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Présidentielle
Ce que souhaitent les petits candidats

Le congrès de la FNSEA a permis aux outsiders de la présidentielle de détailler leur projet pour améliorer la situation de l’agriculture française.

Les interventions de François Fillon, de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron n’ont guère offert de surprises lors du congrès de la FNSEA à Brest le 30 mars. Les non-favoris de cette présidentielle ont saisi l’occasion de mettre en lumière leurs projets pour les filières agricoles et agroalimentaires hexagonales. Les candidats Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon, Nathalie Arthaud et Philippe Poutou n’étaient pas présents.

François Asselineau, expert des textes européens… qui souhaite le Frexit

Le fondateur de l’UPR (Union populaire républicaine), François Asselineau, fut le premier intervenant. Sa prise de parole a suivi les discours d’introduction des représentants de la profession agricole française, qui mettaient l’accent sur la nécessité, pour l’Hexagone et ses agriculteurs, de rester dans l’Union européenne. Le candidat les a pris totalement à contre-pied, estimant que Bruxelles était justement le principal coupable de la perte de compétitivité de notre secteur agricole et agroalimentaire. « L’article 39 de la constitution européenne n’a pas changé depuis 60 ans, et indique que l’objectif principal de la Politique agricole commune (Pac) est d’augmenter constamment la productivité de l’agriculture […] Nous assistons donc à une course à la production, avec Bruxelles qui souhaite des grandes plaines de cultures, à l’image du Saskatchewan (Canada) », responsable selon lui de la baisse des prix des matières premières agricoles. Ensuite, « l’article 16 permet l’accaparement des terres par des fonds étrangers, en illustre les 1 700 ha de terres céréalières acquises par un fonds chinois. Mais si un Français veut acquérir des terres agricoles en Chine, la réponse des autorités locales sera non ! L’ouverture des marchés est donc asymétrique ». Le candidat dénonce également « l’article 106, obligeant la privatisation des services publics dans les zones rurales », l’article 121, « qui confie à Bruxelles le pouvoir de donner les grandes orientations économiques des pays européens, déjà décidées pour 2017/2018. À quelle sauce les Français seront-ils mangés ? ».

François Asselineau propose de nationaliser la Pac, et de refuser les traités internationaux type Tafta, « affectant la compétitivité de la France ». Il promet de maintenir les aides versées aux agriculteurs, avec pour but de rétablir la viabilité des fermes familiales. « Les 9,1 Md€/an reçus par les agriculteurs français de la Commission viennent en réalité des Français. L’UE n’est qu’une machine qui aspire et refoule l’argent. Nous versons au total 23 Md€/an, et nous en recevons 14. […] Nous subventionnons l’agriculture des concurrents de l’Europe de l’Est ! ». Michel Prugue, président de Coop de France, lui rappelle que « l’UE, c’est la paix ! ». Ce à quoi François Asselineau répond « l’article 42 de la constitution européenne indique que la diplomatie et la sécurité de l’Europe des 28 sont totalement déléguées à l’Otan, qui nous a embarqués dans le conflit avec la Russie, générant la crise agricole que l’on a connue ».

Nicolas Dupont-Aignan : dernière chance pour l’UE

Le candidat du mouvement “Debout la France”, Nicolas Dupont-Aignan, veut faire accepter à Bruxelles de revenir à la Pac d’avant la réforme de 1992. Sans quoi, « la France claquera la porte ». « Il faut des organisations communes de marché, des prix garantis, minimum et maximum, des quotas, refuser les traités de libre-échange scandaleux ». Il dénonce également les travailleurs détachés, « provoquant une concurrence déloyale entre la France et les autres pays européens : l’Allemagne et ses travailleurs de l’Europe de l’Est, sans oublier l’Italie, l’Espagne… ». Nicolas Dupont-Aignan promet d’assainir la dette des agriculteurs, en créant « un fond de relocalisation de 10 Md€/an », qui servira également ces derniers à se moderniser. Il souhaite « stopper la surtransposition des normes, et privilégier les circuits courts, en obligeant les cantines publiques à se fournir à 75 % de produits d’origine française au minimum ». Il veut que les relations avec la grande distribution soient revues, au bénéfice de l’amont. Côté fiscalité, il projette de diviser par deux l’impôt sur les sociétés, de supprimer les cotisations sociales des agriculteurs et de la remplacer par une petite taxe sur la distribution, mais exclut un recours à la TVA sociale. Le candidat est contre la suppression du principe de précaution. « Ce principe n’est pas un problème en soi. C’est sa mauvaise interprétation, qui engendre un blocage de la recherche ». Enfin, il s’engage à donner accès au haut débit aux petites communes et aux milieux ruraux, par l’intermédiaire d’un renforcement des services publics.

Jean Lasalle, le cœur qui parle

L’ancien membre du Modem, Jean Lasalle, a laissé parler son cœur d’ancien agriculteur reconverti à la politique. Beaucoup de lyrisme dans ses propos, faisant valoir « la nécessité de retrouver cette tradition charnelle entre la terre et l’homme… », faisant l’éloge de l’agriculture, « le premier des métiers du monde […] la plus grande réserve de bon sens, de savoir-faire, de savoir être. […] Il faut avoir éprouvé le frisson de voir la première culture, la première pousse émerger du sol, de voir pointer le bout du nez du veau… ». Côté mesures concrètes, c’est un peu plus éthéré. Le candidat s’est contenté de dénoncer « la course aux prix bas », la nécessité de « refaire une Pac efficace […] sans proposer de Frexit », de favoriser « le retour de la famille sur l’exploitation, […] l’irrigation ». Il a promis « un salaire au/à la conjoint(e) du paysan » et de « transmettre les connaissances », en faisant en sorte que « les enfants de l’école de la république visitent au moins une fois par mois une exploitation agricole, un artisan, une entreprise… ». Aucun budget, ni stratégie pour appliquer ces mesures, n’a été présenté.

Jacques Cheminade, en croisade contre la finance

Le fondateur du mouvement “Solidarité et progrès”, Jacques Cheminade, veut « combattre la dictature de la finance ». Selon lui, les crises agricoles et politiques sont l’engeance « de la soumission financière ». Il projette d’interdire « l’activité de spéculation des méga banques sur les matières premières agricoles ». Le candidat souhaite « multiplier les circuits courts, organiser un moratoire et une restructuration de la dette des agriculteurs, mettre en place des prix planchers garantis ». Le candidat compte mettre en œuvre « une économie mondiale gagnante gagnante », négocier avec les pays du BRICS, ne pas passer d’accords type Ceta et Tafta, et lever les sanctions contre la Russie. Concernant le modèle agricole, « il faut arrêter d’opposer les types d’agriculture, il y a de la place pour tout le monde : le raisonné, le bio, les grandes exploitations pour l’exportation… ». Il prône « une Pac intelligemment protectrice d’État-Nation, des mécanismes d’assurances sur les prix et quantités, des aides alimentaires » et propose « 10 Md€ d’aides aux agriculteurs sur un an », et l’harmonisation « des règlements entre les pays européens ». Côté fiscalité, le candidat est favorable à la création d’une épargne défiscalisée, la mise en place d’une TVA sociale, et la suppression « des cotisations maladie et famille ». Il déclare que « l’accès au numérique doit être un service public », et promet de « sauver les semenciers, le recours au New breeding technologies ». Concernant la LME, il promet de s’attaquer au « pouvoir de la grande distribution et de ses quatre grandes centrales d’achats ».

Applaudimètre : François Fillon, le gagnant, suivi d’Emmanuel Macron et de… Jean Lasalle

L’ambiance du congrès de la FNSEA dans la Brest Arena était respectueuse : beaucoup d’applaudissements, très peu de sifflets. Si on devait faire un classement de l’applaudimètre, le candidat LR, François Fillon, en est le vainqueur, suivi d’Emmanuel Macron et de Jean Lasalle. Les autres candidats ont été écoutés dans le calme.

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