Engrais azotés
L’exploitation du gaz de schiste en France induirait une baisse des tarifs
Le coût du gaz naturel, qui représente 60 % du prix de vente des engrais azotés, pourrait ainsi être dévisé par trois par rapport au cours actuel.
« Nous allons rouvrir le dossier du gaz de schiste à la rentrée », avait annoncé François Hollande avant le premier tour des élections présidentielles. Une déclaration que l’économiste Philippe Chalmin avait souligné lors de l’Assemblée générale de l’Union des industries de la fertilisation (Unifa) en juin dernier. Le candidat du parti socialiste a en effet déclaré le 29 février 2012 sur RTL qu’« il ne faut jamais rien écarter, surtout si des recherches démontrent qu’on peut obtenir ce gaz sans nuire à la nature ». Si les dernières déclarations ministérielles sont loin d’être unanimes, le président de la République ne ferme donc pas la porte au gaz de schiste, qui apparaît comme une opportunité pour les fabricants d’engrais azotés. Selon l’Unifa, le coût de ce gaz non conventionnel en Europe – « si l’on tient compte des standards environnementaux en vigueur », précise son délégué général Gilles Poidevin – serait de 3 $/MBtu rendu usine. Un chiffre à rapprocher des 9 $/MBtu qui correspondent au prix moyen du gaz naturel actuellement sur le marché européen (cf. n° 3955).
Un potentiel à confirmer...
La France est considérée, avec 5.100 Mdm3, comme le second pays européen en terme de dotation en gaz de schiste, juste derrière la Pologne (5.300 Mdm3) et devant la Grande-Bretagne (600 Mdm3). Des estimations font état d’« une centaine d’année de consommation en France », selon le délégué général. Dans ce contexte, l’Unifa souhaiterait qu’« au moins des recherches soient effectuées pour savoir, premièrement, s’il y a vraiment du gaz de schiste sous nos pieds. Et deuxièmement, si l’on peut l’exploiter dans de bonnes conditions environnementales ».
« Mais gare aux désillusions comme en Pologne », avertit Philippe Chalmin. Les premiers résultats de recherche montrent en effet que les réserves en gaz de schiste polonais seraient, effectivement, de 5,5 fois supérieures au gaz conventionnel mais, qu’à eux deux, ils suffiraient à satisfaire la demande du marché local en gaz naturel pour un maximum de soixante-cinq ans.
... mais un blocage environnemental
Les travaux exploratoires ne sont pas encore engagés sur notre territoire, car « le gaz de schiste est victime d’un blocage environnemental en France », déclare Philippe Chalmin. Et d’ajouter :« Nous possédons un énorme potentiel. Simplement, jusqu’à maintenant, l’écologiquement correct prime largement sur la raison économique. »
Pourtant, « les risques sont extrêmement faibles », affirme l’économiste... À condition que l’exploitation des gaz de schiste soit effectuée dans le respect de certaines règles de base, insiste Brian Horsfield, chef de projet du consortium Gash*. « Il existe un risque de contaminer les nappes phréatiques si la fracturation hydraulique de la roche n’est pas réalisée dans de bonnes conditions. De même, des métaux lourds initialement contenus dans la roche peuvent remonter en surface. » Aussi, avant toute campagne d’extraction, une parfaite connaissance du sous-sol et de la localisation des gisements par rapport aux nappes phréatiques doit être exigée, conclut-il.
Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a laissé entendre, début juillet, que ce dossier allait être étudié à l’automne. Mais, le 20 juillet, la ministre de l’Ecologie et de l’Energie, Delphine Batho, a été catégorique sur BFMTV : « le gouvernement maintient clairement et nettement l’interdiction d’exploitation des gaz de schiste, car nulle part dans le monde il n’a été prouvé que cette exploitation pouvait se faire sans dégâts considérables sur l’environnement et avec des risques important pour la santé ».
* Débuté en 2009, Gash (pour Gas Schale, schiste gazéifères) est un projet de recherche européen sur la formation du gaz de schiste et les propriétés de la roche, ayant pour vocation à terme de mieux les localiser et les extraire.