Les États-Unis et le G8 relancent les espoirs d’un accord à l’OMC
En se déclarant prêt à « modifier leur offre sur les subventions nationales à l’agriculture » sous conditions, le gouvernement américain retend la main à l’UE et au G20, dans le but de parvenir à un accord « ambitieux »
Après avoir été isolés, notamment lors des dernières négociations à Genève, les États-Unis se montrent enclin à revoir leur position en réajustant à la baisse les mesures de soutien accordées à leurs agriculteurs. Toutefois, cette éventualité n’est pas sans conditions. Les États-Unis attendent des pays en voie de développement un meilleur accès à leur marché et de l’Union européenne une réduction des aides destinées à leurs exploitants.
Vers un sauvetage de l’accord
« La semaine dernière, les États-Unis ont signalé plus d’une fois leur disposition à modifier leur offre sur les subventions. Est-ce que nos partenaires ne l’ont pas entendu, ou n’ont-ils pas voulu comprendre que cette disposition est liée à l’exigence d’un accès au marché plus important ? », s’est interrogé Susan Schwab, la réprésente pour le Commerce des États-Unis.
Pourtant, selon les commissaires européens à l’Agriculture et au Commerce, Peter Mandelson et Mariann Fischer Boel, qui s’exprimaient sur le bilan des pourparlers ministériels de Genève, « l’incapacité des États-Unis à s’engager a été le principal obstacle à toute négociation ». En effet, malgré un rapprochement de l’UE vers le groupe du G20, mené par le Brésil, les Américains, par la voix de Susan Schwab, se sont surtout employés, à Genève, à réclamer davantage d’effort sur l’accès au marché et à refuser toute remise en question des subventions à leurs producteurs. « Le jargon de l’OMC parle de boîte orange, de boîte bleue et de boîte verte, mais quand il s’agit des exemptions à davantage d’accès au marché, on peut parler de boîte noire », a lâché la représentante des États-Unis, non sans ironie. Dénonçant par là les protections que constituent les produits sensibles pour les pays développés, les produits spéciaux, le traitement spécial et différencié, et les mécanismes de sauvegade spéciale pour les pays en développement.
Avec sa déclaration du 7 juillet, la représentante américaine au Commerce rouvre la voie des négociations. Les États-Unis se sont toutefois bien gardés d’évoquer le moindre chiffre concernant leur offre, invitant l’UE et le G20 à s’exposer pour débloquer les négociations. « Les États-Unis ne vont certainement pas réduire tout seul leurs subventions nationales à l’agriculture », a annoncé Susan Schwab, avant d’ajouter : « Nous n’avons pas l’intention d’abandonner, mais nous voulons que les autres apportent leur contribution. » À bon entendeur…
Côté français, la position outre-Atlantique a été bien accueillie. Au lendemain de l’annonce de Susan Schwab, la ministre française déléguée au Commerce, Christine Lagarde, s’est « réjouie de voir une souplesse et une évolution de la position américaine (…). Mais on attend de voir sur pièces car on a déjà eu dans le passé des annonces, des indications de mouvement, sans que cela se soit véritablement concrétisé en pratique », a-t-elle tempéré.
Le G8, la réunion de la dernière chance ?
Parallèlement à Susan Schwab, le président des États-Unis, Georges W. Bush, qui « se prépare à aller au G8 », a promis que « l’un des sujets discuté sera le cycle de Doha de l’OMC » lors de la prochaine réunion qui se tiendra à Saint-Petersbourg à partir du 15 juillet. Plusieurs pays ont salué cette invitation à avancer sur les négociations de l’OMC lors de cette réunion, à commencer par le Brésil. « Nous sommes bloqués. Il serait temps que les chefs d’État prennent les choses en main», a estimé un diplomate brésilien, reconnaissant toutefois qu’ « ils ne devront pas parler de chiffres mais dire simplement que le coût d’un échec serait trop élevé pour l’économie mondiale ».
Le président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, a fait savoir qu’il tentera, à Saint Petersbourg, de réunir les positions des dirigeants des pays riches à celles des pays émergents du G20 pour parvenir à un accord. « Nous vivons des moments décisifs », a t-il déclaré. Même tendance pour Tony Blair qui estime que « les deux prochaines semaines seront absolument critiques, notamment en amont de la réunion des pays du G8 ». De son côté, Peter Mandelson, le Commissaire européen, a déclaré que le sommet du G8 n’était pas le lieu « approprié » pour parvenir à un accord.
Enfin, la présence du président français, Jacques Chirac à la réunion du G8, sera peut-être la clé des négociations de l’OMC. « Chirac est une partie de la solution », aurait noté en substance un diplomate.