Des prix qui ne rémunèrent pas les coûts de production
Si les volumes sont là, contrairement à la récolte 2016, les prix ne suivent pas, pénalisant le revenu des agriculteurs.
« La vraie problématique, c’est la baisse des prix », a expliqué Philippe Pinta, président de l’AGPB (producteurs de blé), le 29 août en conférence de presse à Paris. Pour le syndicat, la récolte 2017 ne va pas permettre d’oublier 2016. L’AGPB prévoit un prix moyen payé aux agriculteurs aux alentours de 130 euros la tonne, soit 20 % de moins que les 162 euros/tonne de la moyenne sur dix ans. Or le syndicat estime entre 190 et 200 euros le prix de revient d’une tonne de blé (rémunération de l’agriculteur incluse) produite en 2017. À l’APCA, Thierry Pouch estime qu’« avec des rendements moyens de 70 q/ha, il manque 30 à 35 euros la tonne pour couvrir les coûts de production ». D'un côté comme de l'autre, le compte n'y est pas. Pour l'AGPB, après un déficit moyen de 20 000 euros en 2016, un céréalier n'engrangerait donc en 2017 qu'un revenu de l'ordre de 2000 euros…
« Il n’y a plus de PAC pour les céréales »
Pour Philippe Chalmin, professeur à Paris Dauphine, il faut se rendre à l’évidence : « un céréalier ne s’en sort pas. Et il ne peut pas couvrir ses prix sur le marché à terme ». Les cours sont trop bas. «Aujourd’hui, il n’y a plus de PAC pour les céréales, analyse l'économiste. La seule chose possible, c’est de faire le gros dos en attendant que les marchés soient davantage porteurs. Le prix du blé est mondial. » Le spécialiste souhaiterait que les exploitants puissent faire des provisions défiscalisées pour « fluctuations de cours »... Un serpent de mer qui jusqu'ici n'a pas trouvé de vraie solution. Chez Momagri, think tank présidé par Pierre Pagesse, également président de Limagrain, l’économiste Frédéric Courleux prêche lui pour un système de paiements contracycliques à l’américaine. Pour lui, « en agriculture, les prix réels ne correspondent qu’accidentellement aux prix d’équilibre », soit ceux capables de satisfaire les producteurs les moins compétitifs parmi ceux nécessaires à la constitution de l’offre mondiale. Il faut donc un système de régulation globale pour pallier cette inadéquation.
À l’ANMF (meunerie française), Bernard Valluis met pour sa part en garde sur les moyens de répartir autrement la valeur ajoutée : « nous sommes sur un marché de commodités. On peut créer de la valeur quand on arrive à se distinguer à l’aide d’un cahier des charges et d’un contrat. Le blé CRC (culture raisonnée contrôlée) est le plus connu mais ne représente que de très faibles volumes. Cela ne peut fonctionner que si toute la filière est impliquée et pour des volumes limités. À moins de risquer la banalisation ».