Faire progresser le rendement de la betterave deux fois plus vite
Le programme de recherche multipartenarial Aker, dévolu à la betterave sucrière, vise une croissance annuelle des rendements de 4 % contre 2 % actuellement. Mais pas avant 2025-2030.
Le programme de recherche multipartenarial Aker, dévolu à la betterave sucrière, vise une croissance annuelle des rendements de 4 % contre 2 % actuellement. Mais pas avant 2025-2030.
Doubler l’augmentation annuelle de rendement de la betterave sucrière : lancé en 2012 pour huit ans, le programme Aker affiche des ambitions élevées en voulant passer de 2 % de croissance annuelle moyenne de production de sucre à l’hectare actuellement, à 4 % à l’horizon 2020. D’énormes moyens ont été mis en œuvre sur ce programme avec onze partenaires du public et du privé (1). 63 000 parcelles sur plus d’une douzaine de plateformes d’essais dont plus de la moitié sur la seule étude du caractère de rendement sucrier, 3000 génotypes de betteraves étudiés, 80 chercheurs impliqués sur le programme, 18,5 millions d’euros de budget dont 5,5 millions d’euros d’aides de l’état… les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Six plateformes d’essais sont dédiées à l’évaluation des rendements et sont conduites par Florimond Desprez, seul semencier partenaire du programme Aker. Le rendement en sucre blanc à l’hectare est la résultante de la teneur en sucre de la betterave (richesse), du poids de sa racine (rendement racine) et de sa teneur en sucre blanc extractible (analyse du sodium, du potassium et de l’azote alpha-aminé). « Une arracheuse est adaptée aux récoltes des microparcelles qui comprennent, chacune, trois rangs de betteraves sur 10 m2 pour 75 racines. La récolte prendra de 30 à 60 secondes par parcelle à cinq personnes avec le lavage, pesage et échantillonnage (râpure) faits sur la machine même », annonçait, le 14 juin dernier, Nicolas Henry, directeur du laboratoire betteraves et chicorées chez Florimond Desprez, lors de la visite des essais de Curchy, dans la Somme (6000 parcelles sur 8 hectares). Les récoltes ont démarré cet automne.
Des drones avec caméras de mesures
Diverses mesures sont effectuées avec le phénotypage des 3000 génotypes issus du programme de sélection Aker sur deux années, 2018 et 2019. Certains essais sont suivis avec des drones embarquant des caméras multispectrales pour mesurer, sur une succession de dates entre mai et juillet, la couverture du sol, la surface des feuilles, la quantité d’azote foliaire et celle de chlorophylle. Ces essais sont l’occasion de tester de nouveaux outils de mesures telle une sonde de contact miniaturisée pour une utilisation au champ permettant de mesurer le taux de saccharose et la matière sèche dans les premiers millimètres de la racine au niveau du collet.
Les mesures ne se limitent pas aux composantes directes du rendement. « Les 3000 génotypes sont caractérisés sur leurs comportements à la montée à graines, sachant qu’ils ont été volontairement semés à des dates précoces, présente Nicolas Henry. Des essais spécifiques concernent les principales maladies foliaires, oïdium et cercosporiose, avec mesure de leur dynamique sur le feuillage des génotypes par drones et caméras embarquées. » Dans le Loiret, département à forte pression rhizomanie, deux essais sont consacrés à l’évaluation de la résistance du matériel génétique à cette maladie virale.
La qualité de conservation des racines auscultée
L’Inra, le Geves et l’université d’Angers ont mis au point un protocole de phénotypage des semences et des plantules avec l’utilisation de plusieurs outils de mesures, pour caractériser la germination et la vitesse de levée à différentes températures. Enfin, allongement des durées de campagne betteravière oblige, la qualité de conservation des racines de betteraves après arrachage est analysée en laboratoire avec une méthodologie prédictive élaborée par Florimond Desprez et basée sur des mesures physiques.
Le programme débouchera sur du matériel génétique répondant aux besoins des sélectionneurs. « Dans les cinq à dix ans qui suivront la fin d’Aker, des semenciers seront en mesure de proposer des variétés dont l’obtention aura bénéficié de ces recherches, annonce Bruno Desprez, président de Florimond Desprez. Mais nous demandons une prolongation de six mois du programme, afin de nous laisser suffisamment de temps pour analyser les millions de données générées par les mesures sur les différents essais et génotypes. » La betterave du futur devra être productive et rentable dans ses coûts de production face à la concurrence mondiale de la canne à sucre.
(1) Partenaires : Inra, ITB, Florimond Desprez, Irstea, Geves, CGB, SNFS, Universités de Lille et d’Angers…En savoir plus : aker-betterave.fr et twitter (@AKERBett)
Quinze plants de betteraves bien choisis pour démarrer
Les 3000 génotypes de betteraves testés dans le programme Aker n’ont pas été sélectionnés au hasard. Ils sont issus de 15 plantes de références trouvées dans les banques de gènes de diverses régions du monde. Ces 15 plantes ont été choisies avec l’utilisation de marqueurs moléculaires pour en caractériser la diversité génétique. « Dans ces plantes, on couvre 100 % de la variabilité allélique disponible chez la betterave et complémentaire des ressources génétiques déjà utilisées, précise Bruno Desprez, Florimond Desprez. L’objectif était d’augmenter la diversité génétique du matériel obtenu. Chacune de ces plantes a été croisée avec du matériel élite (200) pour en introgresser les gènes, ce qui a pris quelques années en évaluant les résultats à chaque croisement. » Au final, cela donne 3000 génotypes en cours d’évaluation au champ.
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