Directive nitrates et grandes cultures : quelles nouveautés en zones vulnérables ?
Le septième programme d'actions de la directive nitrates apporte quelques nouveautés par rapport au programme précédent, aussi bien dans sa déclinaison nationale que via les plans d’actions régionaux en cours d’élaboration. Présentation pour les grandes cultures avec des exemples dans deux régions : les Pays de la Loire et les Hauts-de-France.
Le septième programme d'actions de la directive nitrates apporte quelques nouveautés par rapport au programme précédent, aussi bien dans sa déclinaison nationale que via les plans d’actions régionaux en cours d’élaboration. Présentation pour les grandes cultures avec des exemples dans deux régions : les Pays de la Loire et les Hauts-de-France.
Le 7e programme d’actions national (PAN 7) de la directive nitrates s’applique depuis le 1er janvier 2024. Il devait en être de même des nouveaux programmes d’actions régionaux (PAR) prenant comme socle le PAN7, mais l’élaboration de leurs textes d’application a pris du retard. Début février, beaucoup de ces textes étaient encore au stade de la consultation. Le nouveau programme d’actions de la directive nitrate attendra sans doute le second semestre 2024 pour son application via les PAR en régions.
De nouvelles catégories dans les couverts d’interculture
Une nouvelle dénomination entoure les cultures intermédiaires, avec deux catégories dorénavant. Les cultures intermédiaires exportées (CIE) intègrent notamment les Cive (cultures intermédiaires à vocation énergétique) et désignent également les dérobés ou les méteils exportés. La seconde catégorie, les cultures intermédiaires non exportées (CINE) s’appliquent aux couverts non récoltés, les Cipan (culture intermédiaire piège à nitrates) et également les repousses denses de céréales ou de colza quand elles sont autorisées comme couverture végétale d’interculture.
Entre les deux catégories, les règles diffèrent sur les conditions d’apports d’engrais ou d’effluents d’élevage, en fonction des dates d’implantation et de celles de destruction ou de récolte de ces couverts. La limite de quantité d’azote apporté via les fertilisants sera plus élevée pour les CIE que les CINE. Pour Noémie Morel, chargée de mission FNE en Pays de Loire, « fertiliser des cultures intermédiaires est un non-sens puisque leur but premier est de limiter le transfert de nitrate dans l’environnement ».
Le maïs grain récolté tard garde son exemption de couvert d’interculture
L’exemption à l’implantation d’un couvert végétal après la récolte d’une culture d’été se restreint. Elle n’est plus autorisée après une culture de tournesol, même récoltée tardivement. Il y a obligation d’implanter un couvert si le tournesol est suivi d’une culture de printemps. Il en est de même pour le maïs ensilage. En revanche, après maïs grain et sorgho grain récoltés après une certaine date (le 20 octobre en Pays de Loire, plus tard dans d’autres régions plus au nord), il y aura exemption de couverture végétale d’interculture longue. « Les agriculteurs demandant cette exemption doivent présenter une analyse de sol de reliquat post-récolte », précise Yoann Corvaisier, de la chambre d’agriculture des Pays de Loire. Le mulch constitué des cannes de maïs ou de sorgho est considéré alors comme une CINE.
De nouvelles catégories de fertilisants
Le calendrier d’interdiction d’épandage des fertilisants azotés se complexifie avec des fertilisants divisés en cinq types contre trois dans les programmes précédents (I, II et III). Un type 0 a été défini qui comprend les « produits organiques avec une organisation nette à moyen terme de l’azote », comportant les boues de papeterie, les composts de déchets verts jeunes et ligneux, les marcs de raisin frais. Le type I est divisé en 2 sous-catégories : Ia et Ib selon que le produit organique présente une minéralisation d’azote très lente ou lente. Pas de changement chez les fertilisants de type II (produits organiques à minéralisation d’azote rapide) et III (engrais minéraux de synthèse).
Globalement, le calendrier des interdictions d'épandage ne change pas et est adaptable selon les régions dans la limite de deux semaines sur le démarrage de fertilisation. « Il aboutit toujours au risque d’une concentration des apports de fertilisants azotés au printemps sur les cultures d’été en particulier, à un moment où le risque de lixiviation est élevé », regrette Yoann Corvaisier qui aurait souhaité des règles plus souples sur les dates d’épandages dans le programme national.
Anticipation possible des apports de fertilisants de 15 jours selon la météo
Le PAN 7 introduit toutefois un dispositif de flexibilité agro-météorologique. À partir de 2025, il sera possible d’anticiper jusqu’à quinze jours les épandages en sortie d’hiver par rapport à la date réglementaire définie dans le PAN et les PAR, si les conditions météorologiques de l’année le justifient. Les règles de déclenchement de ce dispositif sont encore à définir. Elles se baseront sur des données de Météo France en particulier. Des indicateurs météorologiques devront certifier l’absence de risque de lixiviation, pour déclencher l’anticipation des apports. « Cette règle de flexibilité ne va que dans un sens, celui de permettre d’épandre plus de fertilisants, considère Noémie Morel. Nous aurions souhaité que cette règle puisse permettre aussi de retarder le déclenchement des apports, par exemple en cas de conditions climatiques augmentant le risque de lessivage. » Le contexte de changement climatique a été mis en avant pour mettre en place ce dispositif, qui sera repris dans la plupart des PAR.
Un petit bonus de 30 unités d’azote à l’automne pour le colza
« Un apport d’un maximum de 30 unités d’azote supplémentaires sous forme minérale, en végétation à partir du stade 4 feuilles du colza est possible entre le 1er septembre et le 15 octobre », précise Terres inovia. Cette nouvelle possibilité d’apport ne concernera que les colzas semés avant le 25 août dans les situations où la disponibilité en azote du sol pendant l’automne est limitée, comme avec un précédent céréale à paille où il n’y a pas eu d’apport de fertilisant organique deux années sur trois.
La mesure doit permettre une bonne levée et croissance du colza à l’automne de façon à le rendre moins vulnérable aux attaques de ravageurs comme les altises. En septembre 2027, des résultats sur l’impact de ces apports devront entériner la mesure ou pas.
Un taux d’argile toujours pris en compte pour des exemptions de culture intermédiaires
Une exemption de couvert d’interculture est possible sur des sols très argileux, dont le taux d’argile est supérieur à 37 %, est-il défini dans le PAN 7. C’était déjà le cas dans le programme précédent, mais les régions avaient la possibilité d’abaisser cette teneur seuil pour augmenter le champ de l’exemption à l’implantation d’un couvert, jusqu’à 28 % d’argile dans les Hauts-de-France et 25 % en Occitanie. Avec le nouveau programme, le seuil national de 37 % pourra encore être abaissé dans les régions où avait déjà été adoptée une diminution, mais dans la limite de 31 %, pas en dessous.
Dans les Hauts-de-France, les départements du Nord et du Pas-de-Calais présentent plusieurs situations avec ce type de sol très argileux. Il en est de même dans le Sud-Ouest et le Nord-Est. Une analyse de sol doit montrer le taux d’argile quand est demandée une dérogation à l’implantation d’une culture intermédiaire.
EN SAVOIR PLUS
Des sites web officiels pour s’informer
Un site web est dédié au programme d’actions national « nitrates » (PAN) comportant notamment les arrêtés du 30 janvier 2023 relatifs au PAN et aux PAR, plans d’actions régionaux.
Les projets d’arrêtés de programme d’actions régional sont consultables sur les sites web des Dreal de chaque région respective. Exemple en Hauts-de-France