Tomate : un prototype de souffleur/aspirateur en test contre les ravageurs
La protection physique par aspiration est déjà utilisée par certains producteurs de tomate en serre chauffée. Un prototype couplant soufflage et aspiration a été testé par le CTIFL, montrant une bonne efficacité sur les aleurodes notamment.
La protection physique par aspiration est déjà utilisée par certains producteurs de tomate en serre chauffée. Un prototype couplant soufflage et aspiration a été testé par le CTIFL, montrant une bonne efficacité sur les aleurodes notamment.
Dans les stratégies de protection contre les ravageurs, des méthodes de protection physique telles que l’aspiration se développent en complément des solutions chimiques et biologiques. Celle-ci est déjà utilisée en culture sous serre verre chauffée dans le Sud-Est de la France à partir d’outils autoconstruits, avec une efficacité démontrée pour capturer les thrips ou les aleurodes. Toutefois, elle reste peu utilisée en culture maraîchère sous abri.
Possibilité de réduire les effectifs de 60 à 80 %
Une enquête réalisée par le CTIFL auprès des producteurs de tomate hors-sol a permis de faire ressortir les principaux avantages et inconvénients de cette technique. « Les observations réalisées chez les producteurs ont montré que le recours à un système d’aspiration était efficace pour contrôler les adultes de Nesidiocoris. En un seul passage, il est possible de réduire les effectifs de ce ravageur de 60 à 80 % », témoignent Benjamin Gard et Amélie Bardel du CTIFL, dans un article paru dans Infos CTIFL. Cependant, cette technique est surtout efficace sur les adultes et impacte peu les larves quel que soit leur stade.
De plus, même si l’impact sur l’auxiliaire Macrolophus pygmaeus reste limité, il n’est pas négligeable. Il est donc très important de veiller à réaliser les aspirations lorsque M. pygmaeus est moins présent en tête de plante, c’est-à-dire lors des périodes chaudes. D’autant plus qu’à partir de juillet, les populations de cet auxiliaire diminuent naturellement avec l’arrivée des fortes chaleurs dans le Sud-Est. « En l’absence d’appareil dédié, les producteurs développent leur propre matériel. La mise au point d’un système spécifique contribuerait à développer cette méthode », font remarquer les auteurs (voir encadré).
C’est pourquoi, dans le cadre du projet Label, le CTIFL a réalisé un essai avec un prototype qui, contrairement aux systèmes d’aspiration utilisés jusqu’à présent par les producteurs, associe deux actions : la soufflerie et l’aspiration. « À niveau d’énergie équivalent, la soufflerie est plus puissante que l’aspiration et plus efficace pour décoller les insectes des plantes. Elle crée une turbulence qui favorise l’envol des stades adultes et le décrochage des larves », expliquent Benjamin Gard et Amélie Bardel. Les insectes sont ensuite soufflés vers la partie aspiration qui les collecte. Ils sont retenus dans un sac en tissu insect-proof, positionné à l’arrière du système d’aspiration. Les insectes ainsi collectés peuvent être facilement éliminés. Les deux éléments du prototype - la soufflerie et l’aspirateur - sont chacun installés sur un chariot de récolte avançant en parallèle de part et d’autre du rang à traiter.
Le système permettrait d’économiser un IFT
« Le prototype testé est très efficace pour la gestion des populations d’aleurodes adultes. Les taux obtenus d’abattement de la population, après un aller-retour sur le rang, varient de 66 à 90 %, ce qui équivaut à l’efficacité d’une application d’un insecticide conventionnel. Un passage aller-retour avec ce système permettrait d’économiser un indice de fréquence de traitement », précisent les expérimentateurs. Cependant, l’impact sur les adultes de l’auxiliaire Macrolophus n’est pas négligeable. En termes d’utilisation, ce système implique le travail simultané de deux opérateurs pour un passage alors que les aspirateurs simples utilisés dans les exploitations ne mobilisent qu’une personne.
En revanche, la vitesse d’avancement est beaucoup plus élevée qu’avec les aspirateurs actuels ce qui pourrait pallier l’augmentation de main-d’œuvre nécessaire. Le prototype s’adapte aux chariots habituellement utilisés en serre de tomates, ainsi l’investissement nécessaire pour les exploitations se limiterait donc à la machine seule. « Trois évaluations du prototype ont pu être effectuées au cours du projet. Après chaque évaluation en serre, un bilan technique a été dressé et communiqué au concepteur, afin d’identifier les pistes d’amélioration et de réaliser les modifications », mentionnent Benjamin Gard et Amélie Bardel.
Un impact élevé sur les auxiliaires
Des observations réalisées ont mis en évidence une très bonne efficacité du prototype, après avoir testé les deux types de vitesse d’avancement. À faible vitesse d’avancement, la diminution constatée de la population d’aleurodes est de 90 % ; à vitesse d’avancement rapide, la diminution constatée est de 88 %. « L’augmentation de la vitesse d’avancement ne diminue pas l’efficacité de l’appareil. Il est donc tout à fait envisageable de maintenir une vitesse élevée ce qui permet d’optimiser le temps de passage dans les rangs », expliquent-ils. Par conséquent, l’impact sur les auxiliaires reste toujours élevé.
En effet, une diminution de 74 % des Macrolophus adultes est observée avec une vitesse faible d’avancement tandis que cette diminution est de 68 % pour la vitesse rapide. Sur les deux années du projet, le ravageur Nesidiocoris tenuis n’a jamais été observé au CTIFL. L’impact du prototype sur cette punaise, responsable d’importants dégâts en culture hors-sol dans le Sud-Est, n’a pas pu être déterminé. « Macrolophus et Nesidiocoris sont deux punaises très proches sur le plan taxinomique et les résultats obtenus sur Macrolophus peuvent être extrapolés pour Nesidiocoris. Ces résultats suggèrent donc que le prototype aurait une bonne efficacité sur le stade adulte de Nesidiocoris mais faible sur le stade larvaire », mentionne l’article.
« En ajoutant un dispositif pour modifier la taille de la lame d’air, il serait possible de traiter de façon plus précise les têtes des plantes (l’apex et les deux ou trois premières feuilles vraies) et ne toucher que la zone où se concentre le ravageur Nesidiocoris. En effet, en période chaude, les deux espèces se séparent et chacune réside dans une zone de la plante : Nesidiocoris en tête et Macrolophus en milieu de plante », proposent les auteurs comme voie de progrès.
Avantages et inconvénients de la technique d’aspiration (selon les utilisateurs)
Les plus
Une efficacité permettant un bon nettoyage des foyers
Une réduction du nombre de traitements chimiques
Une facilité de mise en œuvre
Une applicabilité même en présence de personnel dans la serre
Les moins
Un temps de passage long
Un bruit fort, surtout pour un appareil thermique
Une efficacité réduite aux adultes
Une formation du personnel est nécessaire
Des aspirateurs autoconstruits
Aubergine : un prototype pour aspirer les punaises
« Une réunion de co-conception entre l’équipe machinisme d’Invenio et les techniciens des structures productrices d’aubergines et adhérentes à Invenio a permis de préciser le cahier des charges de l’outil pour aboutir à Aspa », relate Fanny Thiery, responsable du pôle Aubergine à Invenio. Ainsi, l’aspirateur doit pouvoir traiter 0,3 à 0,4 ha/h sur une hauteur minimale de 50 cm, et doit capturer au minimum 40 à 60 % des populations de punaises présentes sur la culture avec une aspiration de chaque côté des rangs. Parallèlement, des tests de moment d’aspiration dans la journée ont été menés pour augmenter l’efficacité agronomique de l’outil.