Frédéric Jaunault
« Porter la bonne parole des fruits et légumes »




Frédéric Jaunault est certainement le MOF Primeur 2011 dont le parcours demeure le plus atypique. En effet, s’il peut s’enorgueillir de parents grossistes en fruits et légumes sur le marché de Rennes et de grands-parents solognots, producteurs d’asperges et de fraises, il s’est tourné vers les “pianos” des grandes cuisines et non vers les balances Roberval : « Devenir cuisinier, c’était instinctif chez moi, je crois que j’ai toujours voulu faire cela. Même si dès l’âge de 8 ans je ramassais les asperges en saison dans l’exploitation de mes grands-parents… » L’expérience professionnelle de Frédéric Jaunault croise des hauts lieux de la gastronomie : le Plazza Athénée, Ledoyen, Concorde Lafayette sans oublier des parenthèses aux Etats-Unis et aux Bermudes avant de prendre en mains comme chef adjoint les cuisines du Normandie à Deauville et du Picardie au Touquet. Et finalement, d’assurer la direction d’un des plus grands traiteurs de la place parisienne. « J’ai rapidement compris toute l’importance des fruits et légumes au Touquet où nous achetions les fruits et légumes du restaurant sur les marchés. A l’époque, mon épouse et moi avions acheté un hôtel et j’ai compris qu’il n’y avait pas que la cuisine, que derrière il y avait des hommes et des produits et l’importance des fruits et légumes pour les métiers de bouche ». Frédéric Jaunault s’est alors rapproché d’Aprifel dont il a été membre du comité culinaire. Il s’investit dans les écoles afin de porter la bonne parole des fruits et légumes aux plus jeunes. Jusqu’à la naissance de Créasaveurs, sa société d’identité culinaire où, pour certains grossistes de Rungis et leurs clients, il se fait l’avocat du produit de proximité et de saison. De là à se présenter au MOF, il n’y avait qu’un pas : « Même si je suis un cuisinier, dans l’esprit je me sens plus proche du métier de primeurs, j’en suis imprégné depuis des années. » Retour sur ce vrai parcours du combattant. « Les demi-finales furent un moment magnifique où j’ai rencontré de vrais amis. En revanche, la finale a été très dure de par la pression. J’ai cherché à sublimer les fruits et légumes. Je me suis focalisé sur la diversité et la simplicité : j’ai présenté cinq variétés de fraises, dont une blanche, sept radis, six carottes… et des recettes simples, carpaccio de tomates avec une herbe fine par exemple. Et puis ce clin d’œil à mon grand-père, à mes parents et à l’époque où je ramassais les asperges avec lui : des cagettes remplies de produits de saison. » Sa participation a été remarquée : « C’est vrai, certains compétiteurs ont pu se demander ce que venait faire là un traiteur mais au bout du compte, nous nous sommes aperçus que nous défendions les mêmes valeurs. Je suis un peu un défenseur des fruits et légumes sans magasin. Etre MOF, c’est avoir l’écoute du monde car c’est une distinction prestigieuse et c’est une grande responsabilité car chaque parole compte. » S’il est une épreuve de la finale où Frédéric Jaunault s’est senti à l’aise, c’est bien celle de la sculpture sur fruits et légumes. Outre deux titres de Champion d’Europe artistique sur fruits et légumes, sa carrière est émaillée de grands moments liés à cette activité : la plus haute pyramide de cucurbitacées sculptées (3,53 m de hauteur et 106 pièces) lors du Congrès de la FNPL à Reims en 2007, la gigantesque scénographie (5 m de long, 1,5 m de large !) composée de fruits et légumes de France, pour Interfel au Sirha 2001… Ce côté artistique venu de la gastronomie, Frédéric Jaunault l’assume totalement : « Entretenir des liens avec le monde de la cuisine, je crois que c’est une opportunité à saisir pour les primeurs. Un peu comme les fleuristes ont fait leur révolution il y a une décennie en cessant d’être de simples vendeurs de fleurs. » Et l’autre cheval de bataille de Frédéric Jaunault, c’est la diffusion de la connaissance : « Trouver la bonne information est aujourd’hui un chemin de croix. Je travaille à une base de données sur Internet où il sera possible de trouver de façon simple, didactique et complète tout ce que l’on veut savoir sur les fruits et légumes. »