L’acidose aiguë d’une vache laitière suite à une évasion dans le couloir d’alimentation
Un portillon ou une barrière mal fermé et c’est l’évasion à proximité des silos ou dans le couloir d’alimentation avec des seaux de granulés. Une curieuse, deux gourmandes, parfois même tout un troupeau. Gare à l’acidose aiguë qui peut conduire à la mort de l’animal !
Un portillon ou une barrière mal fermé et c’est l’évasion à proximité des silos ou dans le couloir d’alimentation avec des seaux de granulés. Une curieuse, deux gourmandes, parfois même tout un troupeau. Gare à l’acidose aiguë qui peut conduire à la mort de l’animal !
Voilà le tableau : le troupeau est au pré, une vache est restée dans la stabulation car elle est en chaleur. Au retour de l’éleveur, la coquine se balade dans la cour. Elle a fait un tour par le couloir d’alimentation, en témoignent les bouses et les seaux de farine vides. L’évasion date de moins de 3 heures, la vache paraît en forme. L’éleveur ne s’inquiète pas trop, remet la demoiselle dans la stabulation où elle se jette sur l’eau et continue sa journée. Sauf qu’à l’heure de la traite, la vache reste prostrée dans un coin. Pas de fièvre, la queue un peu sale, pas de mammite, pas de boiterie... L’éleveur m’appelle alors.
Réagir le plus vite possible
À l’examen de la vache, les oreilles sont basses, le rumen ne tourne pas, le cœur est rapide. Les bouses sont un peu plus liquides mais il n’y a pas de réelle diarrhée. L’œil commence à s’enfoncer, signe d’une déshydratation. Les seaux sont vides dans son box. Avait-elle de l’eau ? « Oui, elle s’est jetée dessus quand je l’ai remise dans sa case d’où elle s’était tirée. Et mince, la farine ! Tu penses que ça peut être ça ? »
Sans la remarque de l’éleveur, j’aurais sans doute cherché un moment. Quelle quantité de farine ? « Un seau, peut être deux… » Aïe aïe aïe… Nous sommes face à un cas d’acidose aiguë. Que faire ? Déjà être content qu’il n’y ait qu’une vache et pas tout un troupeau. Il est trop tard pour vider le rumen de son contenu. Cela aurait pu être fait lors de la découverte de l’évasion, mais là, la farine a déjà été en grande partie attaquée par les microorganismes du rumen. Les deux limites de cette opération de chirurgie sont le nombre d’animaux à opérer et le délai avec la prise d’aliment. Tous deux doivent être le plus faibles possible.
Lutte contre l’acidose et ses complications
L’ingestion en grosse quantité d’aliments très fermentescibles, type farine, granulés, entraîne la production d’acide lactique dans le rumen et un appel d’eau. Cet acide lactique responsable d’abord d’acidose ruminale va ensuite causer une acidose métabolique (baisse du pH sanguin). Si les vaches n’apprécient pas beaucoup les variations de pH dans le rumen, tous les organismes vivants supportent très mal les variations de pH sanguin, à l’origine de choc important.
Il faut commencer par drencher la vache avec une petite quantité d’eau froide, du potassium et surtout 250 g de bicarbonate de sodium. C’est le premier traitement que l’éleveur peut donner lui-même en cas de doute. On laisse l’animal au foin seulement et on rationne l’apport en eau. Le bicarbonate et le potassium seront sans doute à renouveler selon l’évolution de l’état de la vache.
D’autres traitements peuvent aider : une perfusion pour lutter contre la déshydratation ; certains anti-inflammatoires pour leur effet antitoxine ; la vitamine B1 en temps normal synthétisée dans le rumen et dont l’absence accentue les troubles neurologiques ; les antibiotiques pour éviter une entérotoxémie et un passage de germes dans le reste de l’organisme.
Il est aussi possible de prendre en charge de manière plus précise l’hypokaliémie (trouble électrolytique) et l’acidose sanguine en faisant certaines mesures sur le sang. Petit bémol, la mesure du taux de potassium est assez accessible mais pour les gaz du sang, tous les vétérinaires ne sont pas équipés de l’analyseur spécifique, et les résultats donnés par les laboratoires d’analyse humaine sont parfois longs à arriver.
L’évolution se fait ensuite sur quelques jours où il faut être particulièrement attentif. Cela va jusqu'à la mort en quelques heures avec l’animal couché et ballonné, en passant par de la diarrhée violente dont l’animal récupère en quelques jours.
Le saviez-vous ?
Si la vache a la chance de s’en tirer, des traces de l’épisode d’acidose aiguë seront visibles quelques mois plus tard sur les sabots avec une belle fourbure.
Les points clés de l’acidose aiguë
- Presque toujours accidentelle : surveiller l’accès aux granulés, silos, farine…
- Brutale et souvent sévère : mortalité fréquente, notamment si la prise en charge tarde
- Signes cliniques : rumen à l’arrêt, ballonnement, diarrhée, perte d’appétit, perte d’équilibre, animal prostré voire couché
- Toujours avoir du bicarbonate pour réagir rapidement