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Lactalis : "La crise liée au Covid-19 nous fait craindre une baisse de la valorisation du lait à moyen terme"

Michel Nalet, du groupe Lactalis, craint l'effet du gonflement des stocks de poudre, beurre et fromage. Et l'effet de la perte de pouvoir d'achat. Entretien le 7 mai dernier.

Michel Nalet, directeur général relations externes et communication du Groupe Lactalis
Michel Nalet, Lactalis : « La stratégie de montée en gamme est stoppée dans son élan. Aujourd’hui, les ventes se tiennent, mais beaucoup de nos consommateurs voient leur revenu diminuer et cela risque de s’amplifier s’il y a une vraie crise économique. »
© E. Grégoire

Avez-vous fermé des sites ?

Michel Nalet, directeur général relations externes et communication - « Non, ni en France ni en Italie, qui est le deuxième pays producteur du groupe dans le monde après la France, avec 16 sites de production pour plus de 1,3 milliard de litres de lait collectés en Italie. En France, sur certains sites spécialisés, très touchés par la fermeture des rayons à la coupe, des marchés de plein air et les difficultés à l'export, les fabrications ont été réduites. Et le lait collecté a été réorienté sur les autres sites du groupe. L’optimisation de nos flux interusines, et la diversité de notre capacité industrielle (ingrédients, PGC), nous permettent pour le moment de gérer les volumes de collecte. »

Tous vos produits de grande consommation vendus en GMS ont-ils fortement progressé ?

M. N. - « Non. Ce sont surtout les produits cuisinables – beurre, crème, fromage ingrédient... – qui ont profité du boom des achats des ménages. Le lait de consommation a bénéficié d'un retour du petit déjeuner dans les habitudes. La question est de savoir si certaines habitudes perdureront après le déconfinement. »

Votre chiffre d’affaires global a-t-il augmenté ?

M. N. - « Le boom des achats des ménages sur certaines références n’a pas compensé les pertes sur les autres secteurs : baisse des volumes vendus aux ménages sur des références mieux valorisées (AOP, et en général les segmentations comme le BIO), baisse des volumes à l’export et en restauration hors foyer (RHF). Le report des achats sur les MDD et les premiers prix se traduit par une baisse de la valorisation moyenne de nos produits ; fromages, ultrafrais et desserts lactés par exemple.

Concernant nos clients BtoB (Business to Business), certains ont maintenu leurs ventes sur leurs PGC, mais plus généralement, ces opérateurs adoptent des positions attentistes sur les marchés d’ingrédients laitiers, par manque de visibilité sur leurs ventes potentielles au moment du déconfinement. »

Le déconfinement sera-t-il synonyme de retour à la normale ?

M. N. - « En France, quelques débouchés vont redémarrer pour les marchés de plein air, la restauration collective et commerciale, mais ce sera partiel et lent. On le voit bien en Chine. Les gens sont repartis travailler, mais ils vont peu au restaurant.

Les commandes pour l'export commencent à repartir vers la Chine, mais pour l'instant on ne retrouve pas les volumes et les valeurs d'avant. Ailleurs, les pays ont tour à tour confiné leur population, avec des baisses de consommation en RHF et magasins spécialisés (pâtisseries), et donc un effet sur le lait, beurre, crème, et fromage français. Le déconfinement sera très progressif. D'autre part, tous les pays défendent la consommation de leurs productions locales. Une grande inconnue est comment va jouer la perte de pouvoir d'achat ? On s'attend en effet à une crise économique mondiale. »

Êtes-vous confiant pour le second semestre ?

M. N. - « Nul ne sait si les déconfinements amorcés perdureront et comment la consommation évoluera. Par contre, on sait que les stocks de poudre et de beurre augmentent. Ainsi que les stocks de fromages : caillé congelé, mozzarella, edam et autres fromages congelés. Ces stocks pèseront sur les marchés et donc sur le prix du lait dans les mois à venir.

En Europe, des laiteries ont déjà de graves difficultés, avec des conséquences sur le prix de base du lait annoncé à moins de 300 €/1 000 l (en 38-32) pour avril et mai (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Royaume-Uni, Irlande, Pologne) ; avec des suspensions de collecte (Royaume-Uni, Pologne), et dans certains cas des décalages dans le paiement du lait (Royaume-Uni, Pologne). Contrairement à ces laiteries, Lactalis n’a pas eu recours à ces deux derniers mécanismes.

On ne voit pas encore tous les effets de ce qui se passe dans le monde et notamment aux États-Unis. À quel niveau sont leurs stocks ? À quel prix vendront-ils ? Des aides de plusieurs milliards de dollars ont été annoncées pour soutenir les éleveurs et les industriels. »

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Prix du lait de base : 341 €/1000 l en 41-33 pour avril et mai en moyenne nationale, soit 326,5 €/1000 l en 38-32.

Vigilance sur les MDD et premiers prix

« Avec des cotations qui baissent, les négociations avec la grande distribution française pour les MDD et premiers prix ne sont pas faciles (environ la moitié des PGC France vendus). Pour l'heure, notre objectif est de les finaliser. Il faut que les prix en GMS tiennent, dans l'esprit des EGA. »

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