TECHNIQUE
Sol : soigner son physique
COMPACTAGE En plus de ses composantes chimique et organique,
le sol mérite que l’on s’intéresse à sa structure physique.
Plus ou moins réversibles, les tassements ne sont pas rares.
Poids des engins agricoles, utilisations des pneumatiques, composition et humidité du sol… beaucoup de paramètres peuvent jouer sur le niveau de compactage d’un sol. « La teneur en eau du sol est un facteur déterminant de sa sensibilité au tassement, juge Guy Richard, Inra d’Orléans. La combinaison entre les propriétés mécaniques et celles hydriques traduit l’état physique du sol. »
UN SOL BIEN RESSUYÉ AVANT D’INTERVENIR
Pour Rémy Duval, il y a peu de sols qui ne soient pas sensibles au compactage. « Dans les zones betteravières, nous avons des sols de type limons moyens à limons argileux sur lesquels il y a peu de différenciation en terme de sensibilité. La différence se mesure plutôt sur la vitesse de ressuyage de ces sols qui est liée au taux d’argile. Les sols argileux se ressuient un peu moins vite que le reste et la durée de vulnérabilité au tassement est donc plus longue à conditions climatiques égales. » L’ingénieur spécialiste en agronomie de l’ITB conseille d’attendre que le sol soit bien ressuyé pour choisir d’intervenir dans un champ. En culture de betterave, on sait plus qu’ailleurs ce que signifie le compactage. « La récolte à l’automne est une période particulièrement à risque où tous les sols sont susceptibles d’être dégradés. Heureusement, ces cinq dernières années, nous avons connu de bonnes conditions de récolte avec des humidités modérées, se rappelle Cédric Royer, spécialiste machinisme de l’ITB. D’autre part, depuis une quinzaine d’années, il y a un accord tare-terre qui rend les producteurs plus sensibles à la qualité de récolte. Cette tare-terre s’est fortement réduite grâce à des récoltes menées dans de bonnes conditions et cela a eu un effet indirect sur le respect du sol vis-à-vis du risque de tassement. »
DES PNEUS SOUS-GONFLÉS
Outre les propriétés et la capacité de ressuyage du sol, les engins agricoles sont évidemment à prendre en compte dans le risque de compactage. La pression sur le sol de ces machines est liée à leurs charges et à la surface en contact entre le sol et les pneumatiques. Globalement, plus la largeur des pneus est importante, moins la contrainte sur le sol est forte. La gamme de pneus offre toute une palette de largeurs. Celle-ci est également modulable en agissant sur la pression de gonflage des pneus. Les essais faisant varier cette largeur de contact sur différents matériels de récolte de la betterave nous livrent quelques exemples avec les automotrices et les tracteurs + bennes (voir graphique cicontre). « Dans certains conditions, ce sont les bennes qui occasionnent les ornières les plus profondes », constate Rémy Duval.
UN SOL PLAT MAIS TASSÉ PARTOUT
Les récolteuses dites « Intégrales » ont des pneus très larges qui limitent l’impact du poids de ces machines. « En dépit de leurs poids très élevés quand elles sont chargées de betteraves (50 à 60 tonnes maxi), elles n’occasionnent pas plus de contraintes que du matériel plus léger comme les automotrices ou les tracteurs et bennes, explique Cédric Royer. En revanche, la surface du sol affectée par le passage des pneus est plus importante. C’est encore plus vrai avec les Intégrales 3 avec essieux décalés où le passage des pneus couvre toute la surface du sol. Cet engin laisse un sol plat derrière lui, sans ornières, ce qui est perçu comme un avantage pour un producteur qui veut semer un blé derrière sa betterave. » « Mais, remarque Rémy Duval, le sol est tassé en intégralité et il n’y a plus d’endroit où l’eau peut véritablement s’infiltrer. On se pose encore des questions sur ce matériel qui peut être utilisé sept jours sur sept, même dans des conditions difficiles de travail. » !
Christian Gloria
La dégradation physique des sols décryptée en 2009
Une étude de grande envergure est menée en France sous l’égide de l’Inra. Le projet de recherche DST, « dégradation physique des sols agricoles et forestiers liée au tassement », implique différentes organisations(1). À l’Inra d’Orléans, Guy Richard en est le coordonnateur. « Ce projet arrive à son terme et une synthèse des résultats va être présentée en 2009. Nous allons aboutir à une cartographie des zones avec les niveaux de risque de tassement en France. » ÉLECTRIQUE ET MAGNÉTIQUE Sont prises en compte les caractéristiques du sol de même que les opérations culturales avec un chantier type défini par culture et par période dans chaque région. « Un système d’avertissement de l’état hydrique des sols à partir de prévisions météo va également être présenté. Il prévoira la teneur en eau du sol qui détermine le risque de compactage, ajoute Guy Richard. Enfin, nous montrerons les outils mis au point pour caractériser le tassement d’un sol. Il s’agit de méthodes de mesures non destructives de résistivité électrique (on injecte un courant électrique dans le sol) et de susceptibilité magnétique (passage d’un champ magnétique). » C’est moins lourd que de mesurer la masse volumique du sol. !
C. G.
(1) Inra, AgroParisTech, ENPC, Universités ParisVI et La Rochelle, Arvalis, ITB, CIVC, ONF.