La révolte des producteurs du Sud de la France
Les tensions sont à leur paroxysme dans le Sud de la France, des Pyrénées Orientales au Vaucluse. Jeudi, près de 200 manifestants venus des départements de Vaucluse, des Bouches du Rhône et du Gard ont bloqué successivement les barrières de péage de Lançon de Provence, de Nîmes et de Gallargues. Quinze camions espagnols ont été délestés de leur marchandise. Contrairement aux manifestations de juillet dans les Pyrénées Orientales, les manifestants ne cherchent plus seulement les pêches et les nectarines. Désormais, ce sont tous les produits espagnols qui sont vidés, y compris ceux qui ne sont pas destinés au marché français. Débordement de colère, mais également exaspération de voir passer des produits qui n’auraient pas leur place sur le marché français. Par exemple des plateaux 2 rangs de pêches nectarines ou des poires de calibre 50, strictement interdits à la commercialisation en France.
Mardi, c’est dans le Gard que la colère des producteurs locaux, soutenus par ceux des Pyrénées Orientales, s’est exprimée. Dans un premier temps, le péage de Gallargues (il y passe près de 10 000 camions/jours) a été la cible choisie pour des vérifications de marchandise. Mêmes maux, mêmes remèdes. Plus tard dans la soirée, les deux cents producteurs se sont rendus à la plate forme régionale de Lidl où toutes les palettes de produits espagnols ont été renversées. Enfin, pour terminer la soirée, ils se sont rendus chez le grossiste Gadéa Fruits, sur le marché de Nîmes, où à nouveau les palettes espagnoles ont été renversées.
Jeudi dans la soirée, les présidents des FDSEA 13,30 et 84, ont été reçus par le Préfet du Gard : « C’était de la redite explique Jean Louis Portal, puisque nous l’avions déjà rencontré mardi matin. Nous lui avons expliqué qu’au-delà de la réunion du 17 (voir plus bas), qui doit tendre vers la mise en œuvre d’actions avec la distribution pour sauver ce qui reste à sauver de la campagne, nous demandons un plan et des aides conjoncturelles pour la filière. Nous avons également demandé une rencontre avec le ministre de l’Agriculture, dont nous souhaitons la venue dans le département pour lui expliquer les difficultés des filières agricoles et le désarroi des producteurs. »
Ce vendredi 12 août, c’est dans les Pyrénées Orientales, que le malaise s’exprimera. La FDSEA a en projet de bloquer un rond point à l’entrée de St Charles, au motif qu’elle n’a pas été invitée à la réunion du 17.
Réunion au sommet le 17 août.
Dans un communiqué collectif en date de jeudi, la FNSEA, la FNPF, Légumes de France et JA annoncent la tenue d’une réunion extraordinaire de France Agrimer pour le 17 août. Au cours de cette rencontre, des mesures d’urgence de fin de campagne devraient être décidées. Cette réunion est considérée comme trop tardive par les syndicats du Sud de La France qui auraient souhaité une entrevue plus rapide pour mettre en place des ventes exceptionnelles le week end du 15 août. Le communiqué conclue que « les producteurs restent plus que jamais mobilisés et seront particulièrement attentifs aux résultats de cette rencontre. »
Les « gaulois » irritent les Ibères. Un nouvel incident diplomatique ?
Au soir du 11 août, les protestations espagnoles ont été nombreuses suites aux actions menées par les « gaulois » terme employé en Espagne pour désigner les producteurs français. Le Ministère de l’agriculture de l’environnement et du milieu rural, a manifesté ses préoccupations face à ce type d’action. L'Espagne a réclamé leur condamnation par les autorités françaises. Elle demande la défense de la libre circulation de marchandises vers les Etats de l'Union Européenne. Pour sa part, le conseiller catalan à l'Agriculture, Josep Marie Pelegrí, a informé l'Union Européenne qu’il avait adopté des mesures de protection pour les camions catalans qui transportent des fruits et des légumes. Il exige de Bruxelles de garantir « une bonne fois pour toutes, la liberté effective de libre circulation de marchandises et de produits agroalimentaires en Europe. » De son côté, la Fepex, dénonce les « actions de producteurs français organisés en commandos» affectant « toutes espèces de produits. » L’organisation précise que « les envois détruits se trouvaient dans un passage par le territoire français vers d’autres pays européens. » L’association des exportateurs espagnols souligne également que « l’enfoncement des marchés et les tensions qu’il provoque entre producteurs européens, est une conséquence de l’inefficacité réitérée des mesures de gestion de crise adoptées par la Commission européenne et du manque d’une réponse communautaire efficace imposant le respect de la libre circulation » des marchandises. Les agriculteurs catalans et galiciens ont aussi exprimé leur indignation et exigé que les mesures opportunes soient adoptées d'urgence.
Ce vendredi 12 août, de nouvelles revendications sont parues dans la presse espagnole. L’Asaja de Catalogne, menace de perturber le retour des vacanciers à la frontière franco-espagnole, ajoutant que si « ces actions continuent, ils répondront œil pour œil, dent pour dent. » Même ton pour l’Asaja de Tarragone : « dans un premier temps, nous ne reverseront pas les camions français, mais si les attaques continuent, nous paierons avec la même monnaie. » Pour Le responsable du secteur de fruits et de légumes de COAG, Andrés Góngora, « les producteurs gaulois ne savent pas entendre que l'actuel problème de la crise horticole est "très, très, très grave" dans toute l'Union Européenne. Elle n'est pas dans les camions, ni dans les produits espagnols", mais « dans un modèle de marché communautaire. » Pour A.Góngora, « les paysans gaulois n'ont pas à manifester devant les frontières, à boycotter les produits espagnols. Ils devraient réclamer des solutions à Bruxelles comme des mécanismes de retrait ou des mesures de gestion de marché pour arrêter cette crise sectorielle. » Pour le secrétaire général d'UPA, Lorenzo Ramos, « la Commission Européenne n'a rien fait pour éviter que les attaques se répètent et pour garantir la libre circulation de marchandises, quinze jours après. »