Projet Phytoel : des élevages plus autonomes pour réduire les phytosanitaires
Le projet Phytoel montre que de fortes réductions des phytos sont possibles dans beaucoup d’exploitations de polyculture-élevage. Mais avec de profonds changements au niveau du choix des cultures, de la ration, du type de production, du travail, etc.
Le projet Phytoel montre que de fortes réductions des phytos sont possibles dans beaucoup d’exploitations de polyculture-élevage. Mais avec de profonds changements au niveau du choix des cultures, de la ration, du type de production, du travail, etc.
Vingt-six exploitations de polyculture-élevage des quatre coins de la France(1) ont participé au projet Phytoel : dix avec un atelier lait, huit avec un atelier lait et viande, et huit avec un atelier viande. Ces exploitations font partie du réseau Dephy ou du réseau d’élevage Inosys. Comme au Gaec de Révion, dans les Vosges, un travail de coconstruction a été mené sur chacune d’elle pour bâtir un nouveau système, en se plaçant dans un scénario de réduction de 50 % des phytos d'ici cinq à dix ans. Mais aussi en respectant les objectifs et les attentes des exploitants. « En moyenne, sur les vingt-six exploitations, la baisse de l’IFT(2) par hectare est de 53 %. L’objectif global de réduction est donc atteint mais pas dans tous les systèmes ", souligne Philippe Tresch, de l’institut de l’élevage, en charge du projet. La majorité des simulations se situent entre 45 et 65 % de baisse d’IFT. Si cinq exploitations en système économe ont totalement abandonné tout recours aux produits phyto (dont deux converties en bio), sept n’ont évolué qu’à la marge (de 0 à -30 % d'IFT). « Ce sont essentiellement des systèmes spécialisés qui auraient dû, pour atteindre - 50 % d’IFT, baisser leur niveau de production et acheter une grande partie de leurs concentrés. "
Une baisse de 20 % des surfaces en cultures de vente
Deux types de leviers ont été mis en œuvre dans les simulations. Des leviers concernant les pratiques sur chacune des cultures comme le décalage de la date de semis, la réduction de dose, le binage… : ils expliquent en moyenne 20 % des 53 % de baisse des IFT. Et des leviers concernant l’évolution de l’assolement qui expliquent 33 % de la baisse. « Cette réorganisation des assolements entraîne une baisse de 20 % des surfaces en cultures de vente au profit des cultures fourragères, constate-t-il. Dans deux tiers des cas, de nouvelles cultures ont été introduites, ce qui accroît la complexité de l’atelier et peut être un frein au changement. »
Un impact filière faible pour le lait, fort pour la viande
Globalement, le volume annuel de fourrages produit évolue peu : la hausse des surfaces fourragères compense la baisse moyenne de 10 % des rendements. L’autonomie fourragère reste stable ; en revanche, l’autonomie en concentré augmente fortement, de 14 % dans les ateliers laitiers et de 33 % dans les ateliers viande. Elle s’accompagne d’une baisse de la densité énergétique et protéique des rations. Ces évolutions ont une incidence sur la productivité des troupeaux. Elle est faible en lait : le volume de lait baisse en moyenne de 4 %, la production par vache de 3 %. Elle est nettement plus forte pour la production de viande qui baisse de 14 % en poids vif. Mais il y a de grandes disparités entre systèmes. En lait, certains ont augmenté la taille du troupeau pour compenser une perte de productivité, souvent au détriment d’ateliers de JB. En système viande, c’est la finition des animaux qui est sacrifiée au profit de la vente de broutards.
Au final, « les EBE sont en moyenne stables mais construits sur de nouveaux équilibres : une baisse des produits de 6 % compensée par une baisse des charges de 8% », souligne Philippe Tresch. Huit exploitations ont toutefois des performances soit très supérieures (+21 à +58 %), soit très inférieures (-17 à -29 %). « Dans ce cas, la baisse des performances semble moins due à la baisse des IFT qu’aux orientations stratégiques retenues. » Le temps de travail, plus délicat à estimer, est en moyenne « perçu » plus faible. Mais c’est surtout l’organisation générale du travail qui a fortement évolué pour les trois quarts des exploitations, avec des travaux de saison moins concentrés.
(2) Indicateur de fréquence de traitement.
Chiffres clés
L'évolution des surfaces
-26 % en céréales
-49 % en colza
+200 % en tournesol
x5 en méteil
+ 36 % en maïs grain
+ 22 % en prairies temporaires