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« J'essaie de vivre de ma passion de l’élevage du pigeon »

À force de persévérance, Ludovic Guillaume a réalisé son rêve de devenir producteur de pigeonneaux. Une passion dont il aimerait bien vivre à plein temps.

Passionné par cet oiseau très attachant, Ludovic Guillaume s'est lancé dans son élevage de pigeon pour la seconde fois et espère que ce sera la bonne.
Passionné par cet oiseau très attachant, Ludovic Guillaume s'est lancé dans son élevage de pigeon pour la seconde fois et espère que ce sera la bonne.
© P. Le Douarin

Il ne sait pas pourquoi, mais c’est ainsi : Ludovic a été fasciné par les oiseaux dès sa plus tendre enfance. « Dès mes 12 ans, j’ai eu une volière avec des pigeons, relate-t-il. C’est devenu une passion qui ne m’a jamais quitté. » Il était aussi attiré par les machines agricoles. « J’ai passé un CAP de conduite d’engins, mais n’étant pas issu d’une famille d’agriculteurs je suis devenu ouvrier agricole en Seine-et-Marne. »

 

 
Ludovic Guillaume a démonté un pigeonnier fermé de 1 000 couples pour le remonter en un type semi-ouvert pour 540 couples (30 couples par volière ou parquet).
Ludovic Guillaume a démonté un pigeonnier fermé de 1 000 couples pour le remonter en un type semi-ouvert pour 540 couples (30 couples par volière ou parquet). © P. Le Douarin

Âgé de 34 ans en 2004, Ludovic fait le grand saut en rachetant à crédit un élevage de 1 000 couples situé à 15 kilomètres de son domicile de Ladon, dans le Loiret. « Malheureusement, j’ai dû le revendre un an après, suite à un grave problème familial et je suis devenu chauffeur-livreur chez un concessionnaire de matériel agricole. »

Se lancer une seconde fois à moindre coût

Une dizaine d’années plus tard, en 2016, Ludovic décide de se relancer dans l’aventure, tout en gardant son emploi salarié pour minimiser le risque financier et préserver sa famille. L'objectif était d’avoir 1 500 couples et de vendre lui-même pour y travailler à plein temps. « Je savais que j’allais gagner moins qu’en étant salarié, mais je voulais être mon propre patron. »

Il crée d'abord son entreprise individuelle Les pigeonneaux du Gâtinais et construit chez lui un petit bâtiment d’une soixantaine de couples. Vendant sa production sur de petits marchés de producteurs, il monte progressivement à une centaine de couples pour répondre à la demande.

 
L'abattoir CE de 80 m2 acheté en kit et monté en grande partie par Ludovic est revenu à 100 000 euros.
L'abattoir CE de 80 m2 acheté en kit et monté en grande partie par Ludovic est revenu à 100 000 euros. © P. Le Douarin

L’année 2019 marque un tournant. Après avoir enfin pu racheter un terrain à côté de chez lui, il démonte et remonte un ancien pigeonnier et construit à côté un abattoir neuf de 80 m2 qu’il a en grande partie monté. « C’était un investissement inévitable, faute de pouvoir faire plumer à sec dans les abattoirs locaux », souligne l’éleveur, qui a bénéficié d’une aide régionale de 30 000 euros sur les 100 000 euros nécessaires.

La Covid est passée par là

En mars 2020, Ludovic s’apprête à commander ses premiers couples au sélectionneur Europigeon quand survient la Covid. « Tout était prêt, mais j'ai freiné des quatre fers. J’ai quand même décidé de démarrer avec mes 100 couples, mais pour réduire le risque financier j’ai acheté 270 reproducteurs réformés d’un élevage de Saône-et-Loire, avec l’intention de les garder un à deux ans. »

Installé sans aides, hormis celles pour l’abattoir, il investit environ 140 000 euros (bâtiments, abattoir, couples) en autofinancement et avec un prêt de 100 000 euros pour lequel il rembourse environ 1 000 euros par mois depuis 2020.

 
Le site des Pigeonneaux du Gâtinais (Ladon) comprend un abattoir CE, deux pigeonniers (600 couples) et un troisième bâtiment non terminé. C'est suffisant pour occuper un plein temps.
Le site des Pigeonneaux du Gâtinais (Ladon) comprend un abattoir CE, deux pigeonniers (600 couples) et un troisième bâtiment non terminé. C'est suffisant pour occuper un plein temps. © P. Le Douarin

Ses ventes progressent d’année en année : 5 000 euros en 2019, 20 000 euros en 2020 et 36 000 euros en 2021, « mais pas aussi vite que je voudrais, car la production est moindre avec de vieux couples ». Il tue en moyenne une centaine de pigeonneaux par semaine, au lieu de 120 avec de jeunes reproducteurs. « Ma trésorerie est tendue. De temps en temps, je puise dans mes réserves personnelles, mais le compte d’exploitation a été équilibré en 2021. »

Une clientèle locale et variée

Ludovic Guillaume commercialise 70 à 80 pigeonneaux par semaine, mais va augmenter sa productivité avec le renouvellement en cours de plus de la moitié de son effectif de reproducteurs.
Ludovic Guillaume commercialise 70 à 80 pigeonneaux par semaine, mais va augmenter sa productivité avec le renouvellement en cours de plus de la moitié de son effectif de reproducteurs. © P. Le Douarin

Ce qui le rend optimiste, c’est qu’il arrive à écouler sa production sans difficulté, la demande étant supérieure à l'offre. Ses pigeonneaux sont plumés à sec, finis à la cire et conservés pleins, ce qui leur assure une DLC de 15 jours. Issus d’une souche Europigeon très bien conformée, ils se vendent assez bien. « Ayant développé mes ventes pendant la Covid, je n’ai pas ressenti l’impact de la fermeture des restaurants comme d’autres éleveurs qui étaient en rythme de croisière. J’ai démarché toute sorte de débouchés : une volaillère faisant de « beaux » marchés (Orléans, Fontainebleau…), un abattoir local de volailles (Pericat à Beaune-la-Rolande), des GMS (Super U, Leclerc), des particuliers et des restaurants (Paris, Orléans). »

Les pigeons de réforme, les pigeons non commercialisables ou proches de leur fin de DLC sont valorisés en pâté et confits.
Les pigeons de réforme, les pigeons non commercialisables ou proches de leur fin de DLC sont valorisés en pâté et confits. © P. Le Douarin

S’il lui reste des pigeonneaux, Ludovic les vend le dimanche matin sur des marchés de producteurs. Les invendus sous DLC sont congelés pour être commercialisés en fin d’année. Avec les pigeons de réforme et les pigeonneaux trop maigres ou abîmés à l’abattage, le producteur fait confectionner pâtés, rillettes et viande confite par une conserverie artisanale. « Rien n’est perdu et j’arrive à rentrer dans mes frais. »

Une dimension économique insuffisante

Seul sur son élevage, en plus de son emploi principal, Ludovic Guillaume ne parvient pas encore à franchir la prochaine étape de développement.

Pour Ludovic, le point de blocage actuel est d’ordre personnel. « Depuis un an, je me retrouve seul pour tout faire, en plus de mon travail. » Mener de A à Z un élevage de 600 couples équivaut à un mi-temps.

 

Deux pigeonneaux d’une quinzaine de jours. À raison d’un kilo par couple et par semaine en moyenne, l’aliment (graines et complémentaire) constitue le plus important poste de charges.
Deux pigeonneaux d’une quinzaine de jours. À raison d’un kilo par couple et par semaine en moyenne, l’aliment (graines et complémentaire) constitue le plus important poste de charges. © P. Le Douarin

Son emploi du temps est bien rempli : le matin et le soir, il fait son tour d’élevage ; le mercredi après-midi, il collecte et abat les pigeonneaux (avec 4 personnes en appoint) ; le jeudi et le vendredi matin, voire le samedi, il livre ; le samedi, il s’occupe des couples ; le dimanche matin, il va au marché s'il lui reste de la marchandise. Résultat : « je n’ai pas le temps de me lancer dans l’achèvement du second bâtiment de 500 couples en remontage ».

Comme il veut garder l’emploi lui procurant un revenu régulier, Ludovic a décidé de rester à 600 couples, en attendant de trouver une solution. « La solution radicale serait de revendre l’élevage… Je ne veux pas m’y résoudre, car je suis sûr que cette affaire a du potentiel. » Ainsi, Ludovic a commandé 180 jeunes couples Myrthis Pie pour renouveler ses vieux couples, ce qui devrait faire remonter les volumes. Il continue de s’accrocher à son rêve.

Les dates clés des Pigeonneaux du Gâtinais

 

Pigeon Myrthis Pie en pleine couvaison. Un bon couple chevauche ses cycles de production, en nourrissant d'un côté du double nid et en couvant de l'autre.
Pigeon Myrthis Pie en pleine couvaison. Un bon couple chevauche ses cycles de production, en nourrissant d'un côté du double nid et en couvant de l'autre. © P. Le Douarin

 

2016 Création de l’entreprise individuelle, démarrage de 60 couples en autofinancement.

2018 Après deux ans de tractations, achat d’une parcelle de 8 000 m2 jouxtant sa maison (16 000 €, frais compris).

2019 Achat à 170 km de Ladon d’un pigeonnier désaffecté de 1 000 couples (10 000 €), remonté pour 500 couples, construction de l’abattoir agréé CE (100 000 €).

2020 Transfert des couples dans le pigeonnier et achat de 270 couples de réforme ; achat d’un ancien pigeonnier pour 10 000 €.

2021-2022 Remplacement des vieux couples par des couples Myrthis Pie Europigeon.

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