Combiner rentabilité et production par vache élevée
Forte maîtrise technique, vigilance dans l’organisation du travail et la gestion des investissements, formation. Telles sont, d’après une enquête auprès d’une trentaine d’éleveurs bretons, les clés de la réussite.
Forte maîtrise technique, vigilance dans l’organisation du travail et la gestion des investissements, formation. Telles sont, d’après une enquête auprès d’une trentaine d’éleveurs bretons, les clés de la réussite.
Atteindre plus de 8 000 litres de moyenne économique sur trois années consécutives n’est pas si fréquent. Sur 3 000 exploitations bretonnes spécialisées en lait, seules 397 ont maintenu un niveau de lait vendu par vache supérieur à 8 000 litres tous les ans entre 2011 et 2013. Mais maintenir en même temps une bonne rentabilité l’est encore moins : parmi ces 397 exploitations, seules 61 sont restées chaque année dans le quart supérieur d’un point de vue économique. Comment font-elles donc ? Des enquêtes ont été réalisées chez 28 de ces éleveurs dans le cadre d’une étude menée par la chambre d’agriculture de Bretagne et Cerfrance Bretagne. Elles ont permis de rechercher dans leurs pratiques d’élevage les clés de la réussite.
L’alimentation constitue plus de la moitié des charges opérationnelles des ateliers laitiers. Dans les élevages étudiés, les coûts alimentaires sont inférieurs de près de 10 euros par 1 000 litres à la moyenne bretonne, bien que leur production soit supérieure de 1 500 litres par vache (performances comparées avec les adhérents BCEL Ouest produisant entre 8 500 et 9 500 kg par VL et par an - tableau 1). Ainsi, ils produisent + 380 litres de lait par vache par an, tout en distribuant une quantité de concentré équivalente par vache.
Pour produire un haut niveau de lait combiné à une bonne maîtrise des coûts, les éleveurs enquêtés produisent des fourrages de qualité, distribués à volonté. La ration hivernale est corrigée autour de 100 g PDIE/UFL. Les concentrés de production sont distribués de façon limitée (en moyenne 1,6 kg/VL/j dans la ration de janvier) et souvent autoproduits. Les rations fourragères sont simples : peu de fourrage autre que l’ensilage de maïs. Seules deux de ces exploitations ferment le silo de maïs au printemps mais toutes gèrent le pâturage de façon à préserver la qualité de l’herbe offerte tout en optimisant le rendement : fil avant, paddocks de courte durée, planning de pâturage…
Le niveau élevé de lait par vache s’explique en partie par la génétique avec un index lait supérieur de + 59 kg par rapport à la moyenne des éleveurs laitiers bretons en 2014. En matière de choix de taureaux pour les accouplements, la majorité des éleveurs restent vigilants sur les index lait, le taux et la qualité de la mamelle, même s’ils se préoccupent aussi des index fonctionnels (aplombs…).
Au-delà de l’index lait, leur point fort est l’effet troupeau moyen, supérieur de + 944 kg par rapport à la moyenne. Ce fort écart traduit une excellente maîtrise technique : rigueur dans l’alimentation, maîtrise de la santé, de la reproduction et de l’élevage des génisses (tableau 2). Les résultats de ces élevages produisant beaucoup de lait par vache sont équivalents voire meilleurs comparés aux élevages de la zone BCEL Ouest, tous niveaux confondus. Les frais vétérinaires sont maîtrisés compte tenu du niveau de lait par vache élevé.
Les élevages étudiés se caractérisent par une préférence pour la rénovation des bâtiments plutôt que l’investissement dans du neuf et par des choix de matériels simples, notamment pour la distribution de la ration (désileuses…). Les bâtiments sont déjà amortis malgré la présence de jeunes dans les exploitations enquêtées. Un seul élevage a un bâtiment construit depuis moins de sept ans. En ce qui concerne la mécanisation, le nombre de tracteurs utilisé dans l’élevage n’excède pas l’objectif de 2 chevaux amortissables/ha.
Lors de la journée de restitution des résultats de l’étude, les éleveurs ont mis l’accent sur l’attention particulière accordée aux animaux : « avoir l’œil sur le troupeau », « anticiper pour ne pas voir le vétérinaire trop souvent ». Quant à l’organisation du travail : « les animaux sont la priorité, il faut savoir déléguer certains travaux ». Se retrouve également le souci de s’améliorer : « s’intéresser, se former, être à l’écoute ». Au-delà d’une formation initiale plus élevée (39 % d’études supérieures par rapport à 17 % pour l’ensemble de la Bretagne), les exploitants continuent tout au long de leur carrière de se former et de faire appel à des conseils externes. Ils se forment même deux fois plus que la moyenne des producteurs laitiers bretons.
L’alimentation et les choix génétiques et d’investissement sont au cœur de la réussite de ces élevages. Mais une approche animalière forte, beaucoup de rigueur dans la mise en œuvre technique et la motivation pour le métier semblent aussi déterminantes pour combiner production par vache et maîtrise du coût de production.
Ils ont dit…
Pour vous quels sont les facteurs de la réussite dans un élevage laitier ?
• « Il faut valoriser les fourrages au maximum et avoir l’œil de l’éleveur mais attention au relâchement ! »
• « L’informatique est un outil intéressant pour les grands troupeaux, mais on doit rester dans l’étable, surtout en grands troupeaux. »
• « Garder la motivation pour le métier, pas toujours facile dans la période actuelle ! »
• « Être efficace, être rigoureux et surtout ne rien laisser passer. »
• « Il y a 36 moyens de s’en sortir, il faut s’adapter en fonction de là où l’on se trouve et savoir se remettre en cause, sans arrêt, pour progresser. »
• « J’aime bien avoir un œil extérieur : dans mon élevage, tout n’est pas parfait. Il faut rester informé. »
• « Je n’ai pas l’impression de faire différemment des autres. Éviter le surinvestissement et déléguer le travail quand c’est possible. Parfois, il faut s’arrêter pour reprendre du souffle. »
• « En élevage laitier, on peut jouer sur le fait que les bâtiments soient évolutifs. »