Bio
Quelles solutions imaginent les Italiens pour remédier à la baisse de consommation du bio ?
Les entreprises du projet européen de promotion Made In Nature piloté par CSO Italy ont débattu lors d’un webinaire de la baisse de consommation du bio en Italie et en Europe et des leviers pour y remédier :promotion et informations fiables, élargissement de l'offre en linéaire, segmentation par les prix.
Les entreprises du projet européen de promotion Made In Nature piloté par CSO Italy ont débattu lors d’un webinaire de la baisse de consommation du bio en Italie et en Europe et des leviers pour y remédier :promotion et informations fiables, élargissement de l'offre en linéaire, segmentation par les prix.
L’attention croissante des consommateurs pour une alimentation saine et de qualité promet un avenir glorieux au bio. Du moins, c’est ce qu’estiment les opérateurs italiens. Mais la consommation de bio, en Italie comme sur les autres marchés européens, n’est-elle pas en souffrance ?
La consommation de fruits et légumes bio en Italie ces dernières années se portait bien, elle se maintenait même malgré le contexte : 2020 et 2021 avaient certes observé une légère baisse de 1 à 2 points de pourcentage, mais cette perte de dynamique restait loin de la chute de la consommation des fruits et légumes conventionnels (-8 à -10 %), selon le CSO Italy. « Mais depuis 7-8 mois, le bio lui aussi subi une baisse substantielle dans sa consommation, à -8 % (-14 % pour le conventionnel), regrette Paolo Bruni, président de CSO Italy, lors d’un webinaire de Made In Nature le 11 janvier. La crise économique qui affecte l’Europe -et le reste du monde- se fait ressentir sur la consommation bio. »
Le projet Made In Nature. Le programme de promotion “Made in Nature : Découvrez les valeurs du bio européen” est financé par l’UE et par le CSO Italy (2,2 M€ pour la période triennale 2022-2025 : 1er février 2022 au 31 janvier 2025) et vise à renforcer auprès des consommateurs et des opérateurs les connaissances sur la qualité et la valeur de l’agriculture biologique et pousser les dynamiques de production et de consommation. Les entreprises italiennes participantes au projet sont : Brio, Orogel Fresco, Canova, Conserve Italia, Ceradini Group, Very Bio.
D’autant plus que les coûts progressent fortement. Exemple : la plupart du bio doit être vendu emballé mais les attaques avant-guerre contre les matériaux plastique et donc la migration vers des emballages éco-compatibles ont causé une hausse des coûts bien avant la crise économique, cette dernière accentuant le phénomène. « Aujourd’hui il y a nécessité d’avoir des prix de vente de certains produits très élevés, ce qui impacte la consommation », témoigne Vincenzo Finelli, directeur général d’Orogel Fresco.
Difficulté de consommation aussi sur les marchés export
Même constat sur les autres marchés européens, avec plus d’appétence au Nord qu’au Sud. Mais les revenus y sont différents. « La facture énergétique par exemple en Italie, en Espagne et dans une moindre mesure en France et en Allemagne y a été plus impactante que dans le nord de l’UE, il ne faut donc pas tirer de conclusion structurelle à la baisse de consommation du bio, c’est économique. Pour preuve, regardez l’essor des magasins discount depuis le début de la crise », souligne Paolo De Castro, membre de la Commission pour l'agriculture au Parlement européen.
Certains marchés se révèlent intéressés par le bio mais sont freinés par une question de revenus par habitant, en particulier en Europe de l’Est (Pologne, Roumanie, Slovénie, les Balkans) selon Conserve Italia, qui exporte du bio vers plus de 80 pays.
Au Royaume-Uni, pourtant très avancé sur le sujet des marques, les consommateurs souffriraient d’un manque de confiance vis-à-vis de la certification bio européenne, selon Nielsen. « Ce qui poussent les chaînes de distribution à référencer le bio et le conventionnel au même prix », regrette Sandra Sangiuolo, responsable marketing export de Conserve Italia. Au contraire, les Allemands, pourtant très sensibles à la question du prix, sont prêts à payer plus chers pour du bio du fait d’une conscience écologique plus exacerbée (20 % d’entre eux selon Nielsen) et les magasins discount ont tous un espace bio.
Conserver et élargir l’offre en rayon… et la segmenter par le prix
L’enjeu premier est de garder l’offre dans les linéaires. « Le bio s’est développé par l’essor de l’offre. Si aujourd’hui on réduit l’offre, on va inévitablement réduire la consommation », estime Vincenzo Finelli.
Relancer la présence du bio en linéaire, oui, mais les témoins du webinaire appellent aussi à différencier la gamme par le prix pour répondre aux différences de pouvoir d’achat. « Il faut créer dans le bio une échelle de prix comme ce qu’a fait le conventionnel, peut-être pas aussi poussé », affirme Paolo Pari, directeur marketing de Canova.
C’est d’ailleurs un des projets sur lequel travaille Made In Nature, avec des relevés de références de fruits et légumes dans des points de vente de la GMS italienne de grandes villes comme Bologne, Milan… « Par exemple, en pomme, un magasin va proposer 9 références au moins, voire 14, en conventionne, et seulement deux ou trois en bio, témoigne Paolo Bruni. On doit réussir, avec la distribution, à élargir la gamme, pour que le bio ne soit plus seulement une seule référence dans un beau packaging mais aussi différencié par les prix. »
Un « pacte de confiance » à respecter
Enfin, la nourriture a toujours eu, en Italie, en France…, une valeur refuge de réconfort, thérapeutique, avec pour le bio la valeur ajoutée d’avoir la sensation de faire du bien à son corps et à la planète. Les témoins appellent donc à continuer la promotion et l’éducation à une alimentation saine et de qualité. Paolo De Castro plussoie : « Il faut travailler sur l’image de la bio et de l’agriculture en général écornée par des émissions TV sans base scientifique. La promotion et des informations correctes sur la qualité du bio, les conditions… »
Andrea Bertoldi, directeur des affaires générales de Brio, estime que le bio surmontera cette crise grâce à sa certification européenne « qui lui donne une définition claire » et les contrôles, « aspect fondamental » qui garantit la promesse. « Le consommateur pose souvent la question de ce qu’est un produit bio. C’est important de lui donner une réponse claire car s’il y a un accord de confiance entre les opérateurs et le consommateur, celui-ci est prêt à payer plus cher pour un produit garanti plus sain pour sa santé et pour la planète. »
La concurrence des labels de 3e voie
La confiance, elle doit se situer sur toutes les promesses. Et c’est pour cette raison que Conserve Italia a décidé de continuer sur le marché français avec le bio, qui donne des « résultats satisfaisants », plutôt qu’avec un label de 3e voie.
Sandra Sangiuolo, responsable marketing export de Conserve Italia, relate : « Le marché français est très critique et voit depuis deux-trois ans la croissance de labels zéro/sans pesticides qui pourrait être un frein au développement du bio. Chez Conserve Italia, nous avons exploré cette voie de zéro pesticides qui est un avantage compétitif mais nous avons observé des difficultés pour garantir avec sécurité que tout ce qui est vendu sous cette définition sera à l’épreuve ; et nous nous demandons comment d’autres acteurs peuvent le déclarer si calmement. »