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[Covid-19] Les grandes cultures lancées dans la bataille

La filière céréalière s’implique fortement dans la lutte contre le coronavirus, au travers notamment de la production de gel hydroalcoolique et les dons de matériel de protection.

Les filières betteravière et céréalière ont accru leur production d'alcool et distribuent du gel hydroalcoolique au personnel soignant. © G. Omnès
Les filières betteravière et céréalière ont accru leur production d'alcool et distribuent du gel hydroalcoolique au personnel soignant.
© G. Omnès

Une implication massive, depuis les lignes arrière (garantir l’approvisionnement alimentaire du pays) jusqu’à la fabrication de munitions (production de gel hydroalcoolique)… Dans la « guerre » déclarée au coronavirus, selon les termes du président Macron, la participation de la filière des grandes cultures à l’effort national est conséquente. À l’arrière, les troupes ne se battent pas au contact de la maladie, mais sont opérationnelles dans les champs et dans les silos pour assurer l’alimentation de la population. Jusqu’ici, ces bataillons n’ont pas fait défaut. Les agriculteurs ont eu accès aux intrants nécessaires pour les semis de printemps, notamment grâce au travail des coopératives et négoces.

Il n’y a donc pas de pénurie en vue en ce qui concerne l’appro, au moins jusqu’à l’automne — sous réserve que la logistique tienne bon. « L’ensemble de la filière céréalière et agricole française est vraiment mobilisé pour que les agriculteurs puissent continuer à produire. On ne peut pas faire plus ! », assurait, dès l’annonce du confinement, Sandrine Hallot, directrice du pôle métiers à la fédération nationale du négoce. De même, côté alimentaire, industriels et ateliers de transformation à la ferme ont tous, à leur niveau, mis les bouchées doubles pour satisfaire la demande. C’est notamment le cas pour approvisionner grandes surfaces et circuits courts en sachets de farine, dont la demande a explosé. Les fabricants de pâtes industrielles ont eux aussi adapté leurs lignes de production pour tenir le rythme, face à une consommation qui a plus que doublé du jour au lendemain.

Plein pot sur le gel hydroalcoolique

La filière des grandes cultures ne se contente pas de remplir les assiettes : elle fourbit aussi les armes face au coronavirus. Le gel hydroalcoolique est devenu en quelques jours un produit de première nécessité, tandis que les équipes soignantes et les travailleurs encore à leurs postes étaient confrontés à une pénurie sévère. Or, comme son nom l’indique, ce premier rempart contre le virus est composé à plus de 80 % d’alcool (complété par de l’eau oxygénée et du glycérol), ingrédient qui peut être obtenu à partir de betteraves ou de céréales. Les géants sucriers français, également éthanoliers, ont ainsi massivement réorienté leur production d’alcool vers la production de gel hydroalcoolique. Cette adaptation s’est faite au détriment des débouchés tels que les biocarburants, la parfumerie et les spiritueux, secteurs qui ont subi un effondrement de la demande.

Des lignes de production réorientées

Dès la mi-mars, Cristal Union annonçait avoir décidé « d’arrêter la production de bioéthanol à la distillerie d’Arcis-sur-Aube pour réorienter sa production vers de l’alcool surfin 96°, nécessaire à la production de produits désinfectants ». Le groupe coopératif expliquait avoir pour cela réorienté ses quatre sites afin d’accroître sa capacité de production de 2 à 10 millions de litres en mars. Même stratégie du côté de Tereos. Début mars, la coopérative était déjà fortement sollicitée par des pharmacies et hôpitaux en manque d’alcool. L’arrêté gouvernemental du 13 mars a ensuite élargi les autorisations de fabrication de solution hydroalcoolique afin de lutter contre la pénurie.

Tereos s’est alors lancé dans la production du produit fini. « C’était un défi, car nos usines n’avaient jamais fabriqué de gel hydroalcoolique auparavant », explique Olivier Leducq, directeur de Tereos Sucre Europe. Les équipes ont dû apprivoiser un nouveau process, mais aussi développer une logistique pour livrer de petits volumes (5 et 10 litres), bien éloignés des citernes manipulées habituellement par l’industriel. Au 10 avril, Tereos revendiquait 70 000 litres de solution mis gracieusement à disposition des Agences régionales de santé, et 5 500 litres distribués à ses agriculteurs coopérateurs.

Une production de gel hydroalcoolique multipliée par dix en France

Les céréales ont aussi apporté leur écot. La filiale ARD du groupe coopératif Vivescia (Grand Est), spécialisée dans la chimie verte, s’est mobilisée en mars pour produire des solutions hydroalcooliques et fournir dans un premier temps, ARD et les salariés du groupe, ainsi que plusieurs sites de ses filiales industrielles. Du fait de la demande émanant de centres hospitaliers du Grand Est, la capacité de production de solution hydroalcoolique devait être portée de 5000 à 7000 litres par jour. Au total, la fabrication française de gel hydroalcoolique atteint désormais de 550 000 litres par jour, soit dix fois plus qu’avant la crise. Toutes matières premières confondu, ce débouché représente désormais 7 % de la production française d’alcool éthylique, contre moins de 1 % il y a encore quelques semaines. Cette hausse ne compense toutefois qu'à peine la perte de demande dans les spiritueux et les parfums, utilisations courantes de l'alcool traditionnel.

Des masques homologués fabriqués en chanvre

Même le chanvre s’y met, mais pour la fabrication de masques. L’entreprise Géochanvre, dans l’Yonne, a valorisé son savoir-faire dans le domaine des toiles de paillage pour démarrer la production de masques en chanvre. Ses modèles ont été homologués par les pouvoirs publics, et il est prévu de commercialiser plus de 200 000 masques par semaine.

L’appui est aussi organisationnel. Partout sur le territoire, des coopératives ont ouvert des points d’accueil pour les chauffeurs routiers, avec douche et cuisine. Les conditions de travail des routiers s’étaient en effet fortement dégradées avec la fermeture de nombreux restaurants et stations-service. Plus symboliquement, des agriculteurs ont tracé de gigantesques « mercis » dans leurs parcelles à l’aide d’outils de travail du sol à destination du corps médical. Des images qui ont fait le tour des médias.

Des dons d’équipements de protection par milliers

Coopératives, négoces, instituts de recherche, mais aussi simples agriculteurs… Toute la filière agricole s’est mobilisée pour collecter des équipements de protection employés au champ ou dans les bâtiments d’élevage. Masques chirurgicaux ou FFP2, utilisés lors de l’application de produits phytosanitaires, équipements de protection individuels tels que blouses et gants ont été livrés par dizaines de milliers aux médecins, pharmaciens et hôpitaux. L’apport du monde agricole a été d’autant plus utile que ce matériel se trouvait disséminé dans des zones rurales, où la pénurie était particulièrement criante pour les professionnels de santé.

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