Avec le préau, Eureden revalorise sa production de dindes
Après avoir obtenu l’engagement de deux industriels de l’abattage, la coopérative Eureden concrétise sa démarche de précurseur du bien-être des dindes, en encourageant ses éleveurs à construire une soixantaine de préaux.
Après avoir obtenu l’engagement de deux industriels de l’abattage, la coopérative Eureden concrétise sa démarche de précurseur du bien-être des dindes, en encourageant ses éleveurs à construire une soixantaine de préaux.
Fin août, à Plouvien, dans le Finistère, chez les frères Rivoal, Éric Humphry était aux anges lors de l’annonce par le groupe coopératif Eureden du lancement d’un planning de production de dindes avec préau.
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« J’ai rêvé de ce moment depuis 2017. Dès que j’ai commencé à tester ce concept dans mon élevage du Morbihan, se félicitait le président du groupement volaille de chair de la coopérative bretonne. Maintenant, le bateau est vraiment lancé » annonçait celui qui fut un pionnier de l’amélioration des conditions d’élevage de la dinde.
Le préau fait partie du concept d’élevage Bien être imaginé dès 2017 par la coopérative Cecab (devenue Eureden) avec l’ONG Welfarm. L’objectif était de mettre au point ensemble un système d’élevage mieux respectueux des besoins des animaux et compatible avec une activité économique.
C’est chez Éric Humphry que l’élevage pilote fut installé. Durant ces sept années, l’éleveur a accumulé des résultats et testé les améliorations possibles : la lumière naturelle dans le bâtiment, l’aire d’exercice semi plein air sans point d’eau et d’alimentation, les divers objets d’enrichissement pour distraire les dindes et les dissuader de se piquer, l’absence de débecquage, les plateformes de perchage, les souches de dinde, la baisse de densité.
Et c’est cela qui a permis de valider le « business model ». Les poids vifs sont légèrement améliorés à indice identique, lâche Jean-Marc Le Trionnaire, responsable du développement du concept, qui veut rester discret sur le détail des performances techniques. Pour l’éleveur, la productivité n’est pas affectée, dans la mesure où il ne réduit pas son nombre d’animaux. Les 30 % de surface supplémentaire du préau, au minimum, compensent la baisse de densité.
Engagements récents de l’aval
Certes, le cahier des charges Bien être testé depuis 2017 répond mieux aux attentes sociétales, mais avant de lancer des éleveurs dans l’aventure Eureden a mis du temps à convaincre des abatteurs de payer le prix des modifications.
Fin 2021, Duc a été le premier abatteur à s’engager. La filiale française du néerlandais Plukon fournirait en viande l’équivalent de 6 000 dindes par semaine au distributeur néerlandais Albert Heijn. Depuis mai 2022, les dindes bronzées fournies par Hendrix Genetics sont mises en place par Eureden, abattues en prestation dans le Morbihan vers 98 jours en femelle et 126 jours en mâles, et découpées sur le site finistérien de Duc. Cette dinde remplit le cahier des charges du label Beter leven de niveau 1. Celui-ci impose une souche à croissance plus lente, non débecquée, et restreint la densité (démarrage à 5,7/m² puis 4,1/m² avec le préau ouvert).
Le groupe LDC a suivi en 2023, via sa filiale bretonne SBV, afin de faire produire des dindes blanches vendues sous la marque « Dinde côté jardin » qu’Eureden n’est pas la seule organisation de production à fournir. Les volumes planifiés n’ont pas été communiqués. Les dindonneaux standard sont démarrés à une densité habituelle (7,5/m²) qui chute à 5,8/m²dès que le préau est ouvert vers l’âge de 42 jours.
L’accord avec les deux abatteurs permet à la coopérative de mieux rémunérer les éleveurs qui ont le pas. Le contrat de sept ans avec l’éleveur prévoit une marge poussin-aliment réévaluée de 30 % par rapport au contrat habituel annonce Franck Loric, manager de l’activité chair. Il permettra aux éleveurs d’amortir leur investissement – 170 000 euros pour le préau de 600 m² dans l’élevage finistérien, dont 40 % sont financés par Eureden – tout en améliorant leurs conditions de travail.
Redonner une seconde vie aux poulaillers
Pour Eureden, cette nouvelle méthode de production devrait intéresser des éleveurs soucieux d’améliorer leurs conditions de travail (lumière naturelle, dédensification), autant que les conditions de vie des dindes. La coopérative met en avant une baisse significative des charges de litière et d’enlèvement.
L’ajout du préau donne une valeur supplémentaire à l’élevage argumente Eureden. En effet, dans les bâtiments anciens la construction d’un préau s’accompagne le plus souvent d’une remise à niveau du reste du bâti, de sorte que l’outil de production devient plus attractif au moment d’assurer sa transmission.
Une dizaine de préaux sont opérationnels depuis cet automne et une trentaine de projets sont actés. Il reste encore une trentaine d’éleveurs à convaincre de passer à ce modèle d’élevage différenciant.
Presque vingt ans de démarches Bien être
La mise en place de moyens d’amélioration du bien-être et de la santé des dindes n’est pas nouvelle à la coopérative Eureden, anciennement Cecab.
En 2005, le groupement volaille de la Cecab lance la démarche de progrès « Well-faire » en dinde pour améliorer la qualité des carcasses.
En 2007, le critère « zéro antibiotique les 40 premiers jours » est ajouté à la charte.
En 2014, la Cecab crée le « Club well-faire santé » et préconise une baisse de densité dans les situations « problématiques ».
En 2017, la Cecab lance une collaboration avec l’ONG Wellfarm qui avait dénoncé les conditions de vie des dindes dans une campagne grand public.