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Congrès FNSEA : fonds agricole et message pro constitution au menu

Le syndicat se rapproche de la logique d’entreprise en adoptant dans son rapport d’orientation la notion de fonds agricole et de cessabilité du bail rural.

UN CONGRES D’EXCEPTION. Organisée du 22 au 24 mars au Mans, la traditionnelle réunion de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles a vu son rapport d’orientation adopté dans des conditions inédites avec les abstentions de deux membres du bureau et d’un des rapporteurs du texte. Inédite aussi, la venue des principaux représentants politiques français ainsi que du Premier ministre, en défenseurs de la constitution européenne qui a marqué la dernière journée du congrès.

Le rapport d’orientation jugé trop «libéral» ne fait pas l’unanimité

Après trois heures sur la seule notion de «fonds agricole», l’assemblée a finalement adopté un rapport d’orientation pour le moins controversé. Intitulé “Pour des entreprises au service des hommes”, ce texte se montre favorable au statut d’entreprise pour l’exploitation agricole. Aucun amendement n’a porté sur la notion de «fonds agricole». Selon la FNSEA, le texte proposé l’avait déjà intégré. Il définit le fond agricole comme «la reconnaissance de l’entreprise en tant qu’unité économique constituée de biens corporels et incorporels et devant faire l’objet d’une évaluation globale». Une définition qui a cristallisé toutes les angoisses des congressistes, qui y voient un pas supplémentaire vers le libéralisme. Jean-Bernard Bayard, le présentateur du rapport, s’en est défendu : «C’est une approche entrepreneuriale. Nous ne sommes pas dans un schéma ultralibéral.» Toujours est-il que le rapport a été adopté avec quinze voix contre, et quarante abstentions. Et fait exceptionnel, parmi ces dernières, trois membres du bureau, Pascal Ferey, Christian Decercle et Jean-Luc Bidal qui a lui même participer à l’élaboration du rapport. Autre déconvenue, le départ du vice-président du syndicat, Pascal Coste, pour qui cette orientation est «libérale et suicidaire». En marge du congrès, il a regretté que «le pouvoir de la FNSEA soit de plus en plus aux mains des administratifs qui entretiennent une collusion avec les pouvoirs publics». Et pour cause, la Loi d’orientation agricole à venir prévoit justement de créer le fonds agricole ainsi que la cessibilité du bail. Également présente dans le rapport d’orientation, cette perspective a aussi été sujette à de vifs débats. Certains craignent que cette mesure ne vienne remettre en cause le statut du fermage et entraîner la hausse des loyers. Ce à quoi les orateurs ont promis qu’aucune dérogation au bail rural ne serait acceptable. Toutefois, Jean-Luc Bidal a estimé «qu’on ne peut pas parler d’agriculture d’entreprise et ne pas rendre le bail cessible».

Forte représentation des partisans du oui chez les politiques invités

Si la FNSEA a encore rappelé l’absence de consigne de vote concernant la constitution européenne, elle a tout de même accueilli une délégation de politiques de tout bord, venue défendre leur position sur ce texte et, de fait, le oui. Au vu des derniers sondages réalisées (celui de l’institut Ifop donnant un non majoritaire à 69 % en suffrages exprimés, confirmé par un second sondage réalisé par Terre-net et diffusé le 29 mars), le monde agricole serait a priori contre le texte constitutionnel.

A l’exception d’Alain Boquet du Parti communiste français (PCF), tous ont vivement défendu le projet de Valéry Giscard d’Estaing. Ils ont dans ce but largement joué sur les peurs des congressistes en les mettant en garde contre les conséquences d’un rejet français du texte. Nicolas Sarkozy a déclaré à l’assistance que pour «changer l’Europe» et être «mieux défendus», il fallait voter oui au référendum. «Qui vous défendra mieux, une Europe du grand marché économique, avec une vision anglo-saxonne, ou une Europe politique qui déciderait de la préférence communautaire ?», a ajouté le président de l’UMP, avant de préciser sa préférence pour le second modèle. Il a également insisté sur l’intérêt pour les agriculteurs d’être mieux représentés au niveau européen dans le cadre des négociations commerciales : «Qui sera le plus efficace pour défendre vos intérêts devant l’OMC ? Un Commissaire européen nommé pour cinq ans, n’ayant de compte à rendre qu’à son collège, ou le Président de l’UE, élu pour deux ans et demi, qui sait ce que c’est de gagner une élection ou de la perdre et qui devra rendre des comptes ?»

Même substance chez François Bayrou, président de l’UDF : «Si nous répondons non, ma conviction c’est que l’Europe sera moins entendue autour de la table du cycle de Doha.» Il a aussi évoqué l’incidence de la victoire du non sur la Politique agricole commune : «la variable d’ajustement est toute trouvée, ce sera le budget de la Pac», a t-il assuré, expliquant que la France perdrait son «influence» sur celle-ci si le non l’emportait.

Du côté du Parti socialiste, François Hollande a défendu comme ses adversaires traditionnels, le vote en faveur de la constitution. Pour le numéro un du PS, les agriculteurs ont besoin d’une «France forte» et donc d’un «oui français à la constitution européenne pour défendre les acquis de la Pac». Il a ajouté que si un jour celle ci devait être renégociée «il vaut mieux que l’Europe soit solide et que la France soit forte» pour éviter toute tentation de renationalisation.

Alain Boquet, qui portait la voix du PCF, a été le premier à s’exprimer sur la constitution européenne dont il était l’unique détracteur. Pour lui «la vague du non est une lame de fond», ajoutant que «citoyens et agriculteurs sont sur le même plateau de la balance». Il a fustigé le caractère libéral du texte et a reçu de nombreux applaudissements en dénonçant la grande distribution. «Que peuvent près de 600.000 exploitants face à six enseignes bien organisées ? Il faut sortir l’agriculture de la spirale de la baisse des prix», a t-il martelé.

Le Premier ministre est venu conclure cette série d’interventions en se prononçant pour le oui comme la majorité des intervenants. «Plus la voix de la France sera forte en Europe, plus la politique agricole commune sera défendue», a déclaré Jean-Pierre Raffarin. Lucide, il a toutefois reconnu que le résultat du vote était «incertain».

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