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Production
Le raisin de table français en petite forme

A fin août, seules deux stations commerciales proposaient du Muscat de plein champ. Tour d’horizon avec Alexandra Lacoste et René Reynard.

La commercialisation de raisins précoces a été assez fluide pour le Prima, un peu plus compliquée pour le Cardinal. Les prix se sont situés entre ceux de 2009 et 2008. « C’est une période qui est un peu délicate, explique Alexandra Lacoste, responsable de l’AOPn raisin de table. Les enseignes ne proposent qu’une seule référence française et seul le Prima peut rivaliser avec le Victoria au niveau prix. De plus, de nombreux arrachages ont été effectués sur le Cardinal, ce qui limite le potentiel. » Ceci étant, les producteurs de précoces n’étant pas organisés, il est difficile d’intéresser les enseignes.
René Reynard, président de l’AOP, est encore plus critique sur le problème des précoce. « On gère la situation comme on le peut. Mais cela fait plusieurs années que l’on explique aux producteurs de raisins sous serre que ce créneau est condamné. Dans de nombreux cas, cette production était le fait de maraîchers qui reconvertissaient leurs serres et le volume n’était pas significatif. Mais ils ne font pas partie de la famille viticole et les choses vont en empirant. De plus, il faut maintenant prendre en compte les importations du Maghreb qui ne sont plus contingentées. Cela va peser lourd dans la balance et ce sont les productions sous serre qui ont encaissé le choc. Produire en plein champ au Maghreb revient bien moins cher que produire sous serre en France et le résultat se voit au niveau du prix en rayon. Ces accords bilatéraux sont une ineptie. On favorise les pays tiers et l’on nous parle de préférence communautaire. Je me demande ce que signifie ce terme. Et en raison de leur prix à la vente, je pense que ce sont ces raisins d’importation qui sont les véritables concurrents des fruits d’été. Pas le raisin français. Les professionnels ne doivent pas se tromper de combat. »

Une semaine de retard pour la récolte 2010
A fin août, les prévisions étaient en cours de réactualisation. « Les professionnels revoient leurs chiffres, note Alexandra Lacoste. De nombreux phénomènes de coulure ont été constatés, associés à la sécheresse, produisant des grappes très légères. La récolte – qui ne sera pas à son plein potentiel mais supérieure à 2009 – pourrait être entre 10 et 15 % inférieure aux premières prévisions, avec un calendrier très étalé. » En revanche, ce phénomène n’affecterait pas le Sud-Ouest. Globalement, la récolte française devrait se situer autour de 50 000-55 000 t, chiffres qui démontrent la dégradation rapide de la production française.
Pour la saison 2009, selon les chiffres de l’AOPn (Agreste ne publie plus de chiffres depuis 2007), la production s’est élevée à 48 690 t, soit 630 % du potentiel. Elle était de 74 000 t en 2002 (entre 60 000 et 70 000 t sur 2003-2008). Ce phénomène est surtout lié aux arrachages de Cardinal et dans le Sud-Ouest à celui de variétés peu productives. « La situation est problématique, déplore René Reynard. Nous avons perdu la moitié de la production en dix ans. A force de vendre à perte, les producteurs décapitalisent et sont dans l’incapacité d’investir. Je refuse que cette année encore, s’il y a des problèmes de commercialisation, quiconque nous oppose qu’il y a surproduction. En toute logique, avec 50 000 t, qui représentent un quart de la consommation, l’écoulement devrait être fluide pour autant que la distribution joue la carte du raisin français en évitant les pressions sur le prix. »

Un contact permanent avec la FCD
« La production de raisin de table cette année n’est pas énorme, ajoute René Reynard. Mais pour que les producteurs résistent, il faut penser à mettre en place un prix de vente qui doit couvrir le prix de revient et intégrant le coût des investissements, dans un souci de partage de la marge. Tous les autres mécanismes ne sont qu’artifices pour faire patienter le monde agricole en attendant la disparition du secteur des f&l au profit d’un capitalisme extracommunautaire. Nous avions une LMA qui prévoyait des restrictions de charges. Je n’ai rien vu permettant à l’agriculture française de regagner une part de compétitivité par rapport aux autres Etats de l’Union européenne. D’ailleurs, ce n’est pas une communauté, c’est un puzzle où chaque Etat semble avoir beaucoup d’avantages et la France, beaucoup de désavantages. »
L’AOPn devra composer avec ces éléments au travers de ses missions. « L’AOP est composée de ses membres fondateurs – à savoir Les Paysans du Ventoux, Val de Nesque, Sica des Bories, Edelweiss, Crozette et Coteaux du Ventoux rejoints cette année par Les 3 Capucins, souligne Alexandra Lacoste. Elle est adhérente au Gefel et son rôle est similaire à celle des autres AOP : suivi et analyse du marché, évolution du marché français, analyse des enquêtes de détail du SNM, représentation du raisin de table auprès d’Interfel et sur les marchés extérieur, suivi du positionnement du raisin français par rapport aux autres origines. L’AOP suit aussi l’évolution de la production en Italie et en Espagne ainsi que les prospectives volumes et le point variétal. » On notera cependant qu’aucune OP du Sud-Ouest n’adhère à l’AOPn…
René Reynard complète la feuille de route de l’AOPn : « Son rôle et de mettre en relation l’ensemble des OP pour élaborer des stratégies communes dans le cadre de la gestion de l’expérimentation, des fonds, de la communication et de la gestion de marché, ce qui est une excellente chose. L’AOP est l’interlocuteur des instances départementales, régionales et nationales pour mettre en œuvre une synergie des politiques efficace et non diluée. Une autre de ses missions est de prévoir l’avenir qui passera par de nouvelles variétés, avec moins de résidus, voire pas du tout grâce à des résistances aux maladies cryptogamiques. Le génome de la vigne décrypté, la sélection devrait être plus rapide, car je considère qu’il n’y a pas en France de variétés suffisamment compétitives pour être plantées. Les pays voisins sont plus en avance, car ils ont prévu ce que l’on nous interdit. Une autre solution serait les OGM. Mais que les faucheurs se méfient. A terme, ils faucheront des vies humaines. »
L’axe essentiel de la communication de l’AOP sera la charte PFI dont le logo a été déposé. « En amont nous travaillons à la réactualisation de la charte PFI. En aval, elle sera la base de la communication, via la presse. Notre cible : surtout les chefs de rayons pour leur expliquer cette charte et leur présenter les raisins français. Des journées d’animations sont prévues en septembre dans les enseignes. » Le raisin participera à l’opération “Origine France” pour laquelle l’AOP s’est engagée financièrement. Les premiers tests auront lieu dans une dizaine de magasins.
La conclusion revient à René Reynard : « Avant cette campagne je suis serein, confiant mais très attentif. Si la météo est favorable, nous pourrions avoir une production prometteuse et un bon début de campagne. A condition que les chefs de rayon ou les chefs d’étal n’épouvantent pas le consommateur avec des prix inabordables. »

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