas assez dépliés dans le fond du vagin. Le vétérinaire conseille également de couper au niveau de la vulve la tigette plastique qui dépasse pour éviter que des vaches et surtout les génisses ne tirent dessus et retirent le dispositif.
Coût d’un traitement : 27 à 32 euros HT
Les prostaglandines PGF2 Alpha provoquent la lyse (régression) du corps jaune éventuellement présent sur un ovaire en 24 heures et l’apparition des chaleurs généralement en deux à sept jours chez les vaches cyclées. Le cycle oestral d’une vache dure environ 21 jours, le jour zéro (J0) correspondant au début des chaleurs. Attention, les prostaglandines PGF2 Alpha ne sont efficaces qu’entre J5 et J17 du cycle oestral.
Ces précisions expliquent pourquoi un traitement avec cette hormone n’est envisageable que sur des femelles cyclées. C’est généralement le cas chez les races laitières. On comprend également pourquoi un traitement avec deux injections au minimum à 11 jours d’intervalle est plus efficace qu'une seule injection. Avec une double injection vous êtes en effet certain qu’une des deux sera réalisée entre J5 et J17. Cette sécurité double cependant le prix de la synchronisation. Par ailleurs, quel que soit le protocole utilisé (simple ou double injection), la durée de lyse du corps jaune étant variable selon son âge, mieux vaut inséminer sur chaleurs observées pour être certain de le faire au bon moment. « Avec une seule injection, les chaleurs apparaissent dans les deux à sept jours contre trois à quatre jours après deux injections », précise Christophe Rousseau.
Coût : environ 7 euros HT pour une injection
Ce protocole se base sur l'utilisation de GnRH et de prostaglandines (voir graphique). « Ce traitement est systématisé dans certains troupeaux aux États-Unis mais ce n'est pas top en termes d'image », souligne Christophe Rousseau. Un point de vue que partage Gérard Bernard, responsable du suivi repro chez Gènes Diffusion. Exit donc sa systématisation d'autant que Christophe Rousseau rappelle que ce protocole coûte plus cher que les autres et qu'il ne peut pas être fait sur tous les animaux. Il est notamment déconseillé sur génisses du fait de sa faible efficacité, chez ces animaux, en termes de taux de gestation. « Ce traitement est surtout intéressant pour traiter les vaches cyclées dont l'éleveur voit mal les chaleurs. Il est efficace à condition d'être réalisé quand il y a un follicule de grande taille (plus de 10 mm de diamètre) sur l'ovaire. L'échographie permet de savoir si c'est possible de faire un traitement GPG », précise le vétérinaire. Avec ce protocole, il est possible d'inséminer à l'aveugle entre 12h et 18h après la seconde injection de GnRH.
Coût : environ 30 euros HT
Dans les élevages ou la détection des chaleurs ne pose pas de problème, le traitement avec une injection de GnRH puis de prostaglandines sept jours plus tard donne de bons résultats et coûte moins cher que le protocole GPG. Et cerise sur le gâteau, il améliore un peu la fertilité. Il peut être donc être intéressant pour des inséminations réalisées avec des doses coûteuses. Les inséminations sont obligatoirement réalisées sur chaleurs détectées.
Coût : environ 25 euros HT
« Les prostaglandines PGF2 Alpha sont utilisées pour traiter les corps jaunes persistants que l'on trouve fréquemment chez les vaches non vues en chaleurs 60 jours après vêlage » , précise Christophe Rousseau.
En cas d'endométrite diagnostiquée à partir de 21 jours après vêlage, la vache est traitée avec un antibiotique intra-utérin suivi, éventuellement, 12 à 15 jours plus tard d'une injection de prostaglandines PGF2 Alpha. « Cette injection favorise, chez les vaches cyclées, le retour en chaleurs et les contractions utérines et par conséquent la vidange de l'utérus », précise le vétérinaire même si celai est de plus en plus discuté.
Les vaches repeat breeding (vaches avec cycles réguliers mais qui prennent peu ou pas à l'IA) peuvent être traitées avec un protocole à base de GnRH. « Une injection 4 à 6 heures avant l'insémination améliore la qualité de l'ovulation et surtout le bon 'timing' entre ovulation et insémination. Il est possible de refaire une injection de GnRH ou d'HCG cinq jours après l'insémination. Avec ce traitement, on arrive à récupérer quelques animaux mais l'effet est plus visible sur les grands troupeaux », indique Christophe Rousseau.
Les kystes folliculaires post-partum sont favorisés par les déficits énergétiques importants en début de lactation. Ils se résorbent normalement bien dans les 60 jours après le vêlage. « Quand il y a plus de 10 % de cas dans un troupeau, il faut commencer à s'inquiéter », prévient cependant Christophe Rousseau. Si le kyste persiste, le problème peut être résolu par une injection d'hormone HCG suivie 12 à 14 jours plus tard par une injection de PGF2 Alpha pour faire « sauter » le corps jaune et provoquer le retour en chaleurs.
Une seconde solution consiste à utiliser du GnRH à double dose plutôt que de l'HCG. Le mécanisme est le même : « Le GnRH aide a transformer le kyste folliculaire en corps jaune. Ce traitement est un peu moins efficace mais aussi moins coûteux (environ 30 € HT contre 35 € HT avec de l'HCG) », précise le vétérinaire. Ce dernier met en garde contre la tentation d'éclater le kyste folliculaire manuellement. « Vous risquez d'abîmer l'ovaire. Mieux vaut utiliser un traitement hormonal. »
Des traitements de synchro peu utilisés
Ramenés au nombre de femelles inséminées, les traitements de synchronisation des chaleurs sont très peu utilisés par les vétérinaires ou les techniciens des coopératives d’insémination. Le groupe Evolution a par exemple réalisé 10 300 synchronisations des chaleurs sous contrôle vétérinaire avec un dispositif vaginal en 2017 pour 1,4 million d’inséminations premières. « La demande des éleveurs concerne pour 60 % de ces synchronisations des femelles allaitantes pour grouper les vêlages et faciliter le recours à l’insémination artificielle et la gestion des retours en chaleurs », souligne Jérôme Caudrillier, responsable produits reproduction d’Evolution. « Chez les vaches laitières, l’objectif des traitements est plus variable : synchronisation des receveuses d’embryons, simplification du travail notamment sur les génisses… Le traitement est également utilisé sur des femelles dont on ne visualise pas les chaleurs. »
De son côté Gérard Bernard, responsable suivi repro de Gènes Diffusion, constate que, dans l'ensemble, le recours aux traitements hormonaux diminue. Une tendance qui s'explique notamment par « les investissements réalisés par les éleveurs dans les outils de monitoring pour améliorer la détection des chaleurs ». En revanche, l'utilisation des traitements dans le but d'améliorer le confort de travail des éleveurs gagne du terrain. « Une injection de prostaglandine suivie d'une insémination sur chaleurs détectées permet de diminuer le nombre d'interventions sur les animaux », souligne à titre d'exemple Gérard Bernard.
Les traitements de synchronisation des chaleurs n'améliorent pas la fertilité (taux de réussite à l'insémination) des animaux mais la fécondité (intervalle vêlage-vêlage). Ils doivent être utilisés que sur des femelles aptes à être mise à la repro.