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Les Pays-Bas, nouveau pays de la poire

Des terres fertiles, de l’eau, un climat tempéré et une concurrence plus importante en production de pommes : aux Pays-Bas, les conditions sont réunies pour favoriser le développement de la poire.

La 13e édition d’Interpera, congrès international de la poire, s’est tenue pour la première fois à Rotterdam, aux Pays-Bas, où la production de poires se développe. En 20 ans, les surfaces sont passées de 6 000 ha à 10 000 ha et la production de 100 000 t à 400-450 000 t. Et alors que les surfaces de poires de l’Union Européenne ont diminué de 1,5 % de 2016 à 2020, elles ont encore augmenté de 1,7 % aux Pays-Bas. En 2021, année marquée par des gels tardifs, 340 000 t ont été commercialisées (-15 %), soit 20 % de la récolte européenne.

« En pomme, les Pays-Bas sont de plus en plus concurrencés par la Pologne, ce qui amène les arboriculteurs à s’intéresser à la poire, explique Richard Schouten, directeur de l’association des producteurs hollandais DPA (1), co-organisatrice d’Interpera avec l’Areflh (2). La variété Conférence fait la différence et s’exporte bien. » 50 % de la production se concentre dans la région centrale du Betuwe, qui bénéficie de la rivière Waal, qui relie l’Allemagne à Rotterdam, y déposant ses alluvions et de l’eau. 36 % se situe dans le Sud-ouest, le reste au nord du pays. Environ 600 arboriculteurs produisent des poires, regroupés à 70 % au sein d’organisations de producteurs, notamment Fruitmasters (400 membres au total), The Greenery (200 membres) et Oxin (250 membres, dont 85 producteurs de poires cultivant 900 ha et produisant 35 000 t).

Diversifier les variétés

75 % de la production repose sur la Conférence, variété d’automne de bonne qualité et se conservant bien, qui permet au pays d’exporter près de 85 % de sa récolte. Après l’embargo de 2014 de la Russie, alors principal débouché des poires hollandaises, d’autres destinations ont été développées. Les exportations se font aujourd’hui en Allemagne (20 %), Royaume-Uni (16 %), Pologne (7 %), Espagne (7 %), France (6 %), Asie, Mexique et pays de l’Est. 7 % du verger est en Doyenné du Comice, 6 % en Beurré Alexandre Lucas, 4 % en variétés anciennes et 9 % en nouvelles variétés. Depuis quelques années, la filière cherche en effet à diversifier son offre de poires.

 

« Il y a de la demande pour des poires rouges en Allemagne, Royaume-Uni, Scandinavie, explique Dirk van Hees, de la société de conseil Fruitconsult. Il y a aussi un marché pour des poires lisses au Moyen-Orient et en Asie et pour des poires à longue durée de conservation. De plus, pour un producteur, avoir plusieurs variétés allonge la période de récolte, ce qui facilite le recrutement. Conférence se récolte sur deux semaines et comme beaucoup de saisonniers viennent des pays de l’Est, ils ne veulent pas se déplacer pour une si courte période. » Les variétés retenues doivent permettre de bons prix, être productives et ne pas nécessiter trop de main-d’œuvre.

Quatre variétés se développent actuellement : Migo (250 ha), variété verte à peau lisse, sensible au russeting mais qui ne nécessite pas d’éclaircissage manuel et produit 50-55 t/ha, Xenia (250 ha), variété verte très productive (80-90 t/ha), de bon goût et bonne conservation, Sweet Sensation (230 ha), variété blushée rouge de bel aspect et goût, ne nécessitant pas d’éclaircissage manuel, produisant 35-45 t/ha, et Early Desire (80 ha), variété blushée rouge ne nécessitant pas d’éclaircissage manuel mais sensible aux maladies, produisant 50-55 t/ha.

Un contexte qui réduit la rentabilité

En 2022, en l’absence de gels, les volumes devraient être supérieurs à ceux de 2021, proches du potentiel de 400 000 à 500 000 t. La consommation de poire étant stable voire en légère en baisse aux Pays-Bas, la filière s’inquiète donc des conséquences de la guerre en Ukraine. « Les prix ont été bons jusqu’au début de la guerre, indique Joop Vernooij, directeur commercial à Frupaks-Vernooij. La guerre et l’arrêt des importations de la Biélorussie ont réduit nos espoirs. » A la perte des marchés en Ukraine et en Biélorussie, qui représentaient jusqu’ici 7 000 t/an, s’ajoute la crainte d’une baisse de consommation des fruits et légumes, encore plus en poire, liée au pouvoir d’achat et l’augmentation des coûts de production. Les producteurs doivent aussi trouver des solutions pour répondre aux attentes réglementaires et sociétales sur la réduction des pesticides. Dans ce contexte, la production de poires aux Pays-Bas pourrait donc se stabiliser momentanément.

(1) Dutch Produce Association
(2) Assemblée des régions fruitières légumières et horticoles

45 ha de poiriers avec vente en direct

 
Van Ossenbruggen Fruits a investi récemment dans une station moderne de calibrage et conditionnement des poires. © V. Bargain

Située dans le Betuwe, Van Ossenbruggen cultive 45 ha de pommes et 45 ha de poires, 37 ha en Conférence, 5 ha en Lucas, le reste en Triomphe de Vienne et Gieser Wildeman (transformation). 60 % de sa récolte est exportée en Scandinavie, Espagne, Pologne, pays de l’Est. Pour vendre en direct, elle dispose de chambres ULO d’une capacité de 10 000 t et vient d’investir dans une station moderne de calibrage et conditionnement. « Cette station qui peut traiter 1 200 à 1 300 t/jour de poires va permettre d’augmenter nos capacités, explique Jetty van Ossenbruggen, gérante de l’entreprise. Elle améliore aussi la qualité, grâce au système de vision de la qualité interne et à un dispositif de purification de l’eau. » Les rendements sont en moyenne de 50 t/ha, ce qui permet de commercialiser 2 200 t/an de poires. Toute la surface est protégée du gel par aspersion et les producteurs s’interrogent sur l’intérêt de filets paragrêle.

En 2017, Van Ossenbruggen a commencé à protéger son verger du psylle selon la méthode LBS du Groupe Alliance. « Le psylle pose de gros soucis, explique Ries Spries, responsable du verger, mais nous voulons réduire les pesticides pour répondre à la réglementation et à la demande de nos clients. » Depuis 2017, des bandes fleuries du mélange Invito d’Alliance sont semées entre les rangs pour attirer les prédateurs du psylle du poirier, entre les passages de roues des tracteurs, avec un système de fauche qui les préserve. Des hôtels à insectes sont aussi installés pour retenir les auxiliaires en hiver. Et le sol sur le rang est couvert d’un paillis qui améliore sa structure, favorise l’hibernation des dermaptères, prédateurs du psylle, et attire des collemboles, appréciés des auxiliaires.

 

Migo en diversification

 
La stratégie marketing avec la variété club Migo est d’en faire une poire à emporter. © V. Bargain

Situé dans le Betuwe, près de la rivière Waal, qui assure des sols humiques et humides, Bezend Jan van Westreenen exploite 30 ha de pommes et 45 ha de poires, dans le cadre de la coopérative FruitMasters. 37 ha sont en Conférence, avec des vergers anciens mais toujours productifs, et 7 ha en Migo, plantés en 2018, 2019 et 2021. Sur ces terres fertiles, qui se négocient 180 000 €/ha, les fruitiers poussent bien et le producteur récolte en moyenne 62 t/ha en Conférence. Ces dernières années, les développements en poire ont porté sur la variété club Migo.

« Les jeunes aiment Migo parce qu’elle est croquante et facile à manger. Les deux premières années sont un peu compliquées. Mais ensuite, elle se conduit facilement et est productive. Elle nécessite moins d’eau et de fertilisants que Conférence et est moins fragile et plus facile à récolter grâce à son pédoncule long et solide. » La facilité de récolte et le fait qu’elle ne nécessite pas d’éclaircissage manuel sont importants, car la main-d’œuvre est difficile à trouver, ce qui a notamment amené le producteur à créer 22 places d’hébergement pour les saisonniers. Migo est aussi mieux valorisée, à 1,50 €/kg sortie de champ en 2021-2022, contre tout de même 0,90 €/kg pour Conférence. Le marché étant actuellement à l’équilibre, le producteur a toutefois arrêté les plantations de Migo pour l’instant.

 

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