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Chou-fleur : pourquoi le système racinaire intéresse la recherche

Le changement climatique et la nécessité de réduire les intrants amènent les sélectionneurs et expérimentateurs à s’intéresser de plus près au système racinaire des choux.

« Jusqu’à présent, le système racinaire des légumes était peu exploré, car la sélection se faisait sur ce qui est visible », constate Damien Penguilly, du Comité d’action technique et économique (Caté), à Saint-Pol-de-Léon. Depuis quelques années toutefois, les chercheurs, sélectionneurs et expérimentateurs s’intéressent de plus en plus au système racinaire. En Bretagne, des recherches sont menées depuis deux ans sur le système racinaire du chou-fleur. « Le système racinaire des plantes est un point clé de l’adaptation des espèces au changement climatique, assure David Esnault, responsable développement à l’OBS, l’Organisation bretonne de sélection. Or, alors que la Bretagne bénéficiait jusqu’ici de pluies assez régulières sur l’année, il y a de plus en plus de variations dans la répartition des pluies, avec un manque d’eau en été, qui provoque des stress hydriques pour les plantes, des excès d’eau en hiver, qui peuvent entraîner des problèmes d’asphyxie, Phytophthora et autres maladies fongiques, et parfois des excès d’eau en été favorables à la hernie. La région ayant peu de nappes phréatiques, les contraintes sur l’irrigation sont par ailleurs de plus en plus fortes. Tous ces éléments nous amènent à nous intéresser de plus près au système racinaire qui, par son architecture, peut être plus ou moins efficace par rapport au manque ou aux excès d’eau. »

Le développement du pivot et des radicelles, la ramification des racines, leur orientation à l’horizontale ou en profondeur, la cinétique de croissance à la plantation et à la reprise au printemps… sont en effet essentiels dans la captation de l’eau. Un autre aspect amenant les chercheurs à s’intéresser au système racinaire est la nécessité de réduire les engrais, pour des raisons environnementales, de coût et de disponibilité. « Selon son architecture, le système racinaire peut être plus ou moins performant pour explorer le sol et capter les éléments fertilisants et oligo-éléments », souligne David Esnault.

De grosses différences observées

Des travaux sont menés notamment depuis deux ans dans le cadre du projet ClimatVeg, qui associe 80 partenaires de Bretagne et Pays de la Loire et vise à mieux comprendre les modifications du climat, à élaborer des scénarios d’adaptation et à identifier des solutions innovantes permettant de rendre la filière végétale plus résiliente, notamment par le choix des variétés. « En 2021, le Caté a évalué 30 variétés de chou-fleur et constaté de grosses variations au niveau des racines, indique Myriam Abgrall, du Caté. À l’été 2022, des essais ont donc été menés pour tester 35 génétiques à cycle court en situation de stress hydrique. Nous avons observé de grosses différences de comportement des plants selon le type de système racinaire. Les résultats sont en cours d’analyse. » Des observations en 2021-2022 ont également montré des différences de comportement face aux excès d’eau selon le type de mini-mottes utilisé pour les plants.

« Le type de plaque pourrait avoir un impact sur le développement racinaire et la façon dont la plante absorbe l’eau, précise Myriam Abgrall. En 2022-2023, nous allons mener des essais avec répétitions sur cet aspect. » Une difficulté pour l’instant est la caractérisation du système racinaire. « Actuellement, nous arrachons les plants et prenons des photos des racines, explique Myriam Abgrall. Mais nous avons besoin de critères pour caractériser et trier les différents systèmes racinaires. Nous travaillons notamment sur un outil simple d’analyse d’images pour déterminer la surface du système racinaire. » Un objectif à plus long terme pour Vegenov, centre de recherche appliquée partenaire de l’OBS, est aussi d’identifier des marqueurs génétiques permettant une modélisation du système racinaire. « L’idée avec la modélisation serait d’avoir un protocole simple pour piloter les croisements dans l’objectif d’obtenir des systèmes racinaires particulièrement intéressants par rapport aux stress hydriques ou aux excès d’eau », précise David Esnault.

Une sélection complexe

Sakata, spécialiste du brocoli et des choux, travaille également sur des systèmes racinaires plus performants par rapport à l’eau et aux nutriments, adaptés à des conditions plus sèches et parfois plus salines, ou encore plus tolérants aux excès d’eau. « Le changement climatique et la nécessité de réduire les intrants amènent à travailler sur des variétés plus performantes par rapport à l’eau et aux nutriments, analyse Johannes Pfeifer, chef produits Brassica en Allemagne de Sakata. Il est toutefois très compliqué de sélectionner des variétés qui aient à la fois des qualités face au manque d’eau et face aux excès d’eau. Or, les années se suivent et ne se ressemblent pas. » Alors qu’en 2021, il y a eu beaucoup de pluie en Allemagne, l’été 2022 a en effet été très sec. « Or, si la variété a un système racinaire très développé et qu’il pleut beaucoup, il y a un risque en choux cabus que les racines pompent trop d’eau et entraînent l’éclatement de la tête. Une autre piste est donc d’adapter l’irrigation quand elle est possible. »

Présentation et résistances

Les principales demandes des producteurs de choux, au-delà de l’adaptation au changement climatique et à la baisse des intrants, portent sur le rendement et la présentation qui doit répondre aux attentes du marché.

En chou-fleur, l’objectif est d’avoir une tête bien blanche, bien couverte, avec des feuilles sans taches, ce qui implique la maîtrise des maladies aériennes, notamment du Mycosphaerella. Des variétés de bon comportement au Mycosphaerella sont désormais disponibles. Un programme de recherche, Gwassica, porté par l’OBS, a aussi été mené de 2018 à 2021 sur des variétés ayant besoin de moins de froid pour pommer, les automnes et hivers plus doux entraînant déjà des problèmes de pommaison. Grâce à l’utilisation de marqueurs moléculaires mis au point par Vegenov, de nouvelles ressources génétiques répondant à ces évolutions ont été identifiées. En brocoli, les critères de sélection sont une tête ronde, aux grains fins, d’un vert foncé qui ne vire pas au jaune, d’un poids de 500 g. La résistance ou la tolérance au mildiou et à l’Alternaria est également recherchée. En choux cabus, un critère important est le poids, avec des variations selon le type, le créneau et les attentes des consommateurs. « Plus on va à l’Est, plus les consommateurs acceptent une taille de chou élevée, note Johannes Pfeifer. Le poids recherché est de 1,5 kg aux Pays-Bas, 2 kg en Allemagne, 2,5-3 kg en Pologne et 4 kg en Russie. » Le goût est également important et travaillé par les sélectionneurs, avec aujourd’hui la recherche de variétés plutôt sucrées, peu poivrées et de feuilles plus tendres permettant plus de flexibilité d’utilisation. La durée du cycle et la tenue au champ sont également importantes pour tous les choux, avec des variétés précoces arrivant vite à maturité et d’autres aux cycles plus longs et pouvant attendre au champ. Autre critère à l’étude : la résistance/tolérance à la hernie qui peut être favorisée par des parcelles inondées en fin d’été. Si quelques cultivars résistants à la hernie existent, ils ne sont en général résistants qu’à certaines races du pathogène.

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