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Inondations : « 43 heures sans pouvoir traire nos vaches »

Dans le Pas-de-Calais, à l’EARL des deux Vallées, l’eau est montée jusqu’à 50 cm dans la stabulation sur aire paillée, suite aux inondations. Les 55 laitières n’ont pas été traites pendant quasiment 48 heures.

Benoît Hédin, éleveur à Brexent Enocq, dans le Pas-de-Calais.
Benoît Hédin, éleveur à Brexent Enocq, dans le Pas-de-Calais. « Nous avons eu 1,40 m d’eau dans la cour de ferme ! J’espère que le plus dur est derrière nous. »
© B. Hédin

« La pression commence tout juste à retomber mais le stress a été intense. Pour nous, comme pour les bêtes », lâche Benoît Hédin, à la tête d’un troupeau d’une soixantaine de prim’Holstein à 9 000 litres de lait et de 200 hectares. À peine venait-il de rentrer d’une semaine de vacances aux Canaries que l’éleveur, installé sur la commune de Brexent Enocq, sévèrement touchée par les récentes inondations dans le Pas-de-Calais, a dû faire face, par deux fois en une semaine, à la montée des eaux sur son élevage. « Ce n’est pas la première fois que la rivière déborde, rapporte-t-il. La ferme est située en fond de vallée et en cas de fortes pluies, nous avions déjà eu de l’eau dans la cour, mais elle n’était jamais arrivée jusque dans le bâtiment ! »

La première inondation fut impressionnante : 50 centimètres d’eau dans l’aire paillée en une heure ! Prévenus deux heures et demie plus tôt, les éleveurs ont pu parer au plus urgent. « Nous avons mis les vaches et les génisses au sec sur le quai de l’aire raclée, surélevé d’un mètre par rapport au fond de l’aire paillée, abrité le gros matériel, protégé la maison… Quand nous avons déplacé les derniers veaux, ils avaient déjà de l’eau jusqu’au ventre », témoigne Benoît.

 

 
stabulation sur aire paillée ayant subi une inondation
Pour la première fois, l'eau est montée jusqu'à 50 cm sur l'aire paillée des laitières et des génisses. © B. Hédin

Avec la laiterie et la pompe à lait sous l’eau, impossible de traire. « Heureusement, nous avons pu pomper et l’eau s’est retirée relativement vite. Nous avons pu traire à minuit au lieu de 17 heures. »

Pic de cellules et un tiers de lait en moins

Mais ce répit a été de courte durée puisque deux jours plus tard, une deuxième vague est arrivée. « Non seulement la rivière a débordé mais l’eau remontait aussi de la source sur laquelle le bâtiment est construit. » Les bâtiments se sont à nouveau retrouvés noyés, et cette fois, l’eau a mis plus de 40 heures à s’évacuer. « Les vaches sont restées 43 heures sans être traites. Elles se couchaient de côté sur le quai, et celles au pic perdaient leur lait. Elles avaient 200 m2 disponibles le quai mesurant 4 mètres de large sur 50 mètres de long, et nous avions aussi ouvert l’aire d’attente. »

Heureusement, les silos situés plus haut n’ont pas été touchés. Tout le troupeau a pu être affouragé normalement.

La collecte a été perturbée faute d’accès, mais le tank a toujours pu « absorber » les traites et le lait a été maintenu à 3 °C même sans électricité. « Sur quinze jours, nous avons produit un tiers de lait en moins, constate Benoît. Le taux cellulaire du troupeau s’élève à 360 000 contre 125 000 auparavant, mais nous n’avons pas de mammites pour l’instant. »

Des veaux qui toussent, d’autres en diarrhées

Aujourd’hui, les choses commencent tout juste à se tasser. Les dix-sept veaux qui se trouvaient dans un bâtiment plus en hauteur, vont retrouver leurs cases habituelles. « Ce n’était pas simple de les nourrir au seau sans infrastructures adaptées. Ils ont souffert de l’humidité, certains toussent, d’autres ont des diarrhées. J’en ai traité certains aux antibiotiques et j’en ai perdu un qui ne montrait pourtant pas de signe de faiblesse », déplore Benoît.

Une vingtaine de génisses à inséminer qui étaient encore dehors, à plusieurs kilomètres de l’exploitation, vont également pouvoir être rapatriées sur la ferme. « C’était impossible auparavant avec les routes bloquées. Heureusement, elles disposaient de 8 hectares de prairies en hauteur, relativement abritées autour d’un bosquet. »

Les vaches ont retrouvé leurs quartiers. Dans la stabulation des élèves, une pompe avec flotteur continue d’extraire l’eau issue de la source dans une partie du bâtiment, ce qui réduit la surface utilisable.

« J’espère que le plus dur est derrière nous. Heureusement, mon salarié et mon apprenti sont restés sur la ferme nuit et jour pour me prêter mains fortes », apprécie l’éleveur qui n’a quasiment pas dormi pendant deux jours et demi durant cet épisode.

L’expert des assurances est attendu cette semaine pour approcher le montant du sinistre. « Les pertes en matériel ne se montrent peut-être pas énormes, par contre il y aura certainement des dégâts collatéraux sur le cheptel avec des conséquences dans la durée », s’inquiète l’éleveur qui veut néanmoins rester optimiste.

Des inquiétudes aussi pour le sol et les cultures

Les terres très limoneuses et très battantes s’avèrent dures comme du béton et l’eau ruisselle. « Le maïs grain est récolté mais il reste 9 ha de betteraves à arracher, indique Benoît. Le blé est semé et désherbé, il est beau mais si du gel est annoncé, je me demande ce que cela va donner avec un sol gorgé d’eau… »

Les prairies ont été complètement inondées. « Sur les 6 ha derrière la ferme, l’eau est montée à hauteur des piquets de clôtures. Des bidons, des poubelles, des tuyaux, des bouteilles de gaz flottaient et on sentait le gasoil… »

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