« La qualité du foin passe par la précocité de fauche et la conservation »
Au Gaec de Lambres, dans le Puy-de-Dôme. Dans ce système saint-nectaire fermier, le foin, séché au sol, est un élément central de la production laitière. Stade et conditions de récolte exigent toutes les attentions.
Au Gaec de Lambres, dans le Puy-de-Dôme. Dans ce système saint-nectaire fermier, le foin, séché au sol, est un élément central de la production laitière. Stade et conditions de récolte exigent toutes les attentions.
« Notre exploitation est située sur un coteau très séchant à 900 mètres d’altitude. On joue nos stocks de fin avril à début juillet », explique Thibaut Guittard, un des trois associés du Gaec de Lambres, à Saint-Nectaire dans le Puy-de-Dôme. La ferme de Lambres transforme toute la production laitière en saint-nectaire fermier commercialisé en vente directe. Elle fabrique 55 tonnes par an avec un cheptel de 60 vaches et une production annuelle de 460 000 litres de lait. Le cahier des charges de l’AOP limite l’enrubannage à 30 % de la ration et la quantité de concentré à 1 800 kilos par vache et par an.
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Récolter du foin de qualité est donc primordial pour produire 7 500 litres de lait par vache. « La qualité du foin passe autant par la qualité nutritive, donc la précocité de fauche, que par la conservation », assure l’associé en charge des travaux extérieurs. C’est d’autant plus complexe que le foin est séché au sol. Le Gaec exploite 160 hectares dont 12 ha de céréale, 5,5 ha de luzerne. Tout le reste est en prairie permanente dont 80 ha sont réservés à la fauche (20 ha d’enrubanné et le reste en foin séché au sol). La première coupe démarre dès la fin avril sur les parcelles les plus précoces et se termine vers la mi-juillet. Le parcellaire s’étage entre 800 et 1 000 mètres d’altitude, ce qui échelonne les stades physiologiques.
Être vigilant sur la hauteur de fauche
Depuis deux ans, l’éleveur prend en compte les sommes de température pour décider de l’apport d’azote (200 °C) et du démarrage de la fauche : 650 °C pour les plus précoces, autour du bâtiment, qui sont vouées à l’enrubannage. « Fin avril ou début mai, selon les conditions de terrain, nous fauchons 5 à 10 hectares et 10 à 15 jours plus tard à nouveau 10 hectares. Ensuite, les fauches s’enchaînent selon la météo. Démarrer très tôt nous permet d’avoir des repousses à pâturer dès la fin mai. Et il vaut mieux récolter plutôt que de gaspiller au pâturage pour redistribuer en période de sécheresse. »
L’éleveur ne pratique que la fauche à plat. Un essai Top Foin a été réalisé sur son exploitation avec une modalité fauche à la conditionneuse qui ne l’a pas convaincu. « L’essai a montré qu’une fauche à plat suivie d’un fanage dans les deux heures permet de sécher le foin aussi vite qu’en le fauchant à la conditionneuse. De plus, en fauche à plat, le foin est plus piquant. » La conditionneuse a aussi l’inconvénient de pulvériser la terre des tumuli de campagnols terrestres. Raison pour laquelle il est également très vigilant sur la hauteur de fauche (7 cm). « Quand on travaille un fromage à pâte pressée non cuite, il faut bien régler son outil pour éviter de ramener de la terre dans le foin. C’est très important aussi pour ne pas mettre les plantes en stress et avoir une repousse rapide », ajoute-t-il.
La fauche a souvent lieu l’après-midi. « Je ne démarre pas trop tôt pour donner le temps aux sucres de monter dans la plante, tout particulièrement pour la luzerne », explique-t-il. Quant à la vitesse (8 km/h dans l’essai Top Foin), avec une faucheuse Kneverland à 9 assiettes (3,60 m), elle est fonction des circonstances, le but étant d’obtenir « un bon rendu de fauche ». Après la fauche, les parcelles sont détourées à l’andaineur sur 4 mètres, ainsi que les zones humides ou à l’ombre, pour que le séchage soit homogène.
« Plus on avance dans le séchage, plus on fane délicatement »
Thibaut Guittard effectue un premier fanage juste après la fauche puis toutes les 24 heures en fin de matinée (2 à 3 fanages généralement). « S’il y a du vent, on peut s’abstenir d’un passage. Le premier fanage est énergique, à 540 tours/min, puis plus on avance dans le séchage, plus on tourne délicatement. Le dernier est effectué entre 280 et 300 tours/min. » L’andainage (Fendt former 880 double de 7 m) a lieu en début d’après-midi, une à deux heures avant le pressage, de sorte que le foin finisse de sécher en andain. La vitesse d’avancement est de l’ordre de 8 km/h, pas trop rapide pour que l’andain soit bien formé. Le foin est pressé avec un round baller à chambre fixe. « Avec des foins précoces de rendement élevé, nous nous posons la question d’investir dans un round baller équipé de couteaux pour améliorer l’ingestion. »
La luzerne est travaillée à l’andaineur
La luzerne, chacun le sait, est un fourrage délicat à récolter. Thibaut Guittard la fauche dans l’après-midi et effectue un fanage dans la foulée mais plus délicatement qu’en prairie naturelle (400 tours/min). Elle est ensuite travaillée sur 3 à 4 jours le matin, avant la levée de la rosée, ou le soir, quand la fraîcheur commence à tomber, avec un second fanage puis uniquement avec l’andaineur. « En andain, elle garde sa verdure, alors qu’à plat, elle jaunit. Pour le premier passage, on élargit l’andain au maximum, 2 m à 2,20 m. Au second, on fait un andain conventionnel. Ensuite, on le retourne une ou deux fois selon la quantité de luzerne avant de presser soit le soir soit le matin de bonne heure pour éviter l’effeuillage. »