Légumes d’industrie : comment s’affranchir des problèmes de main-d’œuvre ?
En production comme en usine, la filière des légumes d’industrie souffre de difficultés à recruter : saisonniers dans les champs, métiers techniques en usine. Face aux difficultés d’attractivité des métiers, des solutions existent.
En production comme en usine, la filière des légumes d’industrie souffre de difficultés à recruter : saisonniers dans les champs, métiers techniques en usine. Face aux difficultés d’attractivité des métiers, des solutions existent.
La gestion de l’eau, la diminution du nombre de molécules autorisées, la concurrence des grandes cultures… Les producteurs de légumes pour l’industrie font face à de nombreuses problématiques. La main-d’œuvre fait aussi partie du lot, à l’instar de nombreuses autres filières.
Lors d’une rencontre organisée par l’Unilet, l'interprofession française des légumes en conserve et surgelés, fin septembre en Bretagne, producteurs et industriels ont partagé leur quotidien, leur engagement, leurs innovations, leurs difficultés. Dans cet article, le point sur la main-d’œuvre.
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Tension de main-d’œuvre sur les cultures en récolte manuelle
Si les poids lourds en légumes d’industrie (pois, haricots… soit 90 à 95 % des cultures), sont mécanisées, les petites productions (choux, potimarron, potiron, courgettes, etc.) sont en récolte manuelle.
« En production, il y a une forte tension pour les légumes nécessitant une récolte manuelle, la courgette par exemple, les cucurbitacées en général, mais aussi le chou-fleur, le brocoli… La récolte de la courgette nécessite 20 salariés pour 3 ha », illustre Didier Le Guellec, directeur Légumes industrie chez Eureden.
Jean-Claude Orhan, producteur et président du Cenaldi (et administrateur de la coopérative Eureden), témoigne : « En saison, j’ai des besoins de 300 personnes par jour ! »
Main-d’œuvre étrangère et groupement d’employeurs
Face à la difficulté de recruter (problème d’attractivité des métiers), les producteurs font appel à de la main-d’œuvre étrangère. Chez Jacques Cordroc’h, producteur à Arzano (Finistère), il s’agit de travailleurs de la communauté bulgare en Bretagne. « Certains sont fidélisés et reviennent chaque année », se réjouit-il.
Afin de simplifier les démarches administratives, Jacques Cordroc’h passe par CDM – Un Coup De Main, un groupement d’employeurs basé en Bretagne. Agissant comme prestataire de service, CDM s’occupe de gérer les recrutements, les paies, les déclarations… L’exploitant a juste à assurer le suivi RH (horaires, etc.) des travailleurs, ce qu’il peut faire via l’application sur son smartphone;
Et pour fidéliser ces travailleurs saisonniers, les producteurs ne lésinent pas sur les conditions d’accueil : logements, intégration, etc.
Mécaniser les récoltes
La filière, dans sa démarche Les Légumiers de Demain, s’est engagée à un plan de sensibilisation sur les métiers de la filière au grand public, afin de renforcer l’attractivité des métiers de la filière.
Un autre axe de solution face à la problématique de la main-d’œuvre : mécaniser les récoltes. La R&D permet des avancées.
Exemple : le céleri branche se récolte traditionnellement à la main : le producteur ou le saisonnier coupe à la machette le pied du céleri, pare les feuilles, et sépare le cœur du reste des tiges. Désormais, il sera possible de le faire mécaniquement. La coopérative Eureden a développé un prototype de machine, testé depuis l’année dernière.
Des machines onéreuses pour mutualiser
Le haricot vert se récolte en une fois à la machine. Il s’agit d’un système de peignes couplé à un système de ventilation pour éliminer les feuilles. Mais ce sont des machines onéreuses, de 600 000 à 700 000 €. C’est pourquoi c’est la coopérative (Eureden en l’occurrence) qui en fait l’acquisition directement et la met à la disposition de ses adhérents.
Le navet de Nancy est aussi récolté à la machine, que Jacques Cordroc’h a achetée. Le brocoli se fait encore à la main mais le producteur ne désespère pas de voir un jour la récolte mécanisée. « On y arrivera. Mais il faudra réussir à grouper la maturité pour que tous les brocolis puissent être récoltés en même temps en un passage. »
Dans les usines aussi
A l’aval aussi, des tensions apparaissent de manière structurelle sur des métiers très spécifiques à la dimension “process” de l’activité de transformation alimentaire. La conduite et la maintenance des équipements de production nécessitent un savoir-faire et une expertise particulière et sont donc les plus touchées par les difficultés de recrutement.
Pour accroître leur attractivité, la filière travaille à limiter la pénibilité, par exemple en proposant des séquences de travail moins contraignantes, en alternant les différents postes de travail pour éviter la redondance, etc. L’Unilet communique sur le sens qu’ont les métiers de l’alimentaire. Des entreprises mènent aussi des actions pour valoriser leur contribution à la vie locale.
Des subventions nécessaires pour automatiser les usines
L’automatisation globale dans les usines est devenue un objectif prioritaire. Les trieurs optiques sont généralisés par exemple.
Mais l’Unilet fait savoir que : « La capacité d’investissement des entreprises de transformation de légumes est limitée structurellement par les faibles taux de marges du secteur alors que les besoins de capitaux sont élevés (outils industriels, fournitures, matières premières, main-d’œuvre, stockage). C’est pourquoi des aides à l’investissement en immobilisation (CAPEX) sont indispensables pour maintenir la compétitivité du parc industriel agroalimentaire français. Le taux de subventionnement de l’industrie alimentaire est actuellement le même que celui d’autres secteurs ayant des retours sur investissements pourtant plus élevés, comme les secteurs pharmaceutiques. »
Lire aussi : Légumes d’industrie : pourquoi la survie de la filière est menacée [février 2023]