C’est le printemps !

C’est le printemps pour tout le monde, même pour les vaches qui vivent à l’ombre des robots de traite. Celle-là avait fait son pic de lactation quand fortuitement, à l’heure d’entretenir les logettes, elle montre une bouse collante et tirant sur le noir. Mais elle se porte bien car elle a fréquenté le robot et le cornadis. Le lendemain, elle a du lait et passe au robot normalement. Le surlendemain, elle n’est pas allée se faire traire de la nuit et malgré un écart de traite exagéré, sa production de lait a dégringolé. Une journée encore et la voilà par terre, très fatiguée. Je lui trouve de la bouse collante, noirâtre mais qui se révèle à la lumière plus rouge qu’il y paraît. Elle souffre désormais d’une anémie intense à force d’avoir perdu jour après jour du sang dans la bouse. Cette histoire me ferait bien penser à celle d’un syndrome intestinal hémorragique avec son occlusion par un caillot de sang mais cette maladie est d’ordinaire brutale, avec une chute vertigineuse de production, un état de choc et des caillots de sang plus rouges en guise de bouse. Cette évolution plus tranquille me fait davantage penser à un ulcère de la caillette qui saigne ; question de saison aussi, puisqu’ils sont bien plus fréquents avec l’allongement de la durée du jour.
Transfusons !
Dans l’état dans lequel elle se trouve, il va falloir mettre le paquet. Les médicaments humains qui soignent les ulcères gastriques de l’homme ne sont pas évalués pour les vaches et leur prix est trop élevé. Laissons-les de côté. Il manque du sang, il faut absolument en remettre ne serait-ce que pour apporter davantage d’oxygène à la caillette. Il faut aussi augmenter le débit sanguin dans cette caillette pour lui amener de quoi fabriquer le mucus protecteur qui a fait défaut. Je la laisse donc après lui avoir passé 5 litres de sang, un antihémorragique et une perfusion copieuse de soluté salé et elle nous a fait en retour l’amitié de goûter avec nous aux bienfaits du printemps.