Maïs : réduire l’écartement entre les rangs optimise la ressource en eau
Semer le maïs à écartement réduit permet une meilleure efficience de tous les intrants et simplifie le travail. La pratique peut s’avérer intéressante, notamment en cas de problèmes d’apport en eau.
Semer le maïs à écartement réduit permet une meilleure efficience de tous les intrants et simplifie le travail. La pratique peut s’avérer intéressante, notamment en cas de problèmes d’apport en eau.
La valorisation de l’eau et des nutriments par le maïs se fait dans les 20 centimètres de chaque côté des pieds. « La preuve a été apportée par l’expérience de dix ans de sondes capacitives. Le système racinaire est très développé sur cette largeur, mais pas au-delà. Dans un contexte où l’on doit chercher de la résilience par rapport à l’eau et aux engrais, il n’y a aucun intérêt à avoir 75 centimètres d’écartement entre rangs », assure Éric Faure, conseiller spécialisé irrigation à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire.
Depuis dix ans, sans changer la densité, des producteurs font donc le choix d’un écartement réduit, en général à 60 cm. « 5 a 10 % des irrigants du sud Vendée sont passés en écartement réduit et leur nombre augmente chaque année », estime Éric Faure. « En Poitou-Charentes, Vendée et Centre-Val de Loire, les surfaces semées à 60 cm d’écartement s’accroissent de 2 à 5 % par an », confirme Cyrille Porcher, ingénieur marketing Centre-Ouest chez Limagrain.
Le changement intervient en général à l’occasion du renouvellement du cueilleur à maïs. Des exploitants font alors le choix de cueilleurs conçus pour des écartements réduits, malgré le surcoût lié au plus grand nombre d’éléments cueilleurs pour une même largeur. Plus rarement, l’évolution se fait par transformation du cueilleur existant. « Pour un coût limité, j’ai fait passer mon cueilleur de 8 rangs fixes en 75 cm à 10 rangs en 60 cm, » indique un exploitant.
Avec des écartements de 80 cm et 60 cm et 4 densités différentes en conditions d’irrigation et alimentation azotée non limitantes, un essai d’Arvalis en maïs semences a montré un fort effet de la densité sur le rendement, mais quasiment jamais de différence significative sur l’architecture et le rendement entre les deux écartements.
Sur le terrain cependant, les agriculteurs passés à un écartement réduit rapportent de nombreux avantages. Avec un espace entre graines sur le rang passant de 12-14 cm à 15-19 cm, les pieds se font moins concurrence. Ils reçoivent plus de lumière, notamment les feuilles du bas, font plus de photosynthèse et exploitent mieux le sol, l’eau et les engrais. Autre avantage : un recouvrement plus rapide du rang, ce qui limite l’évaporation et le salissement par les adventices. « En moyenne, le gain sur le salissement est de 12 jours, ce qui peut économiser un herbicide de rattrapage », constate Éric Faure.
Les producteurs rapportent aussi un gain en tenue de tiges en fin de campagne. « Au final, le surplus de rendement chez les agriculteurs vendéens passés à 60 cm varie de 0 à 7 % », rapporte Éric Faure. Un autre avantage encore se retrouve dans la voie des tracteurs qui est plus grande, des pneus plus espacés et donc un tracteur plus stable. Enfin, la technique simplifie le travail. Le même semoir réglé sur 60 cm peut être utilisé en maïs, tournesol et colza sans avoir à changer l’écartement, avec la nécessité toutefois d’une grande régularité du semis sur le rang. De même, la bineuse peut être réglée en permanence sur le même nombre de rangs et le même écartement, alors qu’avec un écartement de 75 cm en maïs et 60 cm en tournesol, il faut changer l’interligne entre le binage du maïs et celui du tournesol, ce qui amène parfois à faire l’impasse sur un binage. « Le gain économique, la simplification des tâches et l’amélioration des conditions de travail font qu’aucun agriculteur passé à 60 cm ne reviendrait en arrière », assure Éric Faure.
La technique peut être intéressante dans un contexte nécessitant d’optimiser la ressource en eau. Les pieds explorant mieux le sol et l’évaporation étant limitée par le recouvrement plus rapide du rang, l’eau disponible est mieux valorisée. En 2015-2016 puis 2019-2020, dans le Centre-Ouest et le Sud-Ouest, Limagrain a comparé des écartements de 75 cm et 60 cm pour une même densité, en maïs et tournesol. « Dans tous les cas, il y a eu un gain de rendement pour l’écartement à 60 cm pouvant aller jusqu’à 10 %, avec moins d’IFT et une meilleure efficience de l’eau, indique Cyrille Porcher. 25 mm d’eau en écartement 60 cm équivalaient à 30 mm en 75 cm. »
En maïs, le gain a été de 0 à 10 % , sur la base d’un rendement de 70-80 q/ha en sec et 110-115 q/ha en irrigué. Et à rendement identique, il y a eu un tour d’eau de 30 mm en moins sur la base de 7-8 passages d’eau. « Le semis à 60 cm permet donc d’économiser un tour d’eau ou d’optimiser l’eau à disposition en étalant différemment les irrigations », conclut Cyrille Porcher. « L’évapotranspiration augmentant avec le changement climatique, le déficit hydrique se creuse, à pratiques identiques et pour la même surface, analyse Éric Faure. Le semis à 60 cm permet de garder le même potentiel. En 2022, avec 20 % de déficit de précipitations, le semis à 60 cm n’a toutefois pas fait de miracle et les rendements ont été en baisse. »
Un gain en tournesol aussi
En 2020 et 2021, Limagrain a comparé en tournesol des écartements de 75 cm et 60 cm, avec deux densités (75 000 pl/ha et 60 000 pl/ha à la récolte) et 0, 1 ou 2 irrigations. En 2020, le meilleur rendement en variété LG précoce a été obtenu pour l’écartement 60 cm, 75 000 plantes/ha récoltés et deux irrigations. En 2021, année plus humide aux rendements exceptionnels, l’irrigation a aussi apporté un plus. Le rendement en tournesol LG précoce avec deux irrigations postfloraison a été de 50 q/ha en 60 cm et 48,82 q/ha en 75 cm. En LG demi-précoce, c’est aussi la modalité 60 cm d’écartement, 75 000 pl/ha récolte et deux irrigations postfloraison qui a donné le meilleur rendement, de 49,4 q/ha contre 47,77 q/ha en 75 cm.