Alimentation animale : l’énergie pèse sur le prix des minéraux
Le marché des compléments minéraux et vitaminiques connaît des tensions mais le risque de pénurie est écarté.
Le marché des compléments minéraux et vitaminiques connaît des tensions mais le risque de pénurie est écarté.
La complémentation minérale et vitaminique n’échappe pas au contexte actuel de hausse des prix des matières premières. « Les approvisionnements en minéraux se font sur des marchés mondialisés », présente Yves Reneaume, vice-président de l’Afca, l’association des fabricants de compléments et fournisseurs d’additifs et ingrédients fonctionnels pour l’alimentation animale. « Leurs procédés de fabrication sont énergivores. Donc leur prix a été impacté par la hausse du prix de l’énergie. »
Moins d’offre pour le phosphore
C’est particulièrement marqué pour le phosphore. « Avant la hausse des prix de l’énergie, sur la période 2018-2019, le phosphore avait augmenté du fait de la raréfaction de l’offre suite à la faillite d’un des gros acteurs européens, rappelle Michel Layus, président de l’Afca. La fermeture des approvisionnements russes, la concurrence actuelle avec les engrais ont renforcé les tensions autour des phosphates. »
Il y a également de fortes hausses sur le cours du magnésium, car le processus de fabrication de la magnésie calcinée demande beaucoup d’énergie. C’est la même chose pour le sodium et le calcium, alors même que la matière première brute est peu chère et disponible.
Pour les oligoéléments et les vitamines, il n’y a pas de risque de pénurie mais les cours sont plus fluctuants. « Pour nos approvisionnements, nous sommes très dépendants de l’Asie, explique Michel Layus. Plus que le coût de fabrication, c’est le prix du transport maritime, voire les difficultés d’acheminement comme pendant le Covid, qui vont avoir des répercussions sur les cours. »
Réfléchir à produire en Europe
Malgré ces tensions sur les prix, les éleveurs n’ont pas à craindre de rupture d’approvisionnement pour la complémentation minérale et vitaminique de leurs animaux. Néanmoins, entre la crise sanitaire et les tensions géopolitiques actuelles, la mondialisation des approvisionnements interroge. « Les difficultés rencontrées pendant la crise du Covid ont remis en avant le sujet de la relocalisation, reconnaît Michel Layus. Il trouve un écho dans la volonté de nos entreprises d’intégrer plus de durabilité, de naturalité, de lien nutrition-santé, de réduire leur empreinte carbone. »
Des vitamines extraites de végétaux encore trop coûteuses
Pour le complexe minéral (phosphore, calcium, magnésium), l’approvisionnement en matière première est majoritairement européen. Pour les oligoéléments, zinc, cuivre, manganèse, comme pour les vitamines, une majorité de la fabrication est faite en Asie. D’autres sources d’approvisionnement sont étudiées, par exemple des vitamines extraites de végétaux. Leur coût est encore prohibitif.
S’il serait pertinent de relocaliser la production en Europe, le contexte énergétique vient compliquer la réflexion. Les process d’extraction et de fabrication des minéraux sont très énergivores. Or, actuellement, la Chine est beaucoup moins impactée que l’Europe par la hausse de l’énergie. « Cela améliore la compétitivité des fabrications chinoises, admet Michel Layus. Comme nos industries n’arriveront pas à produire au même coût, c’est un choix politique qui doit être fait à l’échelle européenne pour savoir si on veut relocaliser certaines fabrications, et comment. En attendant, les entreprises développent des alternatives et innovent. Ces nouvelles solutions sont de développement européen. »
À retenir
Les minéraux majeurs dont ont besoin les bovins sont : calcium, phosphore, magnésium, potassium, sodium, soufre.
S’y ajoutent des oligoéléments importants : cuivre, zinc, manganèse, iode, cobalt, sélénium.
La complémentation comprend aussi les vitamines essentielles A, D3 et E.
Maintenir la couverture des besoins
Pour alléger le coût de sa ration, il pourrait être tentant de diminuer la complémentation minérale. Mais « il faut toujours veiller à bien couvrir les besoins de ses animaux, car un déficit aura des conséquences à long terme sur la production, la reproduction et la santé », rappelle Romain Marie, responsable de projets stratégiques chez Néolait. Pour être sûr d’apporter la juste dose, il faut commencer par analyser l’ensemble de ses fourrages et calculer les apports en minéraux dans la ration. « Depuis 2016, nous proposons des minéraux formulés sur mesure pour complémenter parfaitement les fourrages de l’exploitation », témoigne Romain Marie. Les fabricants adaptent en permanence leur recette pour proposer le meilleur rapport efficacité/coût. Ils travaillent également sur la digestibilité et l’assimilabilité des minéraux pour que ce qui est apporté soit pleinement valorisé par l’animal.