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Lait de pâturage : lancement d’une marque pour tout le territoire national

Créer de la valeur sur le lait français en donnant aux entreprises le moyen de mettre en avant nos pratiques françaises. Tel est le pari des éleveurs bretons et de leurs partenaires.

Ne vous y trompez pas. La marque Lait de pâturage est lancée en Bretagne mais elle a bien vocation à s’étendre sur tout le territoire. L’objectif est de mettre en avant les pratiques « vertueuses » du modèle français, nos exploitations à taille humaine avec pour la plupart du pâturage et un fort lien de l’élevage au sol : 80 % de l’alimentation des vaches produite sur les exploitations, peu de pays peuvent s’en targuer ! Bref, l’enjeu de cette marque est de différencier les produits français de ceux de nos concurrents néerlandais, allemands et danois auprès des acheteurs de produits laitiers, et de créer de la valeur en communiquant avec un message clair pour le consommateur. Ce n’est pas de stigmatiser les élevages qui, pour des raisons diverses, ne pâturent pas. « Nous avons pris conscience qu’il était urgent de se fédérer autour d’un marqueur fort de l’élevage laitier français : le « pâturage » est un message simple répondant aux attentes du citoyen », résume Marcel Denieul, président de l’association Lait de pâturage, lors de son lancement le 6 septembre dernier.

Une garantie sur un lait de territoire, pas sur un lait de tank

La promesse de Lait de pâturage porte en effet sur un lait de territoire, un territoire où les vaches pâturent en moyenne 150 jours par an. « C’est une moyenne. Ce n’est pas une garantie au tank, ni même à la tournée mais une garantie à la cuve de réception de la laiterie, ce qui correspond à une ligne de fabrication. » Concrètement, la moyenne d’une cuve sera calculée à partir des durées de pâturage déclarées par les éleveurs engagés (au prorata de leur litrage dans la cuve) ; certains déclareront plus de 150 jours, d’autres moins. Les éleveurs non engagés dans la démarche, et dont le lait sera dans la cuve, seront comptabilisés pour zéro même si leurs vaches pâturent 200 jours par an. La marque prend donc en compte l’ensemble des éleveurs, y compris ceux qui ne pâturent pas.

Cette gestion à la cuve fait qu’il n’y aura pas de surcoût lié à une collecte séparée. L’objectif est de « faire simple, de s’appuyer sur ce qui existe. Pour que les entreprises adhèrent à la démarche, il faut que cela soit compatible avec leur flux logistique ». La moyenne de 150 jours de pâturage sera garantie par un organisme certificateur (Certis) sur la base d’un cahier des charges « entreprises » et d’un cahier des charges « éleveurs ». Certis vérifiera que l’élevage dispose bien de la surface accessible et pâturée correspondant au nombre de jours déclarés (au minimum 0,1 are/vache par jour pâturé soit par exemple 15 ares/vache pour 150 jours), avec un minimum de 6 heures de pâturage par jour. « Les éleveurs répondant au cahier des charges restent libres de s’engager ou non dans la démarche. Mais l’objectif est qu’à terme un maximum d’éleveurs s’engagent sur tout le territoire. »

Faire simple, sans surcoût lié à une collecte séparée

Faire simple n’est pas si facile, il a fallu plusieurs mois de discussions pour s’accorder sur les 150 jours, abandonner l’idée de compensation pour l’affouragement en vert… Il a aussi fallu sécuriser la marque sur le plan juridique.

La marque a été déposée fin août. L’association Lait de pâturage a été créée début juillet par les éleveurs laitiers au travers de différentes organisations agricoles (FRSEA Ouest, JA, chambre régionale, GIE Élevage de Bretagne). Elle est propriétaire de la marque et en assure la gestion et la promotion. La région Bretagne fait partie des membres fondateurs : elle a apporté dès le début son soutien financier (90 000 € + 100 000 € d’avance de trésorerie) et en tant que futur acheteur public pour les collectivités. L’association est également ouverte aux acteurs de la société civile et à l’ensemble du territoire français. Quant aux utilisateurs de la marque, les industriels et distributeurs, ils sont partenaires de l’association. Les éleveurs, eux, s’engagent via leur laiterie.

Sodiaal et Eurial déjà engagés dans la démarche

Un travail de fond est mené au niveau des entreprises. Sodiaal et Eurial (branche lait d’Agrial) sont déjà engagées dans le projet. Les contacts sont bien avancés avec de grands groupes dont des privés. « Sodiaal a soutenu la démarche dès le début de la réflexion en janvier dernier », souligne Patrice Binet, administrateur de la coopérative. « Nous allons lancer en priorité la marque sur les marchés qui subissent de plein fouet la guerre des prix : les marchés sans marque, les marchés de gros, la restauration hors foyer. » Tous les produits sont potentiellement concernés mais le lait de consommation, secteur très bataillé, est en tête de ligne. « En tant qu’éleveur breton, ajoute-t-il, j’ai le sentiment d’être montré du doigt en permanence depuis quinze ans. Au travers de cette démarche, l’élevage breton va retrouver sa fierté : j’ai la conviction que notre système pâturant breton est capable d’être extrêmement résilient et a de nombreux atouts face aux attentes de la société. »

Les premiers produits estampillés avec le logo Lait de pâturage devraient être commercialisés d’ici à la fin de l’année, espèrent les partenaires. À condition que des milliers d’éleveurs s’engagent.

Ce n’est en tout cas pas un hasard si le lancement de la marque a eu lieu sur un élevage robotisé où les vaches pâturent. Celui de Cédric Gautier, jeune éleveur d’Ille-et-Vilaine, qui conduit avec sa mère un troupeau de 60 vaches à 10 000 litres. « C’est une façon de montrer aux citoyens que, contrairement aux idées reçues, la technologie et le bien-être animal ne sont pas en opposition. »

Quelles retombées pour les éleveurs ?

« La valorisation supplémentaire ne se décrète pas, répond Marcel Denieul, président de l’association Lait de pâturage. Mais cette démarche doit apporter un plus. Elle est une aide pour les entreprises : à charge pour elles de se battre pour créer de la valeur et la redonner aux éleveurs sur le prix du lait. » Dans les autres pays, une prime est accordée aux éleveurs qui se sont engagés dans une telle démarche (Friesland par exemple accorde 15 €/1 000 l pour 120 jours de pâturage). « La question de la transparence est essentielle : si prime il y a, elle doit figurer sur la facture et cette transparence doit aller jusqu’au consommateur. » Les États généraux tombent à pic : « la marque Lait de pâturage donnera aux distributeurs l’occasion de traduire leurs paroles en acte concret ».

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