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Relance du fret ferroviaire - un premier bilan positif… mais tout reste à faire !

Le temps presse si l'on veut atteindre en 2030 les objectifs de développement du fret ferroviaire en France, à savoir passer de 9 % à 18 % de parts de marché par un triplement du transport combiné rail-route.

De gauche à droite, Denis Choumert, président de l’Association des utilisateurs de transport de fret, Nicolas Gindt, directeur de la stratégie de Rail Logistics Europe, Paul Mazataud, directeur Fret de SNCF Réseau, Gilles Dansart, journaliste et directeur de Mobilettre, Franck Tuffereau, délégué général de l’Association française du rail, Ivan Stempezynski, président de Groupement national des transports combinés.
© Karine Floquet

« Le fret ferroviaire a quinze ans pour réagir et reprendre à la route les 9 à 10 % de part de marché, qui permettrait de doubler le transport de marchandises par le rail d’ici 2030 », a alerté Denis Choumert, président de l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF), lors d’une conférence à la Sitl (Semaine de l’innovation Transport & Logistique), qui s’est déroulée du 5 au 8 avril à Paris Nord Villepinte. Et d’expliquer : « Tout ce que l’on n’aura pas fait pour développer le fret ferroviaire d’ici quinze ans, on ne le fera plus parce que les entrepôts auront été créés près des autoroutes et des solutions de poids lourds électriques ou à l’hydrogène auront commencer à se mettre en place ».

Coordination, le maître mot

Pour atteindre les objectifs du plan de relance du fret ferroviaire, il est nécessaire de rapidement prioriser et programmer les actions à mener. « Si cette planification n’est pas faite dès maintenant, dans les trois années qui viennent, les entreprises continueront de s’installer en dehors des réseaux fluvial et ferroviaire. Sachant que ces créations d’entrepôts qui desservent le territoire à l’échelle régionale voire nationale, représentent des actifs dont l’amortissement s’étale sur quelques dizaines d’années, et qu’il sera difficile, techniquement et financièrement parlant, d’adapter ces sites au transport multimodal », souligne Denis Doumert. Un avis partagé par Ivan Stempezynski, président de Groupement national des transports combinés (GNTC) : « Au sein de l’alliance 4F (Fret ferroviaire français du futur), il nous paraît important de pouvoir se projeter au travers d’une loi de programmation, et d’en faire un véritable enjeu que l’Etat puisse gérer de manière pluriannuelle ».

« Quand on a plus de 72 actions établies dans une stratégie [ie la stratégie nationale de développement du fret ferroviaire], on comprend bien qu’il faut cibler celles qui nous semblent particulièrement importantes, en faire des priorités non seulement en termes d’efforts à produire, mais également en termes d’investissements », explique Nicolas Gindt, directeur de la stratégie de Rail Logistics Europe (ex TFMM, le pôle du Groupe SNCF réunissant l'ensemble des activités de fret et de logistique ferroviaires). Au travers de l’alliance 4F, les acteurs du fret ferroviaire militent pour cette deuxième phase d’investissement sur le réseau, à plus de 10 Md€ dans le cadre du plan France Relance, qui constitue « la condition sine qua non à la mise en œuvre ​​​du doublement de la part de marché du fret ferroviaire ».
 

Les plateformes logistiques, le nerf de la guerre

Au nombre des actions prioritaires à mener se trouvent les contournements de Paris et de Lyon, voire d’autres grandes villes, et le tunnel de base du mont d’Ambin, ouvrage majeur du projet de ligne ferroviaire transalpine entre Lyon en France et Turin en Italie. « Mais il faut veiller à assurer l’équilibre entre l’augmentation de la capacité en ligne et l’augmentation de la capacité dans les terminaux, tout particulièrement du côté des chantiers de transport combiné rail-route », s’inquiète Paul Mazataud, directeur Fret de SNCF Réseau.

Selon le directeur de la stratégie de Rail Logistics Europe, il est de fait nécessaire d’établir un schéma directeur concernant les terminaux de transport combiné rail-route. Selon l’Alliance 4F, quinze terminaux seraient nécessaires pour absorber la croissance du trafic envisagé. « Un triplement du combiné à horizon 2030 demande d’avoir les idées absolument claires sur le positionnement des futurs terminaux que l’on souhaite construire », affirme Nicolas Gindt. Et d’insister : « 2030 arrivant relativement vite, la mobilisation des financements [cf. encadré], puis le développement et la réalisation des investissements, qui nous semblent nécessaires, doivent être maintenant décidés »
 

Le transport ferroviaire conventionnel, un paramètre à ne pas négliger

Si le doublement de fret ferroviaire à l’horizon 2030 passera par le triplement du transport combiné rail-route - un système réputé « industriel, dense et performant économiquement », selon Nicolas Gindt -, le conventionnel a sa partition à jouer dans ce projet ambitieux.

Un premier axe de développement du conventionnel consiste à conserver la capacité de trafic existante, en entretenant et en modernisant les voies de service, les faisceaux des gares de triage et autres capillaires de fret. « Aujourd’hui, le conventionnel est, dans 50 % des cas, au bout ou au départ d’une ligne du réseau secondaire », rappelle Nicolas Gindt. « De ce point de vue, on peut vraiment se réjouir que le plan France Relance, actuellement mis en œuvre, va nous permettre à brève échéance de sauvegarder cette capacité », souligne le directeur Fret de SNCF Réseau.

Parallèlement, à infrastructure constante, on peut optimiser la capacité, la répartir plus harmonieusement : entre les différents chargeurs ; entre les travaux, le fret et les voyageurs ; au sein du fret, entre transport combiné et transport conventionnel.  « On peut faire en sorte que cela soit plus numérique, parfois plus automatique, pour fluidifier les demandes de capacités. Mais également, plus interopérable. Il faut savoir qu’aujourd’hui 40 % du fret ferroviaire français traverse une frontière, dans les prochaines années on pourrait dépasser les 50 % », détaille Paul Mazataud. Ce levier a le mérite de pouvoir être développé à court terme. « Pour SNCF Réseau, il paraît indispensable et accessible (en termes d’investissement financier et humain), pour accroître l’offre qui répondra à l’augmentation de la demande », argumente-t-il. 

 

Vers un cofinancement des terminaux multimodaux

« Est-ce que SNCF Réseau est le seul à devoir supporter la mise en œuvre des nouveaux terminaux et la mise à niveau des terminaux existants ? Nous pensons que non », affirme Ivan Stempezynski, président de Groupement national des transports combinés (GNTC), qui explique : « Nous pensons que nous pouvons aider SNCF Réseau à se concentrer sur le réseau pur, c’est-à-dire l’acheminement, et que le reste peut être ouvert à des initiatives, à des capitaux, privés et autres. Des montages [financiers] sont à imaginer pour partager les risques et les enjeux, et surtout gagner la course contre la montre ».
Dans ce cadre, les chargeurs seraient-ils disposés à participer au développement de ces terminaux ? « Si l’on parle d’investir dans les terminaux, je ne suis pas sûr. Mais, en revanche, s’il s’agit de faire en sorte qu’autour de terminaux, il y ait des écosystèmes industriels, en partie opéré par des chargeurs sur du stockage et du parachèvement, c’est certain. Les futurs terminaux doivent se situer dans cette logique et cette dynamique », répond Denis Choumert, président de l’Association des utilisateurs de transport de fret.
Il faut noter que les chargeurs sont déjà sollicités pour participer financièrement au maintien de voies capillaires desservant leurs sites embranchés. « Ces derniers temps, un certain nombre d’initiatives concernant la rénovation de voies capillaires a permis de faire participer différentes parties prenantes, autre que SNCF Réseau qui est en responsabilité sur ce type d’investissement », rappelle Nicolas Gindt, directeur de la stratégie de Rail Logistics Europe. Et de conclure : « Il peut y avoir un élargissement à des acteurs qui soient clients, chargeurs ou collectivités locales. C’est important pour l’avenir, afin de rendre le système un peu plus fluide et dynamique ».

 

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