L'écorégime de la PAC 2023 : comment y accéder ?
L’écorégime remplace le paiement vert au sein des aides PAC, pour un montant proche. Relativement accessible en grandes cultures, il demandera parfois des adaptations du système, d’où l’importance de faire une simulation sur son exploitation.
L’écorégime remplace le paiement vert au sein des aides PAC, pour un montant proche. Relativement accessible en grandes cultures, il demandera parfois des adaptations du système, d’où l’importance de faire une simulation sur son exploitation.
Pour les grandes cultures, l’écorégime est l’une des principales nouveautés de la PAC 2023. Cette aide PAC, avec trois niveaux de paiement différents selon les exigences atteintes, remplace le paiement vert. L’enjeu de l’écorégime n’est pas anodin : les estimations du ministère de l’Agriculture tablent sur 60 euros à l’hectare (€/ha) pour le niveau 1, dit « standard », 80 €/ha pour le niveau 2 (supérieur) et environ 110 €/ha pour les exploitations bio. L’ancien paiement vert, qui disparaît, avoisinait en moyenne 80 €/ha.
Trois voies d'accès à l'écorégime
Comment déterminer sa voie d'accès ?
Pour toucher l’écorégime, trois voies sont envisageables. La plus utilisée sera la voie des « pratiques ». Elle repose sur un barème à points qui favorise la diversité de rotation des cultures, avec un gros bonus pour les cultures fixatrices d’azote.
Prairies temporaires et jachères sont également récompensées. D’après les simulations des organisations professionnelles agricoles, pour une grande majorité d’exploitations en grandes cultures, l’écorégime standard sera accessible avec peu ou pas de changements. Aller jusqu’au niveau supérieur impliquera des ajustements pour un plus grand nombre d’entre elles.
Les protéagineux et les jachères pour gagner des points dans le cadre de l'écorégime
Seuls les assolements très simplifiés ou les systèmes spécialisés seront exposés au risque d’être exclus de l’écorégime. Par exemple, un assolement reposant sur la rotation des cultures de type colza-blé-orge d'hiver ne rapporte que 2 points, contre 4 nécessaires pour l’écorégime standard. Dans ce cas, l’introduction de 5 hectares de légumineuses donnera 2 points, montant le score à 4. Y ajouter des oléagineux de printemps sur 5 % des terres arables aboutira à 5 points, permettant d’accéder au niveau supérieur. Augmenter la part des jachères est aussi une solution possible.
Exemple de calcul de l'écorégime par voie des pratiques
« Dans notre secteur, il sera rare de ne pas avoir 4 points, analyse Émilie Schaeffler, à la chambre d’agriculture de l’Yonne. Pour en obtenir 5, il faudra parfois adapter ses pratiques. En tout état de cause, il est indispensable de vérifier si ça passe avec son assolement, pour identifier le cas échéant les ajustements à apporter. »
Même optimisme chez Pascale Nempont, à la chambre d’agriculture des Hauts-de-France, pour qui l’écorégime n’est pas une grosse source d’inquiétude en grandes cultures. « On pourrait rencontrer des difficultés dans les élevages granivores qui produisent leur alimentation, avec peu de marge de manœuvre pour l’assolement, constate la spécialiste. Ce peut être aussi le cas pour les exploitations spécialisées en pommes de terre avec des échanges de parcelles. »
Garder une approche économique de l’écorégime
Mais gare aux changements contraints d’assolement. « Si on ne peut pas implanter le colza prévu une année très sèche alors qu’il devait rapporter un point, il faut anticiper la façon de le compenser », illustre Pascale Nempont. Le remplacer par de l’orge de printemps alors que 1 point est déjà apporté par le maïs au titre des céréales de printemps ne sera pas une solution : le point perdu sera à chercher ailleurs.
Il faut raisonner à partir du calcul de marge et de l'EBE
Attention également à ne pas se focaliser excessivement sur l’écorégime : modifier son assolement au nom de celui-ci doit se justifier économiquement. « Il faut raisonner à partir du calcul de marge et de l’EBE pour s’assurer qu’il est intéressant d’aller chercher l’écorégime lorsque son système actuel ne le permet pas, insiste Pascale Nempont. Néanmoins, dans la plupart de nos simulations, c’était le cas. »
Autre point de vigilance pour la voie des pratiques : elle impose de respecter les règles qui s’appliquent aux prairies (proportion non retournée) et aux cultures permanentes (couverture de l’interrang) lorsque ces productions couvrent au moins 5 % de la surface de l’exploitation.
Phase transitoire pour les exploitations certifiées HVE
Deux autres voies d’accès sont possibles : celle de la certification et celle des infrastructures agroécologiques (ou biodiversité). Avec la voie certification, le niveau standard correspond à la certification environnementale de niveau 2 +, ou CE2 +, créée spécialement pour l’écorégime. Le niveau supérieur est réservé aux exploitations HVE (Haute valeur environnemtale). Les fermes intégralement conduites en bio peuvent prétendre à une prime de 30 €/ha par rapport au niveau supérieur. Pour accéder à l’écorégime via la certification environnementale, il faudra respecter le nouveau cahier des charges qui sera validé à l’automne. Les exploitations certifiées à partir du 1er octobre 2022 devront ainsi appliquer le nouveau référentiel. À titre transitoire, celles certifiées avant cette date (ancien référentiel) bénéficieront de l’écorégime au moins en 2023.
Dernière voie pour décrocher l’écorégime : capitaliser sur les infrastructures favorables à la biodiversité, les fameuses infrastructures agroécologiques (IAE). Le niveau standard de l’écorégime impose d’afficher 7 % d’IAE non productives (excluant les cultures fixatrices d’azote et les dérobées) sur sa SAU, dont au moins 4 % sur les terres arables. Le niveau supérieur exige de passer à 10 % d’IAE non productives, dont 4 % sur les terres arables.
Le montant d’écorégime obtenu par les voies « pratiques » et « certification » peut être majoré par le « bonus haies PAC 2023 ». Ce ne sera pas le cas si l’on opte pour la voie « IAE ».
Pas de dérogation « jachères » pour les écorégimes
Afin de favoriser la production agricole dans le contexte de guerre en Ukraine, l’Europe permet, pour 2023, de mettre en culture et d’exploiter des parcelles déclarées en jachères dans le cadre de la conditionnalité. On pourra ainsi atteindre le taux minimal d’infrastructures agroécologiques exigé par la BCAE 8 grâce à des « jachères » en réalité cultivées. Néanmoins, cette dérogation ne porte pas sur les écorégimes : pour la voie « pratiques » comme pour la voie « IAE », les jachères devront être de vraies jachères !