Christophe Lecuyer
« Les coopératives doivent s’assurer que la sole de blé bio n’explose pas ! »
Échanges avec le nouveau président de la commission Filières biologiques de Coop de France.
« Aujourd’hui, on se rapproche de l’autosuffisance en blé tendre meunier biologique en France », souligne Christophe Lecuyer, le nouveau président de la commission Filières biologiques de Coop de France. Face au prochain croisement des courbes de production et de consommation, nous essayons de mettre en garde les coopératives car il ne faudrait pas que le marché s’écroule comme en 2004-2005 », ce qui impliquerait une moindre valorisation et pourrait démobiliser les agriculteurs bio. Les cours du blé tendre meunier AB étaient alors passés en dessous de la barre des 300 €/t contre 430 €/t aujour-d’hui, selon l’his-torique des cotations de grains biologiques de La Dépêche/Le Petit meunier. « Sur le court terme, nous conseillons aux opérateurs de bien alloter leur récolte 2013 et de différencier les blés tendres de force, meunier et fourrager. À moyen terme, le mot d’ordre auprès des adhérents des coopératives est de faire en sorte que les surfaces en blé tendre n’explosent pas et de privilégier les cultures dont on a fortement besoin, comme les protéagineux. » La nutrition animale bio importe « l’équivalent de 35.000 t/an de soja, qui reste la protéine phare de l’alimentation des volailles ».
Des importations de blé tendre meunier importantes
Bien que les disponibilités en blé tendre s’accroissent, « le marché est soumis à des importations, principalement en qualité meunière ». Tous débouchés confondus, elles demeurent importantes, « bien qu’elles aient régressé par rapport à la campagne précédente ». Ce poste s’élèverait à 24.500 tonnes pour 2012/2013 (soit environ 20 % des utilisations), contre 40.000 t en 2011/2012 (34 %), selon le dernier bilan prévisionnel diffusé par FranceAgriMer en février. « Comme la collecte nationale était insuffisante, des habitudes ont été prises », commente le président Filières bio de Coop de France. « Des marchés de farines bio ont été développés en France à partir de blés provenant des pays de l’Est de l’Europe (UE et hors UE). » La baisse des importations, enregistrée cette campagne, s’explique par de plus faibles disponibilités dans ces États, victimes d’une météorologie défavorable. Et non par une moindre demande.
« Il faut arriver à faire en sorte que les importations diminuent. Mais ce n’est pas forcément facile, car les blés achetés outre-frontières sont à des prix nettement moins élevés que l’origine française, et présentent une haute valeur protéique, qui répond à des besoins très spécifiques comme la viennoiserie. Des qualités que nous avons du mal à produire. » Christophe Lecuyer reconnaît qu’« un travail de filière est nécessaire pour améliorer les bilans futurs, de façon à ce que l’ensemble des meuniers utilisent en priorité les blés français ».
En attendant, le président « espère qu’il se fasse le moins possible d’importations sur la prochaine campagne, au vu du bilan qui se profile ». « Notre analyse nous amène à croire qu’en blé tendre biologique, il se rééquilibrera sur 2013/2014, pourvu que les organismes stockeurs jouent le jeu de la segmentation de la collecte et soient en mesure de répondre aux attentes de la meunerie et des fabricants d’aliments pour animaux », explique Clément Lepeule, chargé de mission Filières biologiques de Coop de France.
Le bio, une agriculture qui demande à être soutenue
Concernant le programme national “Ambition bio 2017” (cf. encadré), la coopération, « partie prenante » de son élaboration, précise Christophe Lecuyer, met l’accent sur trois volets : la production, les filières et la consommation. « Nous voulons que le soutien à la production continue à travers des aides et des mesures incitatives. » La transmission des terre bio est également un sujet de préoccupation de Coop de France. « Il faut faire en sorte qu’en l’absence de successeur direct, les terres converties demeurent bio », insiste-t-il. « Il est par ailleurs nécessaire de maintenir les fonds Avenir bio, gérés par l’Agence bio, pour la structuration des filières régionales et interrégionales. » Enfin, « un objectif de consommation en restauration collective doit être maintenu ».