Revenu : les arbitrages à faire pour profiter de la déduction fiscale de 150 euros par vache
La déduction fiscale de 150 euros par vache s’applique encore en 2024. Le nombre de vaches à engager, la date de réintégration dans le revenu et l’intérêt même d’avoir recours à la mesure doivent être bien réfléchis.
La déduction fiscale de 150 euros par vache s’applique encore en 2024. Le nombre de vaches à engager, la date de réintégration dans le revenu et l’intérêt même d’avoir recours à la mesure doivent être bien réfléchis.
Annoncé par Bruno Lemaire, ancien ministre de l’Économie, et lancé officiellement le 6 octobre 2023 au jour de la clôture du Sommet de l’élevage, le dispositif de défiscalisation du cheptel de 150 euros par vache vise à compenser l’augmentation de la valeur des vaches allaitantes et laitières liées aux hausses de marché et de l’inflation, qui entraînent de fait une augmentation des impôts et des cotisations sociales, sans réel enrichissement.
Seuls les exploitants imposés à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des Bénéfices Agricoles et soumis à un régime réel d’imposition (régime simplifié ou régime réel normal) peuvent temporairement pratiquer cette déduction de leur résultat imposable. La mesure s’applique pour tous les exercices clos entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2024.
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Réintégration fiscale avant six ans
Concrètement, la mesure consiste à autoriser la déduction fiscale d’une provision, dès lors que, à effectif constant, la prise de valeur des vaches à la clôture de l’exercice est supérieure à 10 %. Cette provision est déductible du revenu imposable dans la limite de 150 euros par vache et de 15 000 euros par exploitation, soit 100 vaches. Pour les Gaec et les Earl, ce plafond est multiplié par le nombre d’associés exploitants, dans la limite de quatre associés.
Et si initialement, la déduction devait s’appliquer à toutes les vaches présentes à la clôture, il est possible, depuis le 17 mai 2024 de n’appliquer la déduction fiscale que sur une partie du troupeau. « Il faut bien réfléchir le nombre de vaches à retenir pour éviter notamment de changer de tranche d’imposition si la déduction est trop élevée, en particulier pour les Gaec où le nombre de vaches peut être important » insiste Daniel Morvan, fiscaliste à CERFrance Finistère. Seule la valeur des vaches laitières et des vaches allaitantes qualifiées en tant que tel à la clôture de l’exercice est à retenir, en excluant les génisses, veaux, taureaux et broutards.
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Comme toute provision, les sommes déduites devront ensuite être réintégrées au résultat d’exploitation, au titre d’un ou plusieurs des six exercices comptables suivants. « Il ne faut pas oublier que l’on va alors augmenter son revenu imposable, alors que la situation aura peut-être changé, que l’on n’aura plus d’enfants à charge…, souligne Daniel Morvan. Il faut donc réintégrer les sommes déduites les moins bonnes années. Et si un associé doit partir avant les six ans, il est préférable de les réintégrer avant son départ. »
Un nouveau dispositif étendu aux charges sociales à venir
Selon les PLF 2025 et PLFSS 2025, le dispositif devrait être reconduit en 2025 et étendu aux charges sociales. Il n’aura plus la nature d’une déduction fiscale, mais d’une provision enregistrée en comptabilité prise en compte non seulement dans le calcul du résultat imposable mais également dans celui des cotisations sociales.
Daniel Morvan, fiscaliste à CERFrance Finistère
« La mesure aura peu d’impact en 2024 »
« D’après les chiffres du 1er semestre 2024, la valeur des vaches entre 2024 et 2023 n’a pas augmenté de plus de 10 %, contrairement à 2023 où une forte hausse de cette valeur par rapport à 2022 et 2021 avait été constatée, en lien avec l’inflation. Il y aura donc très peu d’exploitations éligibles pour pratiquer cette déduction en 2024. De plus, la déduction de 150 euros par vache n’est déductible que fiscalement, mais pas socialement. Un autre bémol est que la part économisée sur l’impôt sur le revenu entre dans la règle des minimis, dont le plafond est de 20 000 euros sur trois ans et dans laquelle entre également la Déduction pour Épargne de Précaution (DEP). La déduction de 150 euros par vache, qui n’est pourtant qu’une avance sur trésorerie et non une aide, peut entraîner la perte d’autres aides de minimis. Compte tenu des conditions d’application, les exploitations se tournent donc plus facilement vers la DEP plutôt que vers la déduction de 150 euros par vache. »
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