Irrigation et pratiques agricoles
Le projet de loi sur l´eau au bout du tunnel
Irrigation et pratiques agricoles
Le projet de loi sur l´eau a été adopté en seconde lecture au Sénat. Rappel des implications pour les agriculteurs et résultats sur l´état de la ressource en eau.
Adopté en deuxième lecture le 12 septembre au Sénat, le projet de loi sur l´eau doit à nouveau passer devant l´Assemblée nationale pour une adoption définitive. Le Sénat a apporté quelques petites modifications qui valent le coup d´être décrites. La TGAP sur les produits phytosanitaires passe en redevance pour pollution diffuse. De sept classes de produits sur lesquelles était calculée une taxe, on passe à deux catégories avec des plafonds établis à trois euros/kg pour les substances toxiques, très toxiques, cancérigènes, mutagènes ou tératogènes et 1,20 ?/kg pour celles dangereuses pour l´environnement.
A sa dernière lecture, le Sénat a ajouté une troisième catégorie : celle des « substances dangereuses pour l´environnement relevant de la famille chimique minérale » dont le taux de redevance est fixé à 0,50 ?/kg. En clair, il s´agit notamment du soufre et du cuivre appliqués sur les cultures. « Si l´on s´en tenait à tous ces plafonds, le niveau de redevance fixé atteindrait le double de la TGAP actuelle, estime Céline Fournier, responsable environnement à l´AGPM. Mais ce sera à chaque agence de l´eau de fixer cette redevance. Nous espérons que d´une agence à l´autre, le montant de la redevance ne sera pas trop différent de façon à ne pas établir des distorsions de concurrence sur le prix des produits entre régions. » La redevance qui remplace la TGAP sera payée par le distributeur au travers de la vente des produits. La facture sur l´achat montrera la part du montant dévolu à la redevance pollution diffuse.
Le principe de la création de nouvelles ressources en eau ©retenues, lacs comme étant un moyen d´assurer une gestion équilibrée de l´eau, a été retenu par le Sénat. ©P. Cronenberger |
Redevances allégées et bonnes pratiques agricoles
« L´agriculteur en aura donc connaissance. Sur sa redevance pollution diffuse, il aura le droit de demander à l´agence de l´eau un retour de 30 % de cette redevance en justifiant de bonnes pratiques agricoles », affirme Céline Fournier. L´agriculteur paie également aux agences une redevance sur les prélèvements d´eau, proportionnelle aux volumes utilisés. « Les taux dans les zones définies en déficit chronique (zone de répartition des eaux) sont plus élevés que pour le reste, ce qui se concrétise par une eau plus chère », explique Céline Fournier. Des plafonds sont fixés par la loi (deux ou trois centimes d´euros/m3 selon l´état de la ressource) et il n´y a pas de prix plancher. A chaque agence de fixer le montant de la redevance en fonction des zones sous sa couverture. « Les efforts des irrigants en termes de gestion raisonnée de l´eau, notamment dans le cadre des actions de gestion collective, seront pris en compte pour une diminution de redevance. Ceci n´est valable qu´en zone de répartition des eaux. Nous aurions souhaité que ce le soit partout. »
La profession agricole (FNSEA, AGPM,) a obtenu en revanche du Sénat d´inscrire dans le projet de loi le fait que la création de nouvelles ressources en eau participe à la gestion équilibrée de l´eau.
Précision et simplicité sur la redevance élevage
Pas de changement sur le contrôle des pulvérisateurs. Celui-ci deviendra obligatoire tous les cinq ans. Le principe d´un fonds de garantie sur l´épandage des boues d´épuration reste maintenu même si le financement de ce fonds change. Le plafond du montant de la taxe sur les boues diminue de moitié.
Enfin, la redevance élevage a été précisée puisqu´à la dernière lecture devant l´Assemblée nationale, le projet avait soulevé désaccords entre politiques. Le taux de redevance élevage est calculé sur les UGB avec un seuil de perception de 150 UGB en montagne et de 90 UGB pour le reste du territoire (zones de plaine). Un taux de conversion est prévu pour les monogastriques. Seront pris en compte les bonnes pratiques d´alimentation visant à réduire les rejets de composés azotés pour le calcul du montant de la redevance élevage. La FNSEA déplore que la redevance élevage ne soit calculée que par la seule méthode qui suit une base forfaitaire par animal vivant. Elle aurait préféré que soit proposé également à l´éleveur un calcul sur la situation réelle de l´exploitation.
Redevance pollution diffuse et redevance élevage : ces « taxes » doivent concourir à atteindre l´objectif affiché par le gouvernement de parvenir à un bon état écologique des eaux en 2015. Aujourd´hui, il faudrait que le projet passe devant l´Assemblée nationale avant la fin de l´année. « Il est inscrit en pointillé à l´ordre du jour de l´Assemblée pour la fin novembre », informait Nelly Olin, ministre de l´Écologie lors du compte-rendu du dernier comité sécheresse du 19 septembre.
S´il ne devait pas passer d´ici les élections présidentielles et législatives et que le gouvernement bascule à gauche, on ne prend aucun risque en disant que le projet de loi sur l´eau serait purement et simplement mis au panier. Mais ces prochaines échéances devraient pousser le gouvernement à voter la loi avant la date fatidique pour s´attirer la sympathie (et le vote) d´une bonne partie de la profession agricole.