Assurances
Craignant un froid estival, les brasseurs se couvrent pour garantir leurs résultats
La diffusion croissante d’outils de couverture permet aux transformateurs de se soustraire aux contraintes climatiques impactant leurs ventes
SI COUVRIR ses achats sur les marchés à terme est une chose courante pour les transformateurs de matières premières agricoles, il n’en reste pas moins que les volumes de vente demeurent dépendants des besoins exprimés par les consommateurs. Ils subissent aussi, selon les produits, l’influence de différents facteurs. Ainsi, « la corrélation entre le volume de ventes de bières et la température moyenne est très forte », explique Didier Marteau, spécialiste des dérivées climatiques chez Aon Assurances, qui travaille depuis plusieurs années avec des industriels souhaitant se prémunir contre ce type de risques.
Un marché des températures
Les contrats à terme permettent de coter les matières premières sur des marchés organisés, et aident aussi les industriels à couvrir leurs achats des risques liés aux variations de prix. Prenant exemple sur ce type de couverture, un marché des températures s’est mis en place pour couvrir les risques climatiques. Actuellement, seul le Chicago Mercantile Exchange permet de coter la température en tant qu’actif sous-jacent. Ainsi, une vingtaine de villes dans le monde, dont neuf en Europe, sont enregistrées sur ce type de couverture, parmi lesquelles Paris, Londres, Berlin, Madrid, Stockholm… Selon les secteurs, l’incidence de la variabilité climatique sur les résultats d’exploitation est parfois plus déterminante que les aspects financiers (taux d’intérêts ou de changes). C’est notamment le cas de la brasserie, qui assure des débouchés pour les cultures d’orges.
Une activité brassicole corrélée aux conditions météorologiques
Les outils de couverture, tels que les dérivés climatiques, sont d’une utilité croissante pour les industries de transformation. Déjà confrontées, en amont, à la volatilité des matières premières, elles cherchent à garantir, en aval, leurs résultats financiers. Selon Didier Marteau, « une variation d’1°C durant l’été peut faire progresser ou chuter les volumes de bière vendus de 7,5 %. »
Ainsi, pour un brasseur, la couverture d’un risque de faibles températures, potentiellement néfaste pour ses volumes d’activité, est d’une importance première. C’est en vendant à terme un contrat sur une température donnée dans une ville donnée, qu’un brassseur pourra, à échéance du contrat, racheter sa position. Il réalisera une plus-value si la température moyenne observée est inférieure à celle contractée initialement. Les gains ainsi réalisés permettront de compenser les pertes générées par une moindre consommation de bière.
La valeur d’un degré fixée à 100.000 € sur le marché des dérivés climatiques
Prenons l’exemple d’un brasseur qui vend aujourd’hui à terme une température de 23°C à Madrid pour une échéance en août. Si la température moyenne observée fin août est de 18°C, il pourra déboucler sa position en la rachetant à 18. L’ayant vendu 23, il réalise un gain de 5°C.
Si l’on exprime ceci sous forme monétaire, la valeur d’un degré étant de 100.000€, le brasseur empochera 500.000€ permettant de compenser les pertes d’exploitation associées à un été frais.
L’agroalimentaire parmi les secteurs les plus exposés
Selon Didier Marteau, « la volatilité mensuelle des températures en été approche les 10 %. Donc, pour une température moyenne de 22°C au mois d’août, les bornes sont situées entre 20 et 24°C. Un écart majeur pour des secteurs comme l’agriculture, l’agroalimentaire, le tourisme, les loisirs, le textile, l’énergie et la construction, qui à eux seuls représentent près de 50 % du PIB français. » Le climat a donc une influence non négligeable sur l’économie, et notamment agricole.