Colza
Le point sur les négociations relatives à la base 42
Les vendeurs infirment l’existence d’un accord avec Saipol, mais acceptent une évolution de la demande.
Les représentants des organismes stockeurs, la Fédération du négoce agricole (FNA) et Coop de France (CdF), contestent avoir passé un accord avec l’industriel Saipol concernant le passage des négociations de contrats de colza sur le marché physique, de la base 40 % d’huile à la base 42 % d’huile à partir de la récolte 2019. Néanmoins, CdF et la FNA admettent une évolution de la demande nationale et mondiale, et la nécessité de s’y adapter.
Nécessaire prise en compte la hausse de la demande en protéines
« Il n’y a pas eu "accord" entre des acteurs du marché pour passer en base 42 lors de la récolte 2019. Néanmoins, il y a un constat commun d’une évolution de la demande du marché. Différents industriels demandent de revoir la façon dont se constituent les prix de la graine », témoigne Vincent Magdelaine, directeur de CdF Métiers du grain. Dans le détail, ce dernier note que les demandes mondiale et nationale s’orientent de plus en plus vers la protéine, et moins vers l’huile, d’où la nécessité de s’adapter. « Il faut un rééquilibrage entre la demande en huile et la demande en protéine. Cette dernière est de plus en plus valorisée. » La Fop, par la voix de Thibault Ledermann, responsable des relations terrain, a confirmé souhaiter « une rémunération plus équitable de la qualité de la graine, comprenant le taux de protéine ».
Un contexte actuel difficile pour les triturateurs européens
Concernant la FNA, « il ne peut y avoir accord entre une fédération professionnelle et un acteur économique en particulier. Actuellement, les fournisseurs peuvent contractualiser avec Saipol en base 40 ou en base 42. […] Tant qu’il n’y a pas de modification du contrat Euronext, il ne peut y avoir changement sur le marché physique », tempère Sébastien Picardat, directeur général de la FNA. Néanmoins, ce dernier indique : « Nous ne nous opposerons pas, a priori, à un passage en base 42 pour la récolte 2019 concernant les contrats Euronext et, par ricochet, sur le marché physique. […] Les producteurs français ne peuvent pas se permettre de perdre l’outil industriel qu’est Saipol. » Ce dernier admet le contexte difficile pour les industriels, à savoir la baisse de leurs marges, le fait que divers pays dans le monde (dont le Canada) négocient en base 42, la volonté actuelle de la Commission européenne de diviser par deux l’incorporation d’huiles végétales dans les carburants à l’horizon 2030… Ajoutons à cela l’évolution de la recherche génétique française, permettant aux graines d’atteindre aisément les 42 % d’huile, souligne Sébastien Picardat.
Contacté, Saipol n’a pas souhaité réagir pour le moment. Plusieurs questions restent en suspens. La première concerne un éventuel changement du contrat Euronext. « Une réunion entre la bourse européenne et les représentants de la filière, incluant Cyril Durriez, président de la commission Commerce des grains au sein de la FNA, aura lieu le 25 avril », explique Sébastien Picardat. CdF participera également à cette réunion, indiquent Anne-Laure Paumier, directrice adjointe de Coop de France Métiers du grain, et Vincent Magdelaine. À l’issue de cette réunion, l’échéance août 2019 ou novembre 2019 sur Euronext pourrait se négocier en base 42. La bourse européenne a également confirmé la tenue de cette réunion, sans plus de commentaire.
L’Allemagne acceptera-t-elle la base 42 ?
Une autre question concerne les autres pays européens, et surtout l’Allemagne, premier producteur de colza de l’UE, opérant sur le marché à terme. Les acteurs locaux continuent, comme en France, de négocier en base 40 sur le marché physique. « Euronext devra prendre en compte les pratiques et les attentes des autres utilisateurs du contrat à terme, notamment l’Allemagne, amis aussi d’autres pays européens, pour prendre sa décision », précise Vincent Magdelaine. « Certains opérateurs en Allemagne seraient d’accord pour passer en base 42, d’autres non », renchérit Sébastien Picardat.
Dernière question, les importations de colza étranger. Si passage en base 42 il y a, cela permettrait, certes, de s’aligner sur la concurrence mondiale, et canadienne notamment, « mais c’est le marché qui décidera si les achats extérieurs s’avéreront plus intéressants pour les industriels ou non », explique Anne-Laure Paumier. Ainsi, l’éventuel changement de base ne freinera pas forcément l’importation de colza étranger.